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8 juillet 2010

Décret : « Recours contentieux pour excès de pouvoir » François-R. Dupond Muzart ~ frdm

François-R. Dupond Muzart ~ frdm

Édition spéciale

Les voleurs volés continuent de protester. Volés et incroyablement naïfs. Qui pouvait penser sérieusement qu’il est juste et sain de procéder au dépouillement des praticiens en psychothérapie relationnelle du titre générique dont ils avaient durant quarante ans et plus illustré généreusement et soigneusement encadré — autorégulé, ce terme existe bien, et c’est par mauvaise foi volontaire que la campagne populiste parle d’auto-proclamés — la spécificité de la dynamique de subjectivation. Et que cela serait sans conséquence pour soi-même ? C’est en effet aussi méchant que bête.

Comptons ceux qui n’ont pas trempé dans ce calcul.

La santé mentale est une machine de guerre contre la psychanalyse et la psychothérapie relationnelle, indissociablement, les deux côtés du Carré psy que les scientistes de la médecine organiciste alliée à une psychologie neuro TCC qu’elle entend se subordonner aimeraient soumettre à leur empire sinon pire si opportunité. Ne perdons jamais de vue les fondamentaux.

C’est dans ce cadre qu’intervient la requête d’Association Analyser, aveugle au fait qu’innombrables furent les psychanalystes à applaudir à une loi qui nous dépouillerait de notre titre au motif d’une politique de santé mentale où ils pensaient se loger à l’abri et de là considérer notre déconfiture sans trop de compassion. Cela ne s’est pas passé comme ça et ne se passera pas comme ça. C’est tout simplement irréaliste. Laissons-les engager une bataille de procédure, les psychologues vont faire de même, et vivons en attendant notre vie de psychopraticiens relationnels hors champ, hors du panier de crabes, à l’abri de la médicalisation de l’existence.

Philippe Grauer


Communiqué : L’Association Analyser a enregistré sur place au Greffe du Conseil d’État le 7 juillet 2010 un « Recours contentieux pour excès de pouvoir », tendant à l’annulation partielle du Décret du Premier ministre nº 2010-534 du 20 mai 2010 « relatif à l’usage du titre de psychothérapeute », en ce que ledit décret ne comporte nulle mesure d’application sérieuse qu’appellent et qu’ordonnent, à propos des « psychanalystes » et de « leurs associations », les dispositions de l’article législatif, article 52 modifié de la loi nº 2004-806 du 9 août 2004 « relative à la politique de santé publique », et requérant injonction au Premier ministre de prendre les mesures nécessaires. – Le Dossier de Requête introductive d’instance est publié à l’adresse :http://analyser.asso.fr

– François-R. Dupond Muzart ~ frdm

Un commentaire que je reporte ici :

— Vous me demandez pourquoi la requête d’Association Analyser en annulation du décret devant le Conseil d’État est limitée au point concernant les associations de psychanalystes (dont pour autant la presque totalité sont des psychologues, du moins les psychanalystes déclarés, et hormis les médecins bien sûr).

— Tout d’abord, le but associatif d’Association Analyser est soigneusement rédigé pour ne pas faire doublon avec les buts connus et supposés des organisations de psychologues. A priori ce n’est pas pour… ensuite présenter des requêtes au Conseil d’État qui reprennent les buts des organisations de psychologues. Mais c’est un argument au moins partiellement formel : si cela pouvait être utile, nous pourrions modifier les statuts, le but associatif, d’Association Analyser.

— Ensuite, ce n’est précisément pas ce que j’ai cru bon proposer dans nos discussions d’association.

En effet, un projet de loi relatif à la psychiatrie et la “santé mentale” a été présenté en Conseil des ministres ce printemps. Il est prévu qu’il vienne en discussion au Parlement à l’automne. Il faudrait se souvenir de ce que sont les amendements… surprise. Comme juriste, je peux bien évaluer des moyens juridiques d’attaquer un décret, mais si c’est pour voir au cours du contentieux des amendements… surprise venir confirmer, dans la loi relative à la psychiatrie et à la “santé mentale”, le décret attaqué, voire faire empirer celui-ci au détriment, ici, des psychologues, je ne vois pas l’intérêt.

