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10 juin 2010

Deux minutes cinquante sur RFI : « une très mauvaise loi » Serge Ginger

Serge Ginger

Interview sur RFI (1)

Diffusion le mer. 9 juin, à 8 h 56 et 18 h 38.

Le décret sur le titre de psychothérapeute.

Quasiment rien, deux minutes cinquante. Nos voix se perdent dans le brouillage des déclarations de Monsieur Accoyer, tellement content d’en avoir fini avec ses charlatans (qui se trouvent… ne pas se trouver, très précisément, chez nous), et dans une certaine indifférence générale. Les médias n’ont plus tellement d’intérêt pour la destinée du titre de psychothérapeute, le moment des grandes batailles d’opinion est passé, celui du passage à la moulinette arrive.

Pas de mort, même symbolique, mais une résurrection. La nôtre. Nous continuons, mieux que jamais.

Philippe Grauer


Commentaires de 2 min 50 au total, diffusés aux informations générales, après la politique, le football, le cyclisme et une recherche sur les autistes, avec interviews de Bernard Accoyer, Georges Fenech, Serge Ginger et Serge Kloch.

S. Ginger a été interviewé au magnétophone par une journaliste – très favorable à notre situation – pendant 32 minutes, mais – comme il est habituel – la rédaction générale n’a conservé que quelques phrases (62 secondes au total, soit… 3 % de l’interview).


Texte de l’émission :

Encadrer la pratique des psychothérapies, c’est le but d’un décret paru récemment : c’était le 20 mai dernier. Pour devenir psychothérapeute, il faut désormais répondre à certains critères bien définis.

Pour Bernard Accoyer, président de l’Assemblée nationale, c’est le plus long de ses combats parlementaires : depuis 1999, il lutte contre une situation qu’il juge dangereuse pour les patients.

B. A. : « Jusque là, n’importe qui pouvait s’installer et visser sa plaque de psycho¬thérapeute, et par conséquent recevoir des personnes en situation, bien entendu, précaire, puisque ce sont des personnes en besoin de demander une assistance. »

Un vide juridique aux conséquences graves, souligne Georges Fenech, président de la Miviludes :

G. F. : « Nous avons d’innombrables cas de victimes qui sont tombés sous l’emprise mentale d’un pseudo psychothérapeute qui les a coupés de leurs soins conventionnels »

2 % des patients se plaignent qu’une psychothérapie a aggravé leur état ; deux sondages des instituts BVA et CSA l’affirment.

G. F. : « Ce décret prévoit maintenant des formations obligatoires avant de pouvoir utiliser ce titre, dans des Centres agréés par l’État – qui délivrera donc des diplômes. »

Du côté des psychothérapeutes – qui exigent depuis des années une réglementation de leur profession – le décret ne convainc pas. Serge Ginger, secrétaire général de la Fédération française de psychothérapie et psychanalyse, juge que la nouvelle formation obligatoire – qui porte surtout sur la psychopathologie – est loin d’être adaptée.

S. G. : « La psychopathologie, c’est l’étude du diagnostic ; la psychothérapie, c’est le traitement. Il ne suffit pas de dire que vous êtes paranoïaque ou dépressif, il faut encore savoir ce que l’on peut faire ! La psychopathologie décrit les troubles, mais ne définit pas du tout les interventions. C’est la psychothérapie qui le fait. Il y a là une confusion fondamentale. »

Pour avoir les outils d’une psychothérapeute digne de ce nom, dit Serge Ginger, il faut se former dans une des écoles reconnues par la profession – où l’on combine pratique, formation continue, lectures et séminaires Ce que confirme Serge Kloch. Ce cadre infirmier en pédo-psychiatrie s’est formé tout au long de ses 20 ans de carrière à la psychothérapie. Lui aussi est déçu du décret.

S. K. : « C’est une très mauvaise loi. C’était, soi-disant, pour lutter contre le risque sectaire des charlatans. Or, à mon avis, cette loi ne va absolument pas permettre d‘empêcher les sectes de s’emparer de la psychothérapie, comme elles le font déjà aujourd’hui. En tous cas, pas cette loi là, qui ne règle rien, mais qui, en plus, donne l’illusion qu’elle va résoudre le problème ».

