par Philippe Grauer
Quelqu’un dit ça n’est pas si simpliste. Halte à la confrontation communautariste aveugle. sionistes contre djihadistes et c’est parti ! Pour le sionisme on peut toujours méditer la lettre de Freud dont voici un extrait :
Le principe sioniste confond appartenance religieuse et nationalisme de l’État particulier d’Israël, avec la politique qui est la sienne. Pourquoi pas, tous les états ont une politique et celle-ci est le lieu par excellence du dissensus, c’est la loi du genre. Le principe d’apartheid transformant la Palestine en bantoustans, ayant réussi le modèle de l’Algérie française, le modèle de Sharon, est discutable, éthiquement autant que politiquement si l’on songe à une politique à long terme. Laissons toutes les opinions s’exprimer.
La haine mutuelle fait cercle vicieux avec la situation de belligérance, alors c’est parti, roquettes sur des colonies iniquement et cyniquement installées sur le sol de la patrie de l’autre, contre mise en route d’une répression qui toute ciblée qu’elle puisse s’efforcer d’être, est condamnée au désastreux bilan du conflit actuel, en attendant la prochaine manche.
Car enfin la mauvaise foi consistant à se plaindre du manque de sécurité de terres volées, les « colonies » (mot bien choisi au demeurant), en oubliant que chaque jour que l’Éternel fait on est soi-même en situation irrégulière par rapport à l’autre, part du présupposé j’étais tranquille chez moi quand soudain on se demande pourquoi je me suis avisé que je recevais des roquettes. Comme tous les présupposés celui-ci falsifie la réalité d’une oppression même pas rampante, perpétuelle, tirant argument que l’ennemi n’est pas amical pour dénoncer son agression, la mienne étant hors de cause bien entendu. Dialogue fou.
Cette politique des frères ennemis que Itzaak Rabin assassiné avait entrepris d’interrompre, fait vivre aux peuples de la région une interminable tragédie. Rappelons que les ingrédients de base de la tragédie c’est que tous les protagonistes de la pièce ont raison. Comment ramener cela à la raison ? on peut penser qu’à coups d’explosifs ça ne fonctionne pas puisque ça fait un bon demi siècle que ça dure. Et que l’argument c’est pas moi qui ai commencé, déjà peu valable dans les cours de récréation, est à proscrire absolument en l’occurrence.
La crise est largement régionale, avec la montée en puissance de l’Iran, nation incontournable, et la flambée intégriste locale, l’intégrisme étant hélas partagé par l’ensemble des protagonistes. Là-dessus que des fascistes français relevant la tête en profitent pour pécher dans une eau si trouble et lancer quelques mort aux juifs, et voici la figure qui s’envenime, alimentant un peu plus la confusion entre être juif et être israélien ou pro-israélien, que diffuse le sionisme.
Alors dans ce désordre, comment raison garder ? Il existe en Israël des citoyens israéliens (pas des juifs, on s’en moque de leur confession) qui combattent le bellicisme nationaliste. Michèle Tordjman, qui fut une dirigeante éminente du Psy’g, de retour en Israël, avait immédiatement milité pour la paix et la réconciliation avec les palestiniens. Ça n’est pas trop médiatisé mais ça existe.
Dans les moments où tout le monde court aux armes en criant il faut y aller il se trouve toujours quelqu’un pour dire comme Bartelby moi j’aimerais autant pas. Un peu de générosité (meilleur usage possible de notre liberté et volonté) comme dirait Descartes, ne serait pas de trop dans la situation. Qui le sera le premier, généreux ? Rabin mort, qui sera le prochain Rabin ?
Élisabeth Roudinesco, À propos d’une lettre inédite de Freud sur le sionisme et la question des Lieux saints.
27 juillet 2014
par Arié Alimi
Je n’ai jamais pris la plume publiquement pour défendre des valeurs ou des clients. Ma tradition, professionnelle et confessionnelle, est avant tout orale. J’ai pourtant éprouvé la nécessité de transmettre ces quelques réflexions qui me taraudent depuis mardi, depuis cette audience qui s’est tenue devant le Tribunal de Grande Instance de Pontoise, au cours de laquelle j’ai choisi de défendre deux jeunes hommes que beaucoup ont voulu assimiler aux violences à caractère antisémite qui se sont déroulées dimanche dernier à Sarcelles. Depuis ce jour, nombreux sont ceux, proches, connaissances ou personnes se revendiquant de la communauté juive qui m’ont exprimé leur incompréhension voire leur dégout. A cela s’ajoutait la défense que j’avais également choisi d’assurer d’un jeune homme à qui l’on reprochait de s’être rendu en Afghanistan à des fins « Jihadistes ».
