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4 février 2013

Anna et Sigmund Freud, Correspondance 1904-1938 Mariane Perruche

Mariane Perruche

Anna et Sigmund Freud, Correspondance 1904-1938, Fayard, 2012, 680 pages.

lu par Mariane Perruche

Extrait – on lira avec profit l’article en entier consultable selon l’hyperlien ci-dessus.

Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, (1856-1939) entretint toute sa vie une correspondance fournie avec ses collègues, ses amis, écrivains ou analystes, et avec sa famille dispersée dans toute l’Europe. De nombreux extraits de cette correspondance sont disponibles tant en allemand qu’en français.

la partie plus intime

La partie professionnelle de la correspondance ne fait plus de mystère pour le public français, ainsi que tout ce qui concerne l’histoire et la préhistoire de la psychanalyse, comme par exemple la fameuse correspondance entre Freud et Fliess dont l’importance fut révélée par la Naissance de la psychanalyse, Lettres à W. Fliess 1887-1902 (PUF, 1991). En revanche la partie plus intime de la correspondance, comme ses lettres à sa femme (toujours indisponibles en français) ou les lettres à sa fille Anna présentées ici pour la première fois en français, ne manqueront pas d’attirer un public intéressé par l’histoire de la psychanalyse.

âgée d’à peine 9 ans et Freud de 48

Cette édition est établie par Ingeborg Meyer Palmedo (pour l’édition allemande en 2006) qui rédige également la postface et les notes et fournit un appareil critique précieux (index et bibliographies très complètes). Cette spécialiste de la correspondance de Freud a déjà travaillé sur la publication en allemand de la correspondance entre Freud et Ferenczi, puis sur celle de la correspondance de Freud avec ses enfants (Briefe an die Kinder, Berlin, Aufbau, 2010, Lettres à ses enfants, Aubier, 2012). La correspondance entre Freud et sa fille cadette présente toutes les lettres échangées entre Sigmund et Anna depuis 1904, alors que celle-ci, la dernière de ses six enfants, est âgée d’à peine 9 ans et Freud de 48, accompagnées d’un appareil critique très précis après chaque lettre permettant à tout public, même peu informé, de suivre commodément le flux de cette correspondance.

Meyer-Palmedo confronte de façon rigoureuse les événements évoqués dans cette correspondance avec les biographies bien connues de Freud, au premier chef celle d’Ernest Jones (Das Leben und Werk von Sigmund Freud, Stuttgart, 1960-1962, trad. en français PUF, Quadrige, 2006) et celle d’Anna Freud par Elizabeth Young-Bruehl (trad. française, Payot, 2006). Meyer-Palmedo n’hésite pas à remettre en question tel et tel détail de ces biographies qui ont fait autorité à la lumière de cette correspondance entre Freud et Anna, ce qui fera bien sûr de cet ouvrage un précieux allié pour les historiens de la psychanalyse et les spécialistes de l’œuvre de Freud.

attentif, soucieux, aimant, souvent douloureusement meurtri

Mais le principal intérêt de cet ouvrage n’est pas seulement dans cette précision historiographique. Il n’apportera pas non plus de révélation qui viendrait nourrir les polémiques récentes autour de la vie et l’œuvre de Freud : celui-ci y apparaît au fil des pages comme un père de famille attentif, soucieux, aimant, souvent douloureusement meurtri par les maladies et le décès de ses proches et préoccupé par la nécessité d’établir la sécurité financière d’une nombreuse famille.

une sorte de retenue commune

On y retrouvera au fil des échanges, souvent étouffé par une sorte de retenue commune à Freud et à Anna, le deuil de sa fille Sophie, décédée subitement de la grippe espagnole en 1920 : en effet Anna se chargera pendant de longs mois des deux enfants de celle-ci à Berlin au foyer de Max Halberstadt son mari et se prendra d’affection pour l’aîné, Ernst, dont elle assumera l’éducation pendant quelques années. Et on retrouvera l’émotion très contenue de Freud concernant la mort de son petit-fils préféré, Heinele, trois ans après celle de sa mère (195 SF, p.392).