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19 décembre 2012

En France les innocents vont en prison Gilles Olivier Silvagni

Une exemplaire affaire.


Gilles Olivier Silvagni

En France, les innocents vont en prison

18 décembre 2012

par Silvagni

En l’espace de quelques jours, deux condamnations viennent éclairer avec cruauté l’ampleur des dégâts causés par le sarkozysme en matière de santé et de libertés individuelles. vendredi dernier les presse titrait, sans susciter aucun commentaire notable:

« Un schizophrène condamné à seize ans de prison »

Pourtant, l’énoncé de ce titre en lui-même insupportable aurait été impensable il y a encore quelques années.

Avant Sarkozy, il ne serait venu à l’idée de personne, aussi réactionnaire ou archaïque qu’on puisse l’être, de soutenir dans la même phrase qu’un fou est condamné à de la prison. Un fou, donc un malade mental, depuis l’instauration du Code Pénal, est par définition un irresponsable.

En bon français, peut-être un peu teinté de la sagesse et de l’accent Provençal, le synonyme de « fou » c’est « ravi » ou mieux encore: on disait « l’innocent », et même, avec une majuscule verbale: l’Innocent. Entendez, le nôtre, celui du village: laissez-le, il n’y peut rien, c’est un innocent. On dit encore aujourd’hui, un ravi, un fada. Il ne sait pas ce qu’il fait et il est inutile de lui en vouloir, qui ne comprend pas cela?

On se consolera mal à la veille de Noël, en remarquant que les crèches provençales placeront quand même, comme depuis des siècles, à côté du bœuf de l’âne et des rois mages, « lou ravi », extatique, qui est un « innocent », oui, au cœur de la foi naïve et pure des enfants à la veillée qui peuvent encore croire que sont » bienheureux les simples d’esprit ».

Faut-il ajouter désormais qu’étant un innocent, il est inutile mais surtout honteux de punir un fou?

En vain depuis Sarkozy, dans notre pays. Les Baumettes ne sont pas les seuls lieux de Justice où l’air qu’on respire est putride: tout est à rebâtir de fond en comble…

Un autre titre, aujourd’hui même, se détache sur fond de l’incroyable dérapage liberticide sarkozyste en matière de Justice, que la nouvelle majorité semble incapable d’interrompre:

« Marseille : la psychiatre d’un patient meurtrier condamnée à un an de prison avec sursis »

Nous y voila: puisque le fou est devenu responsable de ses actes, ceux qui sont le mieux placés pour le savoir sont évidemment les psychiatres. Et par conséquent, en laissant un fou libre de circuler, les psychiatres se rendraient responsables des actes de folie commis par les patients qu’ils suivent! Admirons l’ enchaînement paralogique que nous valent les salauds et les imbéciles qui se sont disputés la palme ces dix dernières années…

Dans l’émission « Conduite accompagnée » diffusé ce samedi soir, le philosophe Christian Godin et moi n’avons pu que constater les dégâts et la perte de repères qui suivent la disgrâce actuelle de la psychanalyse. Celle-ci demeure pourtant le seul corps de doctrine reposant tout entier sur la défense du Sujet… En perdant la psychanalyse, c’est précisément le Sujet, réifié, objet de traitements, objet de soins, déposé en consigne à son propre domicile et objet de surveillance, qui est perdu de vue par la psychiatrie. En se résignant au tristement standardisé manuel de traitement du DSM IV puis V de la psychiatrie militaire étatsunienne, c’est leur clinique que les psychiatres ont laissé à l’abandon. En acceptant de s’adjoindre à un juge, la psychiatrie s’est subordonnée à la Justice, dont ce n’est ni la compétence ni la vocation institutionnelle. Et les psychiatres ont désormais la démonstration qu’ils sont tenus responsables des patients qu’ils ont abandonné à domicile…

Il est de notoriété publique que nombre de malades mentaux sont incarcérés dans les prisons françaises, où il est impossible de les soigner. Ils y sont en danger, pour eux-mêmes comme pour les autres détenus.

Les prisons françaises, plus que jamais, frappent la France d’une marque d’infamie. En y enfermant les malades mentaux, c’est toute la Justice française qui se déshonore, et ce sont les fondements mêmes des valeurs du pays des Droits de l’Homme qui sont bafouées à la face du monde.

On attend avec une inquiétude chaque jour grandissante l’annonce trop longtemps différée par ce gouvernement et au premier titre par Madame Taubira, de l’annulation de ces lois sarkozystes, iniques et scandaleuses, et d’un retour à une législation enfin digne de la République Française.


19/12/2012, 05:04 par jolemanique

Votre billet manque un brin de probité intellectuelle…certainement biaisée par la solidarite corporatiste avec la psychiatre condamnée en justice pour son deni opposé a la dangerosite connue de son patient diagnostiquée par 8 de ses confreres.

