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7 juillet 2008

Projet de décret, et d’Arrêté : décidément tout le monde est contre Catherine Petitnicolas — présentée par Philippe Grauer

Catherine Petitnicolas — présentée par Philippe Grauer

Résultat des courses, tout le monde est contre, accusant les textes projetés d’aller engendrer des psys de mauvaise qualité. D’une certaine façon c’est déjà ça. La FFPP est contre pour des raisons contraires. Ces contre-là constituent avec le contre de Jacques-Alain MIller, qu’ils rallient sans vergogne à leur cause, un amalgame hétéroclite ahurissant. Au-delà de ce paradoxe manipulatoire non exempt d’une certaine malhonnêteté chez des parangons de vertu professionnelle, on constatera que de l’Arrêté scélérat cause de cette prose résulte en tout cas une cacophonie suspecte.

Retournement en son contraire

Dans l’article de Catherine Petitnicolas, les arguments des tenants de la psychothérapie relationnelle et de la psychanalyse, retournés comme un gant pointent un doigt inversé vengeur dans la direction opposée de celle qu’indiquait le gant d’origine. Cela ne s’appelle pas relever le gant, mais le mettre à l’envers. Collophon inverse, à la Lewis Caroll une nouvelle fois.

On y perd ainsi son latin quand Le Figaro nous enseigne que les psychiatres sont passés par une analyse didactique, comme dans les années 60 — les années Lacan, un psychiatre qui avait rallié la moitié de ses confrères (pas davantage tout de même) à la psychanalyse, ce qui est massivement inexact pour la nouvelle génération qui ne jure que par les TCC et le dieu Neurone.

La confusion est à son comble quand la FFPP ne désenrageant pas voit déjà d’innombrables « officines » former au rabais des {techno-psys , utilisant à contre-sens l’expression qu’avait forgée Jacques-Alain Miller dans Le Point pour dénoncer les projets co-ministériels d’Arrêté scélérat psychanalycides et psychothérapicides relationnels. Un cochon n’y retrouverait pas ses petits.

C’est par ailleurs votre serviteur qui a lancé l’expression d’officiers de santé mentale, décalquée du XIX ème siècle (Bovary) devenue sous-officiers avec Favereau repris par Gori (1), pour désigner ces sous-psys que Miller dénomme techno-psys, expression bien trouvée, chargés d’administrer une thérapie (pas vraiment une psychothérapie) à protocole bas de gamme Made in French University. Il court il court le furet du Signifiant, diraient nos amis lacaniens, et se retourne au bout du chemin.

Quant au concept de juteux créneau , quand on connaît un peu la quotidienne pénibilité financière de nos Écoles agréées, il relève en ce qui concerne le secteur que nous contrôlons, à la fois du fantasme, de la désinformation ou de la malveillance, qui peuvent d’ailleurs se cumuler.

Quand nos Écoles agréées s’évertuent à sécuriser scientifiquement et éthiquement un territoire sain de transmission soigneuse pour la psychothérapie relationnelle, désinformer au point de les traiter de lieux d’engendrement de « praticiens sous-qualifiés » revient à généraliser à leur endroit le concept plus que douteux de charlatanerie si cher à la médecine quand elle s’angoisse et fait de ses fantasmes un fond précisément de commerce. Le monde à l’envers, ça peut tromper du monde seulement dans la mesure où l’incriminé ne protesterait pas. Ça peut aussi se retourner contre l’auteur de la figure si la vérité se trouve rétablie.

Tout est à l’avenant. L’autrice de l’article nous avait habitués à plus de professionnalisme. Nous reviendrons sur ce texte qui mérite une critique § par §. Nous commençons par vous le livrer, en vous priant de le lire avec tout l’esprit critique nécessaire, celui qui a cours d’ordinaire au CIFP et dans les écoles comparables. Tout de même cet article est quelque peu foudingue. On se reportera à titre d’antidote à l’article ici-même de Cécile Prieur paru dans Le Monde }


« Les psys vent debout contre un projet de décret »

Les professionnels ont critiqué, samedi et dimanche, le nouveau texte destiné à réguler l’exercice de la profession de psychothérapeute. Ils redoutent l’instauration d’une formation sous-qualifiée.

