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22 janvier 2018

Cumulant approximations, fantasmes et erreurs, le philosophe français a manqué de rigueur dans son Carnet guyanais par Maxime Brousse

par Philippe Grauer

On avait Tintin au Congo, on a eu le bonimental Onfray et le docteur Freud, voici Onfray chez les piranhas. Écrit hâtivement, en amateur préremptoire comme d’habitude, ce texte illustre l’à peu près -isme chronique de notre petit philosophe de media touche à tout, touche à rien, touche pas sa bille anthropologique évidemment. Retour à la case départ, relisons Tristes tropiques.

On nous annonce par ailleurs que son UP populaire déménage. De Caen à Deauville. Agréable à écouter si l’on n’est pas regardant à ce qui se répand en manque de rigueur et en pensée lâche, ce bel exemple de Discours sur la populo-méthode y produira-t-il mieux son petit effet ? Plus chicos en tout cas.


par Maxime Brousse

pléïade d’erreurs

En novembre 2017, Michel Onfray publiait chez Gallimard Nager avec les piranhas, un «carnet guyanais» bourré d’approximations et d’erreurs, tiré de son expérience en Guyane et de son très bref passage dans le village amérindien de Taluen. En quatre-vingts pages, l’écrivain aux quatre-vingt-dix ouvrages méprise toute l’anthropologie française, mais aussi les efforts de nombreux professionnels en poste en Guyane. Surtout, il fait ce qu’aucun intellectuel sérieux n’ose plus faire depuis des années: parler au nom d’un peuple à qui il ne donne jamais la parole. Car de la pléiade d’erreurs qui constellent l’ouvrage –pourtant paru dans la collection «Blanche», présentée comme la plus prestigieuse de la maison d’édition– ce qui ressort, c’est surtout que Michel Onfray sait ce qu’il faut faire des Amérindiens de Guyane, mais n’a pas pensé à leur demander leur avis.

écrit en une nuit

 

Michel Onfray le 15 octobre 2010 | CHARLY TRIBALLEAU / AFP

Nager avec les piranhas aurait été écrit en une nuit, quelques semaines à peine après le retour de du philosophe en métropole, en novembre 2015. Il avait été convié en Guyane pour parler de son ouvrage Cosmos puis, à l’invitation du photographe Miquel Dewever-Plana et de David Redon, conseiller de la Direction des affaires culturelles de Guyane (présenté à tort comme géographe dans le livre) il avait passé douze heures dans le village amérindien de Taluen. C’est là que, pour le chambrer avant sa baignade dans le fleuve Maroni, des Amérindiens l’auraient mis en garde contre la présence des piranhas. Sans recours à aucune bibliographie, sans échanger avec les intellectuels amérindiens ni les nombreux anthropologues spécialistes de la région, Michel Onfray a, par une nuit d’automne, couché sur papier ce mélange d’impressions, d’émerveillement enfantin et de délire égotiste, pour apporter sa pierre au débat. Malheureusement, son texte est loin de rendre service à la cause qu’il souhaite défendre, et qui l’a légitimement chamboulé.