— Or, j’ai déjà écrit ceci, je l’ai diffusé à 400 responsables et récents responsables au sein d’organisations et collectifs de psychologues, en parlant d’épée de Damoclès. Ce que j’ai dit précédemment, c’est que s’agissant d’une question de société, elle méritait le débat démocratique ultime qui est celui du principe procédural du contradictoire devant une juridiction. J’ai même dit que je pourrais verser une contribution si un “Psychothon” était lancé pour financer un tel recours des organisations de psychologues.

Mais je n’ai jamais dit que je voudrais être celui qui par une requête de partie principale, prendrait la responsabilité ou si peu, de contribuer à la motivation d’amendements surprise au Parlement, venant conforter le décret ou le faire empirer. Si les organisations de psychologues prennent cette “responsabilité”, alors je les soutiendrai. Mais moi je n’en prendrai pas la responsabilité de partie principale demanderesse devant le Conseil d’État.

— Par conséquent, je me contente d’attaquer le décret en son silence relatif aux conditions d’applications relatives aux associations de psychanalystes, parce que là, c’est ce silence même qui rend absurde l’application, et je considère que ce silence est volontaire, destiné à ridiculiser la mention des psychanalystes et de leurs associations dans l’article de loi. Parce que je sais, pour l’avoir entendu rapporter et pour l’avoir entendu de mes propres oreilles de Mme Aronica, maintenant pékinoise, quand elle était conseillère sur ce dossier au ministère, que le ministère de la Santé est uniment opposé à la mention des psychanalystes et de leurs associations.

Donc ils ont fabriqué un décret qui ridiculise l’application de la loi en ce qui concerne ces mentions dans la loi, pour ensuite venir la bouche en cœur demander au Parlement de supprimer ces mentions dans la loi. Donc sur ce point il n’y a strictement rien à perdre. Mais j’estime de plus qu’ils ne le feront pas dans la loi en cours de procédure relative à la psychiatrie et à la “santé mentale”. C’est trop tôt, semble-t-il, l’application absurde sur laquelle le ministère compte pour convaincre les parlementaires, dont Bernard Accoyer soi-même, de supprimer les psychanalystes et leurs associations de la loi, cette application absurde n’aura pas eu le temps de se manifester. Et bien au contraire de fuir les parlementaires, je vais envoyer une copie de ma requête à Bernard Accoyer, qui incessamment ne tarit de protestations de ses bonnes intentions et opinions à propos des psychanalystes et de la psychanalyse, et de Sigi en or bien sûr.

— En toute hypothèse, le tableau annexe au décret, tableau qui fixe les dispenses seulement partielles de formation complémentaire pour les psychologues, pour l’obtention du titre de psychothérapeute, ne présente pas d’illégalité éventuelle par rapport à la loi, puisque la loi dit « dispense totale ou partielle pour les psychologues », et en donne le pouvoir de décider au Premier ministre par décret.

L’illégalité éventuellement constatée par le Conseil d’État le serait donc non par rapport à la loi, mais par rapport aux faits : au fait que les psychologues suivent déjà une formation en psychopathologie au cours de la formation qui les conduit au diplôme de master. Il faudrait donc convaincre le Conseil d’État de quelque chose de très difficile, presque subjectif, qui est à la limite du droit et des faits.

— De plus, même si l’on peut apparemment trouver des exceptions, la formation supplémentaire n’est pas “la même”, puisque la formation supplémentaire en psychopathologie pour le titre de psychothérapeute comporte obligatoirement des médecins (psychiatres)-professionnels de santé non seulement dans l’équipe pédagogique, mais aussi dans le conseil scientifique de la formation. Le Conseil d’État prendra précisément, éventuellement, appui là-dessus, pour prononcer que n’y ayant en cela d’identité et de doublon des formations, le décret ne serait pas illégal.

— Je comprends donc très bien que les organisations de psychologues prennent du temps pour arriver à formuler une décision et un communiqué commun à propos d’un recours contentieux (si même du moins c’est sur de telles considérations qu’elles hésitent, mais peut-être pouvez vous leur rappeler ces considérations, au cas où elles les auraient oubliées…).