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27 novembre 2008

États généraux de SAUVONS LA CLINIQUE Philippe Grauer

Philippe Grauer

Appel à participer aux États Généraux « Sauvons la clinique »

Cet article et l’appel qu’il présente vient du site du SNPPsy. L’internaute curieux de notre profession y constatera qu’elle n’existe que paradigmatiquement aux autres côtés du Carré psy, avec lesquels elle entretient des relations complexes.

Il constera également que ces professions font de la politique, procèdent de la réalité politique et des problèmes de société du moment. Elles se trouvent engagées dans des combats idéologiques et des enjeux de civilisation. C’est aussi ce qui fait leur charme.


Le SNPPsy de longue date soutient le mouvement des Sauvons la clinique, dont il est signataire de la pétition. La clinique, fille de « l’unité de la psychologie » du docteur Lagache, ayant relayé une idée de Pierre Janet, c’est la pratique des psychologues cliniciens en milieu hospitalier, celle qui nous est interdite depuis la création du titre de psychologue.

À cette occasion, à la fin des années 80, l’institution de la psychologie a refusé par des méthodes scandaleuses et d’ailleurs illégales l’homologation des psychothérapeutes au titre de psychologue, souhaitée alors par le ministre Claude Évin. Il s’agissait de nous, à l’époque. Nous ne nous dénommions pas encore psychothérapeutes relationnels, nous venions d’institutionnaliser ce que nous nommions fièrement La psychothérapie, et appartenions à l’ANOP, association nationale des organismes de psychologie. Pas étonnant, nous étions issus de la psychologie humaniste.

À l’issue de la Déclaration de Strasbourg (1996) les psychologues ont rompu avec nous, nous indiquant le chemin qui nous restait à parcourir, seuls, celui de notre autonomisation disciplinaire et institutionnelle, celui de quatrième côté du Carré psy que nous étions en train de constituer en nous ajoutant au triangle précédemment agencé comme suit : psychiatrie, psychologie, psychanalyse.

Bref, la psychologie clinique c’est un mixte de psychologie objectiviste et de pratique relationnelle donc subjectiviste, d’inspiration psychanalytique, une discipline intégrative en quelque sorte, enseignée à l’université, qui souvenons-nous dispense à l’occasion — de moins en moins c’est là le problème — des cours de psychanalyse mais ne la transmet jamais. Sa mitoyenneté disciplinaire avec la psychopathologie rend parfois confuse la frontière entre ce qui représente à nos yeux un quart de la formation d’un psychothérapeute relationnel, et la quasi entièreté programmatique de ce qu’on se propose d’exiger du futur psychothérapeute générique actuellement en gestation, confondant psychopathologue et néo psychothérapeute.

C’est face à une attaque frontale contre la psychanalyse à l’université, créant une situation où cette discipline se voit en grand danger d’élimination par tous les moyens de tous les postes possibles, au bénéfice des comportementalistes, neuropsys, statisticologues et autres idéologues d’un scientisme gestionnaire à vous couper le souffle, que nous soutenons le combat de nos collègues et de leurs professeurs pour une pratique du procès de subjectivation, pour la démarche humaniste, face à la déshumanisation du Chiffre-roi, dont nous sommes ensemble porteurs et responsables.

Nous ne vaincrons qu’ensemble. Le mouvement de résistance au gestionnarisme assisté par TCC est puissant mais encore fragmenté. Aux États-Unis récemment on a vu comment un nouveau leader tenant un discours humaniste a pu fédérer les énergies face à l’angoisse devant l’avancée inquiétante de la déshumanisation de la société et propulser l’espérance. Nous procédons, psychanalystes et praticiens de la psychothérapie relationnelle ensemble, de ce principe d’espérance. Nous appartenons à ce mouvement de résistance des sujets venant auprès de nous chercher les moyens, dans la relation et en tenant compte du transfert, de donner sens à leur existence.

Ensemble nous refusons de substituer la notion de trouble à celle de symptôme. Porteurs des mêmes valeurs, relevant de la même épistémologie de la recherche de soi, nous avons tout avantage à coordonner nos luttes. Nous aurons à cœur de continuer d’appuyer l’action des Sauvons la clinique et de contribuer à la résistance puis à la victoire à venir.

Philippe Grauer


Le présent appel a été décidé par la réunion qui a eu lieu le 10 octobre 2008 à l‘Assemblée Nationale [1]. Il s’adresse aux signataires des deux pétitions de « Sauvons la clinique » et leur demande de le relayer le plus largement possible.

Avec les pétitions du 23 mai 2007 (12500 signataires) et du 5 juillet 2008 (15500 signataires), les réunions et les assemblées générales que nous avons tenues, nous ont permis de partager les analyses de la situation actuelle et de mieux définir les buts du mouvement en cours. En même temps, l’actualité n’a cessé de confirmer les craintes qui ont été à l’origine de « Sauvons la clinique » et de la nécessité d’une réponse collective à la hauteur des menaces qui se précisent jour après jour. Il est clair aujourd’hui, que nous assistons à une convergence des forces du néolibéralisme, du scientisme et de l’utilitarisme pour imposer une vision réductrice de l’humain dont nous constatons les applications dans plusieurs domaines : l’éducation, la recherche, le soin, les libertés, etc.

La démarche clinique est en ligne de mire à travers des textes législatifs et administratifs, à travers des dispositifs d’évaluation quantitative, homogénéisante, car ce que nous appelons « clinique » correspond à une conception du soin que la communauté humaine doit au sujet souffrant, ce qui engage une politique et un choix de civilisation. Ce choix est antinomique de la logique de la performance économique et de ses artifices déréalisant qui destinent la société à une débâcle comparable à celle de la sphère financière. C’est pourquoi, notre intérêt pour la clinique n’est pas dissociable des intérêts de la cité.

Sur la base d’une solidarité du clinique et du politique, nous appelons à la plus large participation possible à la préparation des Etats généraux, à l’horizon fin 2009-début 2010. A cette étape, la mobilisation passe par :

La création de comités locaux « Sauvons la clinique » à l’échelle institutionnelle, départementale, régionale, inter associative, etc. L’initiative est ouverte à tous, à titre individuel ou collectif. Il revient à chaque comité de décider de la forme à donner à son action et à sa contribution. Indiquons néanmoins quelques tâches possibles :

– État des lieux faisant ressortir à la fois les difficultés, les menaces, les atteintes à l’activité clinique, et en même temps les expériences de refus de se soumettre, d’inventivités pratiques, théoriques et institutionnelles.

– Élaborations théoriques individuelles ou collectives autour des grands axes suivants :

1) Qu’appelle-t-on clinique ?

2) La formation

3) L’évaluation

4) la recherche

5) Clinique et lien social

– Contact et sensibilisation des acteurs politiques et associatifs susceptibles d’apporter leur appui moral, logistique ou financier au mouvement « Sauvons la clinique ».

Il est important d’informer le responsable du site de la création du comité local, de lui communiquer toutes les coordonnées utiles pour être identifié. C’est à lui qu’il faut adresser également les contributions qui seront publiées sur le site : https://cifpr.fr/contact@sauvons-la-clinique.org

[1] Cf. compte rendu des travaux sur le site.