Comment, moi, juif, pratiquant, né à Sarcelles, ayant passé l’essentiel de ma scolarité à l’école Otsar Hatorah de Sarcelles, me rendant à la synagogue de Sarcelles avec ma famille, originaire d’Algérie, qui vit encore aujourd’hui dans cette ville avec cette haine triviale des arabes, ai je pu défendre un « jihadiste », et des « emeutiers antisémistes » qui s’en sont pris à mes coreligionnaires ? Le sujet a semble-t-il retenu l’attention de certains qui y sont allés de leurs explications de tous ordres.
La haine de soi d’abord. La haine d’être juif. Anathème lancé à chaque fois qu’une personne se revendiquant ou se voyant imposée cette identité n’agit pas conformément à la solidarité avec sa communauté et plus confusément avec celle de la politique de l’État d’Israel en particulier en période de conflit meurtrier avec le peuple Palestinien. J’ai toujours porté haut et fort, mon nom, ma tradition, y compris mon attachement à Israel. A l’université, en tant que président de l’UEJF à ASSAS en combattant toutes les formes de racisme et d’antisémitisme, dans mon assiette en respectant certains interdits alimentaires, en vacances, à chaque fois que je me rends à Jérusalem et que je sens le
Alors, une haine de ce moi ? Peut être. Mais alors, une haine de ce moi inconsidérément collectif, tribal, ce moi de la communauté de sang et du sang qui ne parvient plus à reprendre son souffle dans son élan guerrier contre cette masse indistincte antisémite ou antisioniste, la différence ne pouvant plus être prononcée ou simplement pensée, après Barbes et Sarcelles, après les diatribes gouvernementales, après les condamnations de ces émeutiers.
Alors, j’ai choisi de défendre ces deux jeunes hommes arrêtés par des fonctionnaires de Police qui ont vu en eux des casseurs, parce qu’une bouteille en verre était venue s’échouer près d’eux, et que ces deux là étaient dans la rue au même moment. Certains ont cru voir dans mon choix, un simple appât du gain. Je les offenserai encore plus en leur disant que je n’ai pas souhaité être rémunéré pour cette défense. Beaucoup ont pensé au narcissisme de l’avocat face aux caméras. Et je dois reconnaître, que si la presse a cet avantage de porter rapidement et au plus grand nombre des idées, elle nécessite d’être véhiculée par l’image d’une personne qui doit se mettre en avant pour les faire entendre.
D’autres ont vu dans cette défense, une énième provocation, après avoir défendu un « jihadiste », si tant est que ce terme ait un sens. Et je dois avouer que cette explication me semble être la plus proche de mes intentions. Provoquer. Provoquer la réaction, le débat pour tenter de contribuer à mon petit niveau à la dislocation de ces deux masses informes qui se structurent au sein même de la communauté française, cette communauté républicaine, qui voit s’affronter la communauté juive à des jeunes des cités pour certains aveuglés par une rage que les politiques de plusieurs décennies n’ont cessé d’alimenter.
Je continuerai donc à défendre des jeunes des cités, des « jihadistes », des émeutiers, parce que face aux sombres jours qui s’annoncent pour notre pays, face à un racisme et à un antisémitisme d’État qui se prépare dans l’ombre, le dialogue intime que se noue entre un avocat et son client quelque soient ses haines et ses colères, est déjà source d’apaisement et de compréhension retrouvés. Français, avocat, juif, ayant passé ma jeunesse dans les cités, je revendique chacune des ces identités, dans le désordre.
Nous avons le plaisir de vous convier à la journée découverte de notre école de formation de psychopraticien, conduite par Pascal Aubrit et Henry Kisiel, qui aura lieu :
L’objectif de cette journée consiste à découvrir et à expérimenter le programme de l’école, les formations que nous dispensons et notre méthodologie reliée à la psychothérapie relationnelle. Elle se déroulera dans une alternance de séquences expérientielles et de temps d’élaboration. Une présentation du cursus de formation au CIFPR sera suivie par un temps de questions-réponses.
Lieu : Centre de Psychologie Biodynamique du Père Lachaise
Salle ALIZE
59 boulevard de Ménilmontant, 75011 Paris
Code immeuble : 19 B 60
Code BLOC 1 : 1519