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28 janvier 2011

Hélène Chaigneau psychiatre exemplaire Hélène Chaigneau

Hélène Chaigneau

Auteur : Hélène Chaigneau

Date de saisie : 12/01/2011

Genre : Psychiatrie

Editeur : Campagne première, Paris, France

Prix : 22.00 € / 144.31 F

ISBN : 9782915789652

GENCOD : 9782915789652

Sorti le : 19/01/2011


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«Si loin que j’évoque les sources manifestes de ma vocation médicale, je me souviens d’avoir été témoin de l’angoisse de ma mère, et d’avoir formé le voeu d’être médecin pour l’en guérir

Cet impossible projet augure la vie que le Dr Hélène Chaigneau (1919-2010) a consacrée à la clinique. Elle n’aura cessé de manifester sa considération et son souci de l’autre, le plus proche et le plus lointain, le sujet schizophrène, en tentant de remédier à sa souffrance psychique.

Figure majeure de la psychothérapie institutionnelle, Hélène Chaigneau demande à l’hôpital psychiatrique public d’assumer son rôle décisif d’asile et de soins, à une époque où le mouvement de l’antipsychiatrie le voue aux gémonies. Sa culture des théories psychiatriques affûte son enseignement, tandis que sa formation psychanalytique lui permet une écoute des patients sans a priori dogmatiques. Son enseignement, essentiellement oral, passe par un dialogue fécond avec ses élèves, ses collègues, ses patients. Elle a ainsi formé plusieurs générations de psychiatres et de soignants.

Hélène Chaigneau a pu suivre l’élaboration du présent livre sans en voir la publication. Il se compose de plusieurs textes qui rendent compte de la clinique institutionnelle des psychoses, suivis d’un long entretien où elle témoigne de sa pensée, du traitement spécifique des sujets schizophrènes, des dits et non-dits à l’hôpital, dans un constant rapport à l’éthique.

Cet ouvrage, coordonné par Joséphine Nohra-Puel et le Dr Jean-François Solal, comprend une bibliographie complète d’Hélène Chaigneau, ainsi que sa biographie établie par le Dr Jean Garrabé.


Un bref extrait :

Prise en charge institutionnelle des sujets réputés schizophrènes

«Les fous sont des gens raisonnables, c’est-à-dire pas viciés.»

Il n’y a pas de différence entre la question que pose la folie dans un collectif dit psychiatrique et celle que pose la folie dans la société en général. C’est exactement la même question, chargée de la même angoisse. En réponse à cette question, la tendance naturelle du collectif psychiatrique est de s’équiper techniquement contre cette angoisse. La schizophrénie-maladie s’insère dans cet appareil de technicité. Elle a sa place dans nos manuels de psychiatrie. Elle y est nantie de ses symptômes cardinaux, de son historique, de ses formes cliniques, évolution, traitement, en un mot de tout ce que doit avoir une «maladie» digne de ce nom. Il lui resterait, si nous en acceptions le pari, à trouver sa place dans une nosographie nouvelle, dite «institutionnelle», et ce serait finalement la même, puisque nosographique : celle d’une «maladie».

La découverte freudienne a dramatiquement bouleversé la description catégorielle à laquelle nous soumettions, selon une tradition séculaire, le problème de l’homme souffrant, qui, dans cette tradition, trouvait sa place de «malade». Non que Freud ait renoncé à «classer» ou à essayer de le faire. Rompu à la discipline médicale, mieux encore à l’anatomie-physiologie et à la neurologie, comment l’aurait-il pu ? Mais il a refusé d’être dupe de cette rassurante attitude. Ainsi, toute sa vie, rédigeant jour après jour ses découvertes d’homme clinicien, il n’a pas cru, chaque fois qu’apparaissait une contradiction dans le déroulement historique de sa pensée, devoir la sacrifier à une illusoire clarté. L’erreur des psychiatres lui avait d’ailleurs si peu échappé qu’il écrivait : «Dans le cadre même de la médecine, la psychiatrie, il est vrai, s’occupe à décrire les troubles psychiques qu’elle observe et à les réunir en tableaux cliniques, mais dans leurs bons moments les psychiatres se demandent eux-mêmes si leurs arrangements purement descriptifs méritent le nom de science.» En foi de quoi je me contenterais volontiers, pour ma part, de tenir pour «psychiatre institutionnel» – ou psychiatre tout court ! – celui qui posséderait l’aptitude d’avoir et de multiplier de tels bons moments.

On peut mener toute une vie psychotique sans être hospitalisé, soigné, ou diagnostiqué. Mais il est bien rare, sauf peut-être encore dans des milieux sociologiques très fermés qui légifèrent en vase clos, qu’un sujet aperçu en tant que schizophrène passe dès lors toute sa vie sans être reçu dans un établissement de cure. La plupart du temps, il s’avère impossible de soigner de tels sujets sans faire appel, au moins pendant un certain temps, à un milieu protégé.

«Schizophrène», le sujet franchit donc un seuil important. Il entre dans le monde armé contre la folie, il y est «admis» comme «malade». Il «présente» ses symptômes. On a bien vite dit que la société rejette les malades mentaux. À ne pas voir qu’elle les «consacre», on risque de ne jamais rien comprendre aux problèmes que nous pose la psychose.