RechercherRecherche AgendaAgenda

Actualités

Revenir

22 octobre 2011

Michel Rotfus sur Médiapart Michel Rotfus

UN clan – faut-il dire une famille régnante ? se livre à une attaque en règle contre une autrice qui outrepasse tous les bons usages en publiant un Lacan envers et contre tout bien écrit, alerte, qui dit bien les choses et bien des choses, qui dit une part de l’Histoire, qui déplaît au clan. Jacques Lacan n’est chasse gardée de personne et s’il y en a qui n’aiment pas ce qu’écrivent les autres ça se discute mais pourquoi l’insulte prendrait-elle le relais de la dispute ?

Pourquoi ces prises à partie style années 30 ? Lacan méritait un peu mieux que ça.

Alors ça réplique sur Médiapart où apparaît un blog anti rogue. Nous vous en livrons ici des extraits. Comme cela fonctionne par sédimentation, nous présenterons les extraits en commençant par les plus récents.

PHG


Michel Rotfus

Miller toqué du pape et de Julia Kristeva

04 Novembre 2011

Par Michel Rotfus

On s’amuse beaucoup ces temps-ci dans la tribu Miller sans trop se préoccuper de l’état de catastrophe dans laquelle se trouve l’Europe.

Chez les Miller, on joue à habemus papam. Comme la tribu n’a jamais supporté les relations de papa Lacan avec le pape – il voulait le rencontrer et il avait demandé à son frère de servir d’intermédiaire – les Miller, épouse, fils, fille, gendre, adeptes ont envoyé au cimetière où est enterré le vieux à Guitrancourt toute leur secte. Et les toqués de Miller ont défilé des heures devant la tombe, très contents comme ils le disent de vérifier que celle-ci n’était pas surmontée d’un crucifix. Oh bonheur ! Pas de sépulture pour Lacan-papam antéchrist.

Et puis patatrac ! Voilà que la tribu se met à adorer le pape. Ils aiment papam, ils adorent papam, ils sont toqués de papam au point qu’ils font de la publicité pour leur grande, chère et belle Julia Kristeva qui pourtant n’est pas très lacanienne : elle l’a dit des dizaines de fois. Elle n’aime pas les séances toquées à la va vite. Mais, oh grand honneur, elle a rencontré le Pape. Et oui! Elle était à Assise chez Saint François, le 27 octobre dernier, avec une écharpe sur l’épaule digne d’un évêque : Sollers devait se cacher dessous, on le voit avec son whisky gigoter tel un démon. Sur la photo, très sulpicienne (Da Vinci code est passé par là), on la voit entourée de moines encapuchonnés façon Zurbaran pour prononcer son grand discours en dix points sur l’humanisme au XXIe siècle.

Et du coup les Miller ont changé d’église : plus de haine des crucifix plus d’Antéchrist ni de Lacan sans dieu ni religion : vive la puissance papale ! Et je ne résiste pas au plaisir de citer un extrait du discours papal de Julia Kristeva, rendant hommage à Benoît XVI. Point de Lacan (prudente la Julia) mais du Rousseau, du Freud, du Voltaire, du Sade (diantre ! Sollers gigote sous l’écharpe) et du Coran et de la Bible en pagaille avec en plus Bouddha et le Tao. Elle aime toutes les églises la belle Julia. Elle en appelle aux “codes moraux immémoriaux”. Tout le monde est beau et gentil dans l’univers kristevien.

Voilà : « Mais le Babel des langages génère aussi chaos et désordres, que l’humanisme ne régulera jamais par la seule écoute attentive prêtée aux langages des autres. Le moment est venu de reprendre les codes moraux immémoriaux : sans les affaiblir, pour les problématiser, en les à rénovant au regard des nouvelles singularités. Loin d’être de purs archaïsmes, les interdits et les limites sont des garde-fous qu’on ne saurait ignorer sans supprimer la mémoire qui constitue le pacte des humains entre eux et avec la planète, les planètes. L’histoire n’est pas du passé : la Bible, les Évangiles, le Coran, le Rigveda, le Tao nous habitent au présent. Il est utopique de créer de nouveaux mythes collectifs, il ne suffit pas non plus d’interpréter les anciens. Il nous revient de les réécrire, repenser, revivre : dans les langages de la modernité. »

Habemus Kristevam, habemus Millerium, papam, papam.

