[Document : Samuel Luret & Jean-Thomas Ceccaldi, Vies de fou]
On nous signale ce bon film paru sur Canal. Il confirme ce que l’on savait de la misère de la psychiatrie en France. Nous rappelons qu’à côté du malaise il y a la maladie (l’un n’empêche pas l’autre mais ils ne sont pas forcément conjoints), que la maladie mentale, affaire de la psychiatrie, l’autre versant du soin, le médical, qui s’oppose (et parfois complète) au socio psycho philosophique du malaise affaire du soin pris de soi, ou souci de soi, souffre du fait que cette profession, rattrapée par la neurologie et progressivement effacée de la carte dans notre pays présente les caractères de la catégorie de l’espèce en voie de disparition. Situation hautement dommageable car les médecins généralistes manquent de la compétence spécifique requise.
Cela ne veut pas dire non plus que la psychiatrie n’aurait pas intérêt à s’appuyer, en réseau, sur la spécificité différente des psychothérapeutes relationnels et psychanalystes : ccopération logique souhaitable.
De plus en plus de schizophrènes sont à l’heure actuelle dans la rue et en prison. Qui croira que c’est le bon traitement à administrer à ces malades, et par voie de conséquence à la société ? le tout sécuritaire apparenté au tout neurologique tout médicament et tout génétique s’apparente à une nouvelle barbarie. Prenons garde qu’elle ne frappe, c’est bien le mot, un soir à nos propres portes.
Philippe Grauer
Quelle place notre société accorde-t-elle aux malades psychiatriques? Comment ceux-ci vivent-ils avec leur maladie? Ces deux questions guident le documentaire de Canal+ Vies de fous , “un voyage” plein d’humanité au coeur de la psychiatrie.
Les réalisateurs Samuel Luret et Jean-Thomas Ceccaldi ont passé dix-huit mois dans le milieu de la psychiatrie, des urgences de Sainte-Anne à Paris aux associations et hôpitaux fermés. Leur conclusion: celle-ci subit une diminution drastique de ses moyens alors que la demande de soins n’a jamais été aussi grande. Par exemple, on recense six fois plus de dépression qu’il y a trente ans, explique le documentaire. En 20 ans, les demandes de consultation ont doublé, de 700.000 en 1989 à 1,4 million en 2007.
Sans tomber dans le voyeurisme, la caméra s’attarde sur les visages des malades et des soignants. “Je suis toujours déçue quand je me réveille le matin et que je suis toujours là”, explique une patiente dépressive au chef du Centre psychiatrique d’orientation et d’accueil (CPOA) de l’hôpital Sainte-Anne, Marie-Jeanne Guedj. Cette dernière assure, lors de la présentation du documentaire, que le temps est à la rentabilité. Il faut faire sortir les patients au plus vite, ce qui pose problème au niveau de la continuité des soins, déplore-t-elle.
“On charge le milieu associatif, afin de pallier les manques de l’État”, déplore le responsable d’une association. “Nous finissons par faire du gardiennage et non des soins”, se plaint un soignant. “De plus en plus de malades mentaux échappent au système de soin, et nombreux sont ceux qui se retrouvent jetés à la rue ou viennent remplir des prisons déjà surchargées”, raconte Samuel Luret. Près de 30% des détenus seraient atteints de troubles psychologiques.
Le documentaire met en outre l’accent sur l’augmentation de la responsabilité pénale des malades mentaux. Les réalisateurs et Marie-Jeanne Guedj mettent en cause notre modèle de société. Ils pâtissent d’”une crise sociale” et de “la politique sécuritaire”: “Quand les gens lâchent, ils ont plus de mal qu’avant à se réinsérer”, assure cette dernière, déplorant par ailleurs de voir “de plus en plus chez les malades des gens dangereux”.
Diffusion lundi 20 octobre à 20h45 sur Canal +