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3 août 2008

Les psychiatres prennent position à leur tour contre l’Arrêté scélérat Présentation par Philippe Grauer

Présentation par Philippe Grauer

Nous l’annoncions hier, prenez connaissance de ce nouveau texte émanant de la quasi totalité des organismes de psychiatres.

À leur tour ils élèvent solennellement la voix contre l’Arrêté scélérat. Ils avertissent que le catalogue interministériel d’une « formation » bric-à-brac de 400 heures serait dérisoire et dangereuse, et dénoncent un « projet délibéré » de mise en place non plus d’un titre mais de ce qu’on pourrait appeler sous-titre de « psychothérapeute low cost ».

Bien entendu les psychiatres parlent du titre générique de psychothérapeute, et ne prennent pas en compte l’existence des écoles de formation à la psychothérapie relationnelle dont certaines alignent un programme rigoureux de 2000 heures sur cinq années au moins, s’appuyant sur une psychothérapie ou psychanalyse personnelle conséquente, là n’est point leur propos.

Que les choses soient claires, notre psychothérapie relationnelle pas davantage que la psychanalyse ne représente un traitement (santé mentale, hygiénisme), encore moins une sous traitance. Malaise existentiel, mal être n’est pas maladie. On peut cumuler, raison de plus pour ne pas tout confondre, guérison et quête de soi, de sens et d’une vie à tenter bonne.

Correlativement nous n’aspirons pas au remboursement des soins puisque le soin pris de soi, prise en charge de soi et de sa difficulté de vivre n’est pas soin sécu, prise en charge par la collectivité solidaire. Les psychanalyses remboursées par des psychiatres psychanalystes (cumul, voir notre Carré psy) qui délivrent des feuilles comme on dit, insinuent la maladie comme institution au corps du malaise, à moins qu’elles ne compensent à l’occasion quelque chose du malaise social, il n’est pas toujours facile de s’en tirer. Tout cela tient à l’à peu près des choses humaines, et ça n’est pas plus mal comme ça.

Le souci se retrouve chez les psychothérapeutes relationnels et les psychanalystes non médecins, avec cette différence qu’il leur arrive tout simplement de compenser de leur propre chef, comment faire autrement en restant humain ? il y faut du discernement et beaucoup de professionnalisme. Nous aborderons cette question ailleurs.

Contentons-nous d’indiquer ici que nous n’administrons pas de traitements, que l’adage qui tient le diagnostic tient le traitement relève de la médecine, et que nous en différons précisément en constituant l’alternative paradigmatique d’une profession de soin — il faudrait dire de souci, non médicale.

Ce qui importe présentement, c’est que le mouvement d’opposition à l’Arrêté atteigne la quasi unanimité des professionnels du psychisme. La résistance et l’opposition à ce texte prend de la vigueur.

À propos, un numéro spécial du Nouvel Âne sur le thème Arrêtons-les ! sort bientôt. Septembre s’annonce bien.

Philippe Grauer


Communiqué :

Position
de la majorité des organisations
représentatives des psychiatres,
sur
les projets de textes concernant l’usage du titre de
psychothérapeute

Les psychiatres soussignés, représentant des syndicats, des associations ainsi que différentes instances concernées par la formation et la qualification dans leur discipline, souhaitent exprimer et justifier leur désaccord avec le projet « d’arrêté relatif au cahier des charges de la formation conduisant au titre de psychothérapeute ».

Leurs critiques portent sur les points suivants :

– La formation pratique — cinq mois de stage — est dérisoire, non seulement du fait de sa brièveté, mais également de l’absence de toute indication sur ses modalités pédagogiques : encadrement, supervisions, contrôles, prises de responsabilités…
L’indigence d’une telle formation pratique, au regard de la préparation clinique des futurs psychiatres (prévoyant huit semestres de stage en situation de responsabilité diagnostiques et thérapeutiques) est en contradiction avec l’esprit initial de la loi visant à interdire l’exercice de la psychothérapie à des personnes incompétentes et par là potentiellement dangereuses.

– Le « catalogue » des connaissances théoriques, déroulées en 400 heures par le projet d’arrêté, soucieux de respecter les apparences de l’exhaustivité et de la diversité des concepts, ne sauraient faire illusion. Le législateur serait mal inspiré de réduire la science de l’esprit et les courants de pensée qui traversent la psychopathologie à un tel bric-à-brac.
Il tromperait le public en laissant croire que l’usager informé par son « psychothérapeute » serait en mesure d’y faire un quelconque choix.
Les réalités du lien psychothérapique sont d’une toute autre complexité, que ce projet ignore totalement.

– La récupération sur le plan réglementaire de l’usage du titre de psychothérapeute à des fins de planification économique du soin psychique n’apparaît plus comme un risque, mais comme un projet délibéré.
Le « psychothérapeute » s’y inscrit comme le maillon d’un système de sous-traitance « low cost » de toute souffrance psychique. Dans un tel système, le psychiatre se verrait réserver le rôle d’expert, prescrivant au besoin des psychothérapies dont il n’aurait pas lui-même la pratique.

*********

Les médecins signataires, spécialistes en psychiatrie s’opposent fermement à l’idée de création d’un corps de psychothérapeutes dont la formation pratique serait purement symbolique, et les connaissances théoriques en matière de psychothérapie, du niveau d’une simple information.

Tout au long des multiples concertations qui ont pu avoir lieu à ce sujet, les mêmes psychiatres ont toujours soutenu la même position, à savoir que l’acte psychothérapique est indissociable d’une formation clinique et de connaissances théoriques approfondies de plusieurs années.
Ils ne voient pas en quoi le public pourrait « bénéficier » d’une déqualification de fait des psychothérapies assurées par les professionnels du soin psychique actuellement reconnus et formés en conséquence.

Il en résulterait alors qu’une loi prévue au départ pour réduire les risques d’exposition du public à l’action de « psychothérapeutes » non formés, aurait au contraire l’effet pervers d’instituer toutes les conditions trompeuses d’une formation insuffisante pour offrir une garantie de santé publique décente.

Professeur Michel PATRIS
Président de la Commission de qualification en psychiatrie
Du Conseil national de l’Ordre des médecins

Docteur Olivier LEHEMBRE
Président de la Fédération française de psychiatrie

Docteur Michel BOTBOL
Président de l’Association des sociétés françaises
Membres de l’Association mondiale de psychiatrie

Docteur Olivier BOITARD
Président du Comité d’action syndical de la psychiatrie

Professeur Thierry BOUGEROL
Président du Syndicat universitaire de psychiatrie

Professeur Jean-François ALLILAIRE
pour le Collège national universitaire de psychiatrie

Docteur Pierre FARAGGI
Président su Syndicat des psychiatres des hôpitaux

Docteur Nicole GARRET-GLOANEC
Présidente de la Société de l’information psychiatrique

Docteur Roger SALBREUX
Président du Syndicat des médecins psychiatres des Organismes publics,
semi-publics et privés

Docteur Olivier SCHMITT
Président du Syndicat national des psychiatres privés
et de l’Association française des psychiatres d’exercice privé

Docteur Jean-Pierre LABOUTIÈRE
Président d’honneur de l’Association française des psychiatres d’exercice privé

Professeur Bernard GIBELLO
Président de l’Association française de psychiatrie

Docteur Jena-Pierre CAPITAIN
Président du Syndicat des psychiatres français

Docteur François KAMMERER
Vice-Président de l’Association française de psychiatrie
Vice-Président du Syndicat des psychiatres français

25.07/2008