Je crois qu’en ces jours des morts, je vais aller fleurir la tombe du divin Lacan à Guitrancourt et j’ajouterai un beau crucifix acheté place Saint Sulpice en souvenir de Da Vinci Code : Lacan les adorait comme les mystiques et les Jésuites. Le pauvre, lui il n’a jamais pu rencontrer le pape, il faudrait intervenir auprès de papam pour qu’il ait enfin sa vraie demeure chrétienne : en latin s’il vous plaît.


Miller Jacques-Alain, toqué de Pierre Macherey

23 octobre 2011

N’en déplaise à ceux qui pensent à tort que j’utilise les mêmes méthodes que la famille Miller, je suis tout de même effaré de l’entreprise policière qu’elle met en œuvre, cette famille, pour affirmer que seule doit prévaloir sa lecture de Lacan.

Tout est donc maintenant suspecté de déviation, d’incorrection politique et de malveillance. N’importe quel discours philosophique, historique, théorique est brocardé au nom de la “bonne ligne”, façon Corée du Nord. Voilà donc ce que JAM, sa tribu et ses clones appellent l’opinion éclairée : procès de Moscou, persécution, délire, dénonciation. On a froid dans le dos. Et voilà qu’il s’en prend au dernier livre de Pierre Macherey. Toqué, toqué ce Miller.

Je me souviens de Pierre Macherey, ce professeur qui nous a tant apporté. La rigueur et la richesse de son enseignement étaient égales à son côté bougon. Je me souviens de ses bretelles et de ses chemises à carreaux, salle Cavaillès à la Sorbonne.

Il vient de publier un excellent ouvrage, La parole universitaire, La Fabrique. Plutôt que de faire des remontrances aux professeurs ou aux ministres, il examine soigneusement les discours tenus par les penseurs sur l’Université : Rabelais, Kant, Hegel, Hermann Hesse, etc… Au passage, je me souviens que Roudinesco était aussi salle Cavaillès, dix ans après moi : elle cite beaucoup Macherey dans ses livres (c’est sans doute la raison de l’ire millérienne).

Voilà donc que Macherey a eu le culot de consacrer un chapitre de ce beau livre, son dernier, à Lacan. Péché, péché : les harpies sont en émoi. Il a osé dire que le bon docteur n’est pas une idole que l’on doit vénérer chaque jour à travers son guide suprême. Il montre, en étudiant le séminaire L’envers de la psychanalyse, les contradictions de Lacan à l’égard du discours universitaire : mépris, fascination, retournements, instrumentalisation. Lacan n’était pas simple, tout le monde le sait et plutôt que de raconter des sornettes sur les feux rouges brûlés comme le dit JAM, en se prenant pour un nouveau Plutarque, Pierre Macherey montre, – comme il a été le premier à le dire depuis trente ans –, que Lacan doit plus à Kojève qu’à Hegel. Il dit aussi que Lacan ne croyait pas aux illusions de la révolution et qu’il craignait de voir son enseignement devenir très universitaire, mais que, en voulant dégonfler les idéaux de l’Université réelle, il n’a fait qu’en reconstruire ses formes et les enjeux allant même jusqu’à rêver d’une Université idéale.

Lacan était un sac à malices, un Socrate qui envoyait des boulets de canon : vraiment je préfère ce Lacan là, celui de Macherey, insulté par les Miller, à tout le fatras sectaire que cette famille cherche à nous imposer. Quelle liberté de ton, quelle intelligence chez Macherey. Lisez vite ce livre décapant qui sans apporter de solution à la crise de l’Université contemporaine, décrit sa complexité : son envers, son endroit, ses méandres.


Miller Jacques-Alain insulte François Hollande

20 octobre

Décidément la tribu Miller s’en donne à cœur joie ces temps ci. Insultes, calomnies, campagnes de diffamation contre tout le monde, délire de persécution. Et maintenant la tribu et son chef New Age-born Again, se sont entichés de politique. Le chef toqué tient une chronique (Le Point, 20 octobre) : il déteste la gauche depuis toujours. Le voilà qui traite François Hollande de “relooké imperator” et qui nous explique, tel Monsieur Homais dans son officine à poisons, que la France veut être gouvernée au centre. Quelle découverte! Monlacan par-ci, monlacan par là, ode à monlacan chéri, je t’aime, je t’aime Lacan chéri. Il a tout expliqué monlacan, il a tout dit, il sait, grâce à son petit Miller bien grassouillet que Hollande est un monstre : “Une mue, une métamorphose à la Kafka, le lifting de tout le corps fade et flou…”. Je vous assure, c’est écrit comme ça, dans ce style années trente. Quelle vulgarité tout de même. Pauvre Hollande transformé en gros cafard par un psy timbré.


