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1 juin 2015

vivre les commencements par Bernard Ginisty, chapeauté de « Une foi n’est pas coutume » par Philippe Grauer

une foi n’est pas coutume

par Philippe Grauer

question de liberté

Je suis athée, Dieu me le pardonne, lui qui n’a pas fait le monde « parfait », il y faut du jeu, sans quoi pas de liberté, dont celle de se livrer à l’horreur, ce qui nous laisse celle de nous en délivrer. Une chère amie m’adresse régulièrement, elle qui croit au ciel (et Dieu sait s’il faut de la foi pour y croire par les temps qui courent, mais si la foi n’était pas la capacité de croire à l’incroyable ce ne serait pas la foi), les homélies de Bernard Ginisty,. Je suis athée mais pas ingrat, me souvenant du chanoine Morel, un Juste, qui aux heures sombres a contribué à sauver, avec de nombreuses autres, au plus près du plus grand danger, ma vie. J’ai conservé un souvenir ému de son Dieu dont enfant j’ai servi en latin les messes.

croyances quand vous nous tenez !

Tout ça pour dire que cette fois n’y tenant plus je vous répercute ce bref et beau texte, qui prouve que la question de la croyance(1) est d’une actualité brûlante, et que l’Histoire des religions constitue un domaine voisin du nôtre, qui n’a pas à s’en contaminer mais à l’occasion à s’en inspirer. Il faut avouer que la Méditerranée, et les déserts environnants, ont vu surgir trois monothéismes dont nous sommes héritiers, parfois terriblement meurtriers (il y a des moments où les croyances tournent au vinaigre, voire au gaz Zyklon ou au Daesh), parfois d’une puissante capacité d’inspiration humaniste (encore une invention méditerranéenne). Il n’y a pas que nous au monde, mais nous y sommes aussi. Et précisément, avec, les autres.

bonne et mauvaise nouvelles

Vivre les commencements recommencer tant qu’il le faudra, cela me fait furieusement penser au cheminement du travail psychothérapique – dès que relationnel bien entendu. La bonne nouvelle c’est que nous pouvons travailler à la Sisyphe à l’avènement irréaliste (la foi peut alors se révéler utile, qui n’y recourt de temps à autre ?) de cette contrée que la bonté seule ensemence. La mauvaise c’est que pas de bon sans mauvais, ça contrarie mais ça dynamise. Mon Dieu (Saint François qui pensait à tout avait inventé un Dieu des athées) !

Allez, lisez en paix !


par Bernard Ginisty, chapeauté de « Une foi n’est pas coutume » par Philippe Grauer

vivre les commencements

Chronique hebdomadaire de Bernard Ginisty du 2 juin 2015

l’homme ne se sauve pas en se dissolvant

Les temps que nous vivons connaissent à la fois la résurgence des formes les plus barbares des fondamentalismes religieux et la diffusion d’un vague syncrétisme spiritualiste. La juxtaposition des aberrations commises au nom de religions avec la multiplicité des sollicitations du « marché » des croyances, des religions et des spiritualités peut conduire à une crise des identités comme l’écrit Gabriel Ringlet, vice-recteur pendant 11 ans de l’Université Catholique de Louvain : « Face à ce qui apparaît bien comme une mutation générale du croire, les identités sont hésitantes, morcelées. Les institutions s’équivalent. On ne prend pas position (…) C’est le règne de l’adoucissant et de l’idéologie ramasse-tout (…) Croyances et pratiques deviennent interchangeables (…) J’aime entendre à ce propos la formule percutante du théologien orthodoxe Olivier Clément : « L’homme ne se sauve pas en se dissolvant ». Je ne cache pas que ces arrangements, ces bricolages idéologiques, ce syncrétisme doux, ce relativisme mou m’inquiètent presque autant que le fanatisme. Parce qu’ils conduisent à l’indifférence. L’indifférence à l’autre surtout(1) ».

une parole de libération et de paix

Dans ce contexte, le théologien Joseph Moingt tente de définir ainsi l’originalité du Christianisme : « À notre époque où renaissent en différents endroits du globe de violents conflits religieux, il est important que le christianisme se signale par ce qui le différencie radicalement de toute autre religion, à savoir de n’être pas fondé sur du sacré, sur l’autorité d’une loi et d’une tradition immémoriales et intangibles, mais sur un Évangile, une Bonne nouvelle, une parole de libération et de paix(2). »

entre l’identitaire communautariste et l’individualisme régulé par le seul marché mondial

Nous ne sommes pas condamnés à osciller entre l’identitaire communautariste et l’individualisme régulé par le seul marché mondial. A égale distance de l’intégriste religieux, idéologique, nationaliste ou ethnique et de l’individu consommateur avançant avec son caddie vers les nouveaux lendemains des croissances qui chantent, la voie évangélique amène à passer du particularisme des langues maternelles à une nouvelle naissance. Il ne s’agit pas de changer un système par un autre, mais de rester ouvert à un engendrement permanent. Dès le IVème siècle, Grégoire de Nysse définissait ainsi le cheminement chrétien : « celui qui court vers Dieu devient toujours plus grand et plus haut que lui-même, augmentant toujours par l’accroissement des grâces (…); mais comme ce qui est recherché ne comporte pas en soi de limite, le terme de ce qui est trouvé devient pour ceux qui montent le point de départ de la découverte de biens plus élevés. Et celui qui monte ne s’arrête jamais d’aller de commencement en commencement vers des commencements qui n’ont jamais de fin»(3).