Le nouveau décret déplait également aux psychologues – qui vont manifester le 19 juin, au Champ de Mars, à Paris, pour exprimer leur indignation.


Plan des thèmes développés (en une demie heure d’interview) :

Plan ITW Radio France international (RFI), le mer. 2 juin à 11 h

Le décret réglementant le titre de Psychothérapeute

• Les juristes rédacteurs du décret – et notamment de son annexe, précisant les formations complémentaires exigées – ne se sont manifestement pas informés des programmes actuels de formation des médecins, psychologues et psychothérapeutes !

Ainsi, par exemple, le décret demande aux psychologues cliniciens diplômés en psychopathologie de refaire à nouveau – au sein des mêmes universités et avec les mêmes enseignants – le même programme !
De même, le décret suppose que les médecins non psychiatres ont suivi une formation sur les « grandes pathologies psychiatriques » et tous effectué un stage en services psychiatriques.

Enfin, il demande aux psychothérapeutes certifiés de refaire en 100 h une « formation aux principales approches utilisées en psychothérapie », alors qu’ils les ont déjà étudiées pendant plus de 1 000 heures, en 4 ou 5 années ! (Le programme du Certificat Européen de Psychothérapie (CEP) prévoit une formation de 1 450 heures en 4 années, à partir du niveau bac + 3).

• L’ensemble de la loi et du décret entretient plusieurs confusions et amalgames, répandus dans le grand public ainsi qu’auprès des pouvoirs publics :

– confusion entre psychiatres, psychologues, et psychothérapeutes, alors qu’il s’agit de professions voisines mais différentes ;

– confusion entre psychanalyse et psychothérapie, alors que la psychanalyse n’est que l’une des méthodes de psychothérapie, parmi la douzaine répandue en France et en Europe ; la psychanalyse est enseignée dans des instituts privés – comme les autres psychothérapies, dont la formation a été directement inspirée de celle des psychanalystes ;

– amalgame entre les psychothérapeutes professionnels certifiés (après des études à un niveau bac + 5 à bac +8) et les « soi-disant « psychothérapeutes » autoproclamés, avec une formation très insuffisante ou pratiquant des méthodes fantaisistes ;

• Les chiffres avances par Georges Fenech, président de la Miviludes ou Bernard Accoyer, président de l’Assemblée nationale, ne reposent apparemment sur aucune étude et sont le fruit d’exagérations spectaculaires, destinées à effrayer la population. Les études nationales sérieuses effectuées par deux instituts de sondage indépendants (BVA et CSA), en 2001 et en 2006, auprès d’échantillons représentatifs de la population française adulte (8 000 et 6 000 personnes) révèlent que 8 % de la population suit ou a suivi une psychothérapie ou une psychanalyse, soit 4 millions de personnes – dont 1 million sont en cours de thérapie… et non 12 millions ! Le nombre de charlatans sans formation sérieuse est estimé à quelques milliers et non à 2 millions, et les victimes se comptent en milliers et non en millions ! L’exagération est donc de… mille fois ! Notre Fédération lutte depuis sa création contre les tentatives d’infiltration de certains mouvements sectaires.

• En Europe, on compte 150 000 psychothérapeutes professionnels certifiés dans une trentaine de pays. Les lois diffèrent d’un pays à l’autre. L’accès à la formation est ouvert à différents professionnels de niveau bac + 3 (travailleurs sociaux, enseignants, sociologues, philosophes, etc.) dans plusieurs pays comme l’Autriche, la Finlande, la Grande-Bretagne, etc.

• Si on appliquait cette loi à la lettre, l’État serait responsable de plusieurs milliers de chômeurs supplémentaires, auprès de professionnels formés à un niveau bac + 5 à bac + 8 !

• Comment appliquer cette loi… dans trois semaines alors que les arrêtés permettant son application ne sont pas encore parus, que les jurys régionaux ne sont pas nommés, et que les lieux de stages pratiquant effectivement la psychothérapie au quotidien sont notoirement insuffisants ?

S. Ginger, secrétaire général de la FF2P