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4 avril 2007

L’Inserm : une méthodologie pour liquider l’autre dans la sienne Philippe Grauer

Philippe Grauer

L’interCoPsycho nous rappelle que L’Inserm organise le mercredi 30 mai un colloque intitulé Méthodologie de l’évaluation en psychiatrie et en santé mentale.

Le colloque initialement prévu devait porter sur l’évaluation des psychothérapies . L’ évaluation, autre mot-clé de l’idéologie scientiste, devant faire le pendant au trouble qui avait présidé à l’opération fichons les bébés. Trouble comme chacun sait, fait figure de mot-clé de voûte du DSM 4, outil classificateur dit "a-théorique" par lequel une certaine psychiatrie ayant fait ses adieux à la psychanalyse, vire au saucissonnage comportementaliste et médicamenteux d’un catalogue de symptômes dépourvu de sens auquel il ne manque provisoirement que le raton laveur pour les troubles compulsifs.

Nous prévoyions au moment de son annonce par J.-M. Damion, occupé à tenter de redresser l’image d’un Inserm enfoncé jusqu’au cou dans sa chasse aux bébés graines de délinquance, que l’affaire risquait de tourner court, à tout le moins de virer de bord. Nous savions l’Inserm peu enclin à organiser un débat scientifique ouvert autour de ce thème aux quatre protagonistes des professions du psychisme s’occupant de psychothérapie justifiant du pluriel employé dans l’annonce.

Eh bien voici que le concept de santé mentale — ah, quel concept commode, et quel troisième beau mot-clé pour verrouiller le malaise dans la maladie ! — a absorbé celui de psychothérapies. Médicalisons, c’est plus sûr. On réduit ainsi le champ et le nombre des partenaires du débat. De quatre on passe à un. Deux à la limite, puisque les psychologues de l’InterCoPsycho visiblement disparus du champ, se proposent d’insister de leur présence. Le triangle de la subjectivation, représentant la moitié du Carré psy qui conjoint méthodologiquement psychanalyse et psychothérapie relationnelle, est évacué. On est tout de même mieux entre soi pour ignorer l’autre.

"On se souvient, nous rappelle J-F Cottes, qu’au mois de novembre s’était tenu un colloque sur le "trouble des conduites" que l’Inserm avait dû organiser, à la demande du Ministère de la Santé, en intégrant des participants du collectif Pasde0deconduite. La démarche des expertises collectives, les recommandations de celle sur le "Trouble des conduites chez l’enfant et l’adolescent", l’utilisation de celle-ci avaient été fortement mises en cause, conduisant l’Inserm à changer de ton. La méconnaissance des acteurs de terrain, la mise à l’écart des praticiens avaient été sévèrement critiquées."

La méconnaissance, voilà un concept que nos savants épris d’évaluation ne sont pas prêts de mettre au menu de leurs grises recherches, à chacun la clé de ses mots. Nos chers terroriciens vont donc cogiter entre eux des arcanes du mesurage de la psychothérapie psychiatrique. Nous ne sommes plus concernés directement, l’intitulé du colloque ayant changé. Nous rappelons que nous n’avons rien contre le principe de l’évaluation, que comme tous les professionnels du psychisme nous pratiquons, celle-ci devant s’ajuster méthodologiquement à son objet. Ce qui reste impensable, c’est qu’un champ méthodologique prétende imposer aux autres ses instruments de mesure au prix du massacre annoncé de leur pratique et au mépris militant de leurs concepts, méthodes et éthique.

Fort heureusement, on peut mesurer ces derniers temps qu’en ce domaine de la coupe aux lèvres il peut se trouver une opportune distance de sécurité, tant que nous poursuivons sans faillir notre travail de résistance.