Rappel des faits : ‘Depuis février 2000, tous les spécialistes qui examinent le patient concluent qu’il est atteint d’une forme de schizophrénie paranoïde et d’un déni complet de son état, qui font de lui l’un de ces rares malades mentaux extrêmement dangereux pour leur entourage (le plus souvent, ils sont victimes d’humiliations et de mauvais traitements). Tous, sauf le Dr Danièle Canarelli, 57 ans. Il ne cesse de donner raison aux praticiens qui le disent délirant, multipliant les agressions d’une violence préoccupante (incendie, agression, tentative d assassinat) et les «non-lieux psychiatriques» (article 122-1 du Code pénal) en raison de son irresponsabilité manifeste.

N’étant «pas accessible à la sanction pénale», l’intéressé est dirigé vers un établissement médical, notamment l’hôpital Édouard-Toulouse de Marseille où officie le Dr Canarelli. Une première fois, en février 2000, ce médecin obtient la levée de l’hospitalisation d’office (HO) estimant qu’il ne «présente aucun élément de dangerosité psychiatrique» grâce au traitement.

Quatre internements

Problème: le sujet cesse de prendre ses médicaments et récidive, en janvier 2001. Retour à Édouard-Toulouse, où le Dr Canarelli demande rapidement la levée de la mesure de HO. Il y aura quatre internements semblables entre 2000 et le crime de 2004.

Peu avant celui-ci, le patient est reçu par le Dr Canarelli. Lorsque le médecin indique à son interlocuteur qu’elle envisage de l’hospitaliser, l’individu se lève et s’en va. Ce n’est qu’au bout de plusieurs heures que sa fugue est signalée à la police. Le 26 février 2004, il tente une première fois d’agresser sa victime, qu’il soupçonne, dans son délire, de vouloir détourner l’héritage de son grand-père. Le 9 mars, il le tue.

Un expert judiciaire, le Dr Archambault, note que huit psychiatres ont diagnostiqué sa maladie et s’étonne de l’attitude du Dr Canarelli: «Il y a eu en quelque sorte un enfermement dans le déni, le déni du patient ayant entraîné un déni de l’équipe soignante et surtout du Dr Canarelli», écrit l’expert dans son rapport, laissant entendre que, contrairement à ce qu’elle soutient, sa collègue ne considérait pas son patient comme un malade mental et, par conséquent, n’a pas mis en œuvre les mesures adéquates.

La juge d’instruction renvoie la psychiatre en correctionnelle par le biais d’une ordonnance sévère. Elle relève, notamment, que quand son patient s’enfuit de l’hôpital, le Dr Canarelli demande que sa famille soit prévenue d’un «risque de passage à l’acte» : «Cette démarche établit à elle seule que le médecin avait parfaitement conscience de la dangerosité de son patient», déduit le magistrat.’

La justice ne sanctionne nullement l innocent..mais le manque de discernement de la psychiatre dans la prise en charge de ce patient atteint de psychose paranoide severe.

D »ailleurs, dans les attendus du jugement, il est clair qu’on n’a pas condamné la psychiatre pour sa pratique soignante, et qu’aucune jurisprudence de ce type n’est possible.

Ce qu’on lui reproche, comme vous le faites remarquer, c’est de n’avoir pas pris des mesures alors qu’elle savait qu’il était manifestement dangereux. Son rôle était de protéger les citoyens, en l’occurence quelqu’un qui avait été désigné déjà comme cible par le malade. Et elle a failli à cette mission précise, on ne lui reproche rien d’autre.

Je comprends bien que pour les psys, ce jugement soit la cerise sur le gâteau, vues les obsessions actuelles et les attaques contre la psychanalyse. Mais cela concerne une des vocations de la psychiatrie, mais en constitue une seule petite partie, qui est la sécurité publique. Une minorité de personnes atteintes de maladie mentale sont dangereux, et il est nécessaire de les prendre correctement en charge.

Mais d’après moi, et plus généralement, c’est un gigantesque boulot qui doit être fait sur la sécurité, la Justice, la psychiatrie de rétention, les prisons, mais tout ensemble, et pas en les opposant les uns les autres. Il faudrait tout refondre, et séparer les délinquants less uns des autres en fonction de leur état mental, fournir des fonds à la psychiatrie pour se réorganiser, y compris les trouver dans ses propres finances car elle n’en manque pas pour les réattribuer. Et il faudrait le faire en ayant bien défini les problèmes.

En bref, au lieu de faire du chiffre, se barder de préjugés ineptes pour prendre des décisions idéologiques, et que la réalité se passe à la va comme je te pousse, il faudrait de réelles décisions politiques, et une réflexion globale en profondeur.

Mais par les temps qui courent, c’est peut-être trop demander. Mais Taubira est efficace, elle y parviendra si les petits cochons ne la mangent pas. Elle fera le maximum.