Miller toqué de Carla, de Rosanvallon et des autres

16 octobre

Dans ses publications insultantes contre le monde entier, Miller se désigne comme l’incarnation vivante de Lacan – born again? Diantre! Nous voilà dans le New Age! On comprend que son vieil ami Partrick Valas l’ait représenté sur son site avec un entonoir sur la tête. Il est vraiment toqué le pôvre. Et du coup, il a fait son université populaire pour se célébrer lui-même en Dieu vivant réincarné. Et il s’est déclaré le Coach de Carla Bruni : Carla, Carla où es-tu, j’ai déjeuné avec toi, je veux encore et encore… C’est écrit, c’est archivé.

Mais le voilà maintenant toqué de Pierre Rosanvallon. Vieille histoire. Le Miller, avec famille et tribu, insulte toute la gauche – vieille affaire – lui reprochant d’adhérer à la politique du marché. Et vlan, un coup contre Mélenchon, un coup contre Obama, un coup contre les autres et vive Tapie et Berlusconi, il les aime, il le dit parce qu’il accuse le peuple de les aimer. Quel mépris pour le peuple!
Mais c’est quand même Rosanvallon dont il est le plus toqué, comme il le dit dans Le Point (29 septembre 2011, p. 72 : “Rosanvallon, lui, rêve à chaque rentrée de faire rêver. Ah qu’il serait beau nous dit-il de vivre dans une société “refondée”, où les égaux – gogos, go! – danseraient tous en rond sur le pont d’Avignon.”
Pourquoi tant de vulgarité? Pardi. Rosanvallon est un auteur du Seuil dont le dernier livre, La Société des égaux, est un best-seller. Quelle tristesse pour la psychanalyse!

Pour l’heure, je vais aller soutenir François Hollande qui n’est pas du tout toqué. Certes, nul n’est “normal” mais enfin on a envie d’un peu d’humour – et il en a – et d’un peu de sérieux au milieu de cette folie. Moi j’aime bien la gauche et je ne supporte pas qu’on l’insulte de façon imbécile…. Ou alors il faut avoir des arguments.


Miller toqué de Roudinesco

11 octobre

Je ne m’attendais pas pour cette rentrée, où la presse célèbre avec intelligence et dignité le trentenaire de la mort de Lacan (avec des conférences de Jean-Claude Milner, Alain Badiou et Élisabeth Roudinesco notamment), à voir surgir sous la plume collective d’une petite secte convaincue de détenir la seule lecture possible de l’œuvre de leur maître, des écrits dignes des pamphlets de l’entre-deux-guerres, façon Léon Daudet ou des imprécations staliniennes des années cinquante.

Tel est bien le style de Madame Nathalie Jaudel, illustre inconnue, qui écrit sous la dictée de son mentor-psychanalyste Jacques Alain Miller, le tout étant hébergé par le site, genre Corée du Nord, de la Règle du Jeu (par BHL alias Botul) :

Roudinesco plagiaire de soi-même. Diantre! Nouveau concept dit lacanien ? De quoi se tordre de rire si l’on ignorait que hélas des cinglés de cette espèce mènent des cures psychanalytiques à cinq minutes la durée de séance, cinq fois par semaine comme ils s’en vantent eux mêmes dans un film documentaire passé récemment à la télévision, réalisé sous la houlette de Gérard Miller, frère du précédent (on s’y perd). Un analyste allumé y explique que Lacan volait de l’argent dans la poche de ses patients. Et il trouve ça formidable, très lacanien, absolument génial.

C’est quoi un « plagiat de soi-même »? : on recopie ce qu’on a déjà écrit? Mais pas une ligne du livre de Roudinesco, Lacan envers et contre tout, n’est la copie de ce qu’elle a écrit. Un plagiat de soi-même? Un auteur reprend des conférences dans un ouvrage? Tout le monde le fait. Et c’est normal. Mais ce n’est pas le cas du livre de Roudinesco. Et quand elle souligne qu’elle reprend des arguments déjà avancés, elle ajoute une note en bas de page comme tous les auteurs sérieux.

