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16 novembre 2006

Les pédopsychiatres préfèrent la prévention au dépistage des troubles Cécile Prieur

Cécile Prieur

C’EST QUASIMENT à une contre-expertise collective sur la question du dépistage des troubles des conduites de l’enfant que se sont livrés les intervenants d’un colloque organisé par l’Inserm, mardi 14 novembre, à la Mutualité à Paris. Un an après la violente polémique suscitée par la publication, en septembre 2005, d’un rapport de l’institut de recherche, les pédopsychiatres ont rejeté en bloc l’idée qu’il existerait un lien prédictif entre les troubles du comportement chez le jeune enfant et la délinquance à l’adolescence.

Réaffirmant que l’enfant turbulent est « un enfant en souffrance », les professionnels de la petite enfance se sont accordés sur la nécessité d’une prévention globale des troubles, loin d’un dépistage centré sur les seuls symptômes d’agitation.

Préconisée par l’Inserm, l’idée d’un dépistage systématique des troubles des conduites dès 3 ans avait été reprise par le ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy, qui souhaitait l’insérer dans le projet de loi de prévention de la délinquance. Quelque 200 000 signataires de la pétition « Pas de zéro de conduite » avaient rejeté cette hypothèse et dénoncé l’approche réductionniste et scientiste de l’Inserm.

Lors de l’introduction du colloque, le ministre de la santé, Xavier Bertrand, a affirmé lui aussi qu’il refusait  » l’amalgame entre troubles des conduites et délinquance « .  » J’estime qu’un tel dépistage n’a pas sa place dans un projet de loi de prévention de la délinquance « , a ajouté le ministre, en rappelant qu’une surveillance médicale renforcée de l’enfant lui avait été substituée dans le projet de loi sur la protection de l’enfance.

En France, la prévention de la souffrance psychique cherche à appréhender l’enfant dans sa globalité, ont rappelé les intervenants.  » Cette approche globale, pluridisciplinaire, est fondamentale, a affirmé Christine Bellas-Cabane, présidente du Syndicat national des médecins de protection maternelle et infantile (PMI). Elle permet de repérer des enfants présentant des troubles du comportement mais aussi des enfants qui sont en repli.  » Dans ce cadre, et contrairement à ce qu’affirmait l’Inserm, les enfants perturbateurs sont bien pris en charge.  » Les troubles des conduites représentent 17 % des motifs de consultation, ils sont pris en compte par le secteur psychiatrique « , a affirmé Nicole Garret-Gloanec, secrétaire générale de la Fédération française de psychiatrie.

Les réponses apportées ne sont pas pour autant standardisées.  » Nous recherchons notamment une alliance avec les parents, pour les valoriser, pour qu’ils se sentent soutenus et non contrôlés socialement « , a expliqué le Dr Garret-Gloanec.

Pour éviter une nouvelle controverse dans le champ de la santé mentale, les intervenants ont plaidé pour que l’Inserm n’ignore pas l’apport des sciences sociales. « La multidisciplinarité est une condition d’une démarche éthique et scientifique », a considéré Jean-Claude Ameisen, président du comité d’éthique de l’Inserm.

Parallèlement à ce colloque, l’Inserm commence à apporter des réponses aux critiques qu’elle a essuyées : depuis septembre, chaque étape importante des expertises collectives est soumise au regard du conseil scientifique et du comité d’éthique de l’institut.