PASDE0DECONDUITE
COMMUNIQUÉ DE PRESSE DU 9 MAI 2006
Pasde0deconduite demande solennellement au gouvernement de renoncer à édicter, dans le projet de loi sur la prévention de la délinquance, une détection précoce de « troubles comportementaux » chez les enfants.
Le collectif des initiateurs de l’appel « Pas de zéro de conduite pour les enfants de trois ans » a demandé à être reçu par Monsieur de Villepin par courrier du 24 mars 2006, pour lui faire part de l’opposition, exprimée avec plus de 175 000 signataires de l’appel, à tout traitement essentiellement sécuritaire de problèmes psychologiques, éducatifs et sociaux, au moment même où le gouvernement annonce un plan de prévention de la délinquance.
Alors que le cabinet du premier ministre nous a contacté fin avril pour nous proposer une rencontre, plusieurs des initiateurs de l’appel viennent aussi d’être conviés par Monsieur Sarkozy, ministre de l’intérieur, à une entrevue.
À cette occasion, le collectif Pasde0deconduite réaffirme :
• qu’il est erroné sur le plan scientifique et dangereux sur le plan familial et social d’établir le moindre lien prédictif entre des difficultés psychiques de l’enfant et une évolution vers la délinquance ;
• que toute mesure législative qui serait fondée sur une telle corrélation abusive enfermerait les enfants en développement dans le carcan d’un regard prédictif catastrophique, porterait gravement préjudice au fonctionnement des relations familiales, et entraverait lourdement les actions de prévention ou de prise en charge des professionnels de santé ou de la petite enfance auprès des enfants et de leur parents ;
• que le mélange des genres entre soins psychiques, soutien éducatif et relation d’aide d’une part, et prévention de la délinquance d’autre part conduit à une rupture de confiance des familles envers les institutions d’accueil et de prise en charge, ce d’autant plus que la remise en question du secret professionnel est à l’ordre du jour.
Le ministre de l’intérieur a affirmé à l’Assemblée Nationale le 28 février dernier « Nous voulons donc mettre en place un système qui permette de tendre la main à des jeunes qui se sentent aujourd’hui abandonnés, parce que ni la famille, ni l’école, ni la PMI, ni la santé scolaire ne les aident ». Nous entendons lui rappeler que chaque année des centaines de milliers d’enfants bénéficient des prises en charge et du soutien de centaines de centres médico-psychologiques et médico-psycho-pédagogiques, de centres de protection maternelle et infantile, de structures de santé et d’aide en milieu scolaire, d’actions de soutien aux parents (REAPP), pour ne citer que ceux-là.
Les premiers éléments de l’avant-projet de loi sur la prévention de la délinquance rendus publics confirment l’intention du gouvernement d’inscrire dans la loi, au titre de l’action de sécurité et d’ordre public, « le dépistage précoce des enfants présentant des troubles du comportement et des signes de souffrance psychique ». Cet avant-projet prévoit aussi une levée obligatoire du secret professionnel dans le cas de personnes « présentant des difficultés sociales, éducatives ou matérielles » au profit du maire de la commune qui deviendrait ainsi détenteur des informations confidentielles touchant à leur vie privée. Lequel serait en lien avec le préfet via le contrat local de sécurité et de prévention de la délinquance. Cela constituerait une mise sous contrôle des populations et des soins prodigués aux personnes par une autorité politique et administrative, et ce dès le plus jeune âge.
La confusion des rôles entres institutions de santé et de sécurité, l’abolition programmée du secret professionnel, remettraient en cause notre pacte social et démocratique.
Pour Pasde0deconduite, les difficultés de comportement de l’enfant, leur prévention, leur prise en charge relèvent des politiques de santé, d’éducation, et sociales, et non des problèmes d’ordre public. Dès lors il conviendrait de discuter avec les ministères de la santé, de l’éducation, hors de tout contexte lié à la politique de sécurité, des moyens d’améliorer la prévention et les soins aux enfants, notamment dans les domaines psychique, éducatif et social, et nous sollicitons ces instances gouvernementales pour nous recevoir.
Nous demandons solennellement au gouvernement de renoncer à édicter, dans le projet de loi sur la prévention de la délinquance, une détection précoce de « troubles comportementaux » chez les enfants et d’en exclure toute atteinte au secret professionnel.