Incapable d’achever la transcription des séminaires de son beau-père – Miller, Jacques-Alain, le frère de l’autre, en a fait 15 en 38 ans, il en reste 10 et il a 67 ans, jugez vous-même – et incapable d’écrire la moindre ligne qui ne soit pas insultante, le voilà parti en croisade maniaque contre Elisabeth Roudinesco, historienne de renommée mondiale, dont il est à l’évidence jaloux. Il ne l’aime pas, la belle affaire! Miller, amoureux même pas éconduit, Miller toqué de Roudinesco, la suivant à la trace depuis trente ans. Il peut courir longtemps.

Aveuglé par sa haine, il a ordonné à ses troupes, qui lui obéissent comme des robots, d’organiser chaque jour un déluge d’immondices. Tout le monde en prend pour son grade : Michel de Certeau, le grand historien, traité de sale curé antilacanien, Henri Ellenberger, autre grand historien insulté, Derrida voué aux gémonies (il avait l’habitude), d’autres encore. Badiou en prend plein la figure. La tribu n’aime ni l’histoire ni la philosophie, ni la littérature, elle n’aime rien que son gourou adoré, elle se vautre dans la calomnie.

Lors de la manifestation de l’ENS du 9 septembre pour le trentenaire de Lacan – comme me l’a raconté un ami philosophe qui se marrait bien – Miller, Jacques-Alain, est arrivé vers 23h45 entouré de sa petite famille (enfants, petits-enfants) et de sa secte, hurlant et vociférant, tapant sur des tables sous l’oeil médusé de ceux qui étaient là. Et l’ancien normalien, devenu dingue de Roudinesco, laquelle enseigne justement dans cette prestigieuse école, s’est fait huer par les jeunes élèves qui buvaient tranquillement un verre dans le jardin face au magnifique bassin.

Inutile de dire qu’on ne doit jamais répondre à de tels brulots – tendance jaudéliens-millériens – qui déshonorent ceux qui en sont les auteurs. Et Roudinesco l’a bien rappelé dans son entretien à Libération (1er octobre,Comment former des psychanalystes équilibrés?)

Donc pas question de commenter les sottises robotiques de la pauvre Jaudel, certainement éprise de son mentor, qui n’a pas lu une ligne des textes qu’elle prétend commenter, qui se trompe de sources, de références et de citations : pas une seule n’est conforme à la réalité. Repassez vos examens Madame pauvre Jaudel, vous insultez, vous calomniez et vous êtes illisible. Et en plus, vous traitez d’antisémite un brillant universitaire, Jeffrey Mehlman, traducteur de Roudinesco (justement, ça ne vous plait pas), de Vidal-Naquet et de Régis Debray. Et accusé d’être le complice en antisémitisme de Roudinesco. On n’y comprend plus rien.
Quelle somme de conneries!

Lacan a dit que la psychanalyse ne pouvait rien contre la connerie. Elle peut encore moins contre la connerie des psychanalystes qui se prennent pour ses seuls héritiers et qui calomnient tous ceux, psychanalystes ou non, qui ne pensent pas comme eux. Amusant spectacle! Mais très triste quand on pense aux vrais événements d’aujourd’hui. Cette bande d’insulteurs professionnels, qui se disent psychanalystes, défigurent le débat psychanalytique français…

A qui appartient l’avenir ?


Julien Green

J’ai toujours beaucoup aimé la psychanalyse et son histoire et je suis triste de voir qu’elle est défigurée par ceux qui pourtant devraient la défendre. Mais passons pour le moment.

Aujourd’hui, il me revient en mémoire, le beau journal de Julien Green, L’avenir n’est à personne (Fayard, 1993) dont le titre me rappelle d’ailleurs un autre texte, L’avenir dure longtemps de Louis Althusser qui est aussi un journal par certains côtés, un émouvant témoignage de la vie d’un homme, détesté lui aussi par des médiocres et des imbéciles.

Et voilà ce que je lis à la page 317 de ce journal de Green, datée du 8 novembre 1991 (vingt ans déjà!) et dans lequel il relate sa rencontre avec l’historienne venue l’interroger sur ses relations avec Gide, Stefan Zweig et la psychanalyse : “Hier, journée passée avec Élisabeth Roudinesco qui m’a paru plus belle encore qu’à l’ordinaire dans une grande robe blanche. Arrivée tôt, elle est restée une grande partie de l’après-midi.” Et encore : “Que son œil noir est beau et que l’intelligence y brille mystérieusement.”

On comprend à lire ces pages combien l’intelligence et la beauté peuvent rendre bêtes et jaloux ceux qui ne se nourrissent de la haine et du mépris des autres….