Les psychologues freudiens ont contesté dès le départ l’orientation de l’article 52 de la loi du 9 août 2004 sur l’usage du titre de psychothérapeute. Ils appellent donc logiquement à une mobilisation générale contre le décret d’application de celle-ci. Parce que des contradictions insurmontables apparaissent entre certains alinéas du texte. Parce qu’ils aperçoivent ce que ces contradictions tentent de masquer : la volonté de faire disparaître purement et simplement les psychologues cliniciens orientés par la découverte de l’inconscient freudien. Ils rappellent
— que Freud s’est battu pour la discipline qu’a engendrée la découverte de l’inconscient soit une discipline profane, c’est-à-dire non médicale dans son principe.
— que l’inconscient tel qu’il a émergé dans la civilisation au XXe siècle n’est le monopole d’aucune caste professionnelle et concerne potentiellement tout un chacun qui souffre dans son corps ou dans sa pensée.
— que la rencontre avec un psychologue ne saurait donc être prescrite par quiconque ni, a fortiori, programmée par un tiers selon des critères censés valoir pour tel ou tel symptôme.
— que la psychologie clinique est une discipline exigeante, qui comporte des risques, et que ces risques doivent être assumés en connaissance de cause par ceux qui ont dédié leur vie à cette pratique et au renouveau permanent de sa doctrine.
Ils voient clairement la manœuvre à l’œuvre dans ce décret : sous prétexte de sécuriser le public et d’écarter les charlatans, créer une nouvelle profession, et fragiliser ceux qui l’exerceront en réévaluant régulièrement l’usage que les futurs psychothérapeutes feront de leur titre. La manœuvre technocratique consiste à vider de son contenu usuel le mot de psychothérapie, et à en donner la maîtrise improbable à desdits psychothérapeutes qui n’auront bientôt plus rien à voir avec ce que le public attend à bon droit de ceux-ci.
Ils refusent le décret parce que, derrière ce texte, c’est un choix de société qui se profile : ou bien des « populations » « gérées » par des experts et leurs besoins sans cesse évalués en fonction des offres du marché, ou bien des sujets certes souffrants mais responsables, libres de choisir leur psy et de traiter leurs embarras avec leur désir dans la dignité.
Et qu’on n’aille pas dire que des psys pourront se polyformater pêle-mêle à l’application pure et simple de protocoles dits de soins dans le champ du psychique, où c’est la relation à l’autre qui prime absolument toute prescription. Ces pseudo hommes-orchestres d’une pseudo psychothérapie ne seront que des automates, normés par les fameuses conclusions scientifiques d’un certain rapport sur l’efficacité des psychothérapies, supposé avoir prouvé, par des méthodes par définition inadéquates à leur objet, l’orientation dite psychodynamique ne vaut que dans un cas sur seize. De là à éradiquer bientôt lesdits psychothérapeutes qui auraient imprudemment choisi cette voie, il n’y a pas loin.
Les psychologues freudiens refusent donc d’être enrégimentés dans des bataillons de faux psys qui ne seront plus que de vrais évaluateurs voués à alimenter des programmes de pseudo recherche bio sociale, au mépris de la créativité propre aux êtres parlants … ou de malheureux évalués et condamnés à disparaître pour défaut d’efficacité.
Ils invitent donc les psychologues pour qui la relation à l’autre est l’instrument de leur pratique à faire connaître leur opposition à ce projet de décret qui est pour eux inacceptable.
Merci de diffuser cet appel et d’adresser ici même vos courriels de protestation contre ces décrets.