Que faire face au casse-tête des décrets d’application de la loi du 9 août 2004 sur l’exercice de la psychothérapie, attendus depuis près de quatre ans et maintes fois repoussés ?

À l’origine, le député UMP Bernard Accoyer souhaitait “éviter certaines dérives sectaires” en réglementant l’accès à cette nébuleuse de spécialités pas toujours validées scientifiquement. Si l’intention était louable, le texte a suscité une levée de boucliers de la part des psychologues, des psychiatres et des psychanalystes.

Ce sujet crucial et lourd de répercussions non seulement pour la “planète psy”, mais aussi pour l’ensemble de la société qui consulte de plus en plus souvent ces “praticiens de l’âme”, a été longuement abordé lors des troisièmes Entretiens francophones de la psychologie qui viennent de se tenir à Paris, du 3 au 5 juillet.

Aux dernières nouvelles, la publication d’un arrêté concocté par la commission nationale de l’enseignement supérieur et le ministère de la Santé serait imminente.

“Ces deux instances nous proposent une protection de très bas niveau, à savoir un niveau bac plus trois assorti de 400 heures de formation clinique et théorique en psychopathologie et cinq mois de stage en tout et pour tout”, déplore Philippe Grosbois, psychologue à l’université catholique d’Angers et chargé de mission “psychothérapie” au sein de la Fédération française des psychologues et de psychologie — FFPP, qui redoute que le texte soit avalisé dans la torpeur du mois d’août.

“Un véritable camouflet”

En guise de comparaison, rappelons que, actuellement, un psychologue doit au minimum suivre un cursus théorique de cinq ans à l’université assorti de nombreux stages, et que les psychiatres, après leurs huit années de cursus médical, doivent se former durant quatre ans et bientôt cinq entre l’hôpital et les cours théoriques. Sans oublier un long passage sur le divan (analyse didactique) et la participation active à de nombreux séminaires pour devenir un praticien digne de ce nom, à qui une personne en souffrance pourra se fier et se confier.

Ce projet d’arrêté ressemble furieusement à celui des très nombreuses officines privées de psychothérapie, à but lucratif, qui ont tout intérêt à obtenir la mise en place de cette formation a minima ”, redoute Philippe Grosbois. Une position partagée par de nombreux professionnels aguerris. “ Ce texte est un véritable camouflet pour nous psychiatres, camouflet d’autant plus fort qu’il devrait être avalisé par le ministère de la Santé ”, lance le Dr François Kammerer, président de l’Association française de psychiatrie. “ Ce qui manque à ce projet, c’est l’obligation d’une formation clinique et théorique suffisamment solide. Plus grave, les futurs psychothérapeutes risquent de faire preuve d’une absence totale de regard critique vis-à-vis de l’ensemble de la connaissance et des savoirs et d’être dépendants de l’institution qui les aura formés ”, poursuit-il.

Le Dr Thierry Jean, psychiatre et psychanalyste, représentant de l’Association lacanienne internationale, est lui aussi très réservé, d’abord pour des raisons liées à la mise en place d’une formation insuffisante. Et ensuite parce qu’il voit se profiler en arrière-plan de ce projet “ l’influence grandissante d’instituts de formation privés qui se sont lancés dans ce juteux créneau tout en soulageant la trésorerie de l’État ”.

Les candidats psychothérapeutes qui font appel à ces formations doivent financer eux-mêmes leur cursus. Alors que l’université est le seul endroit qui dispense un enseignement gratuit et de qualité permettant la constitution d’une pensée critique garante d’une pratique ultérieure autonome.

« Je crains que de tels thérapeutes, qui n’auront pas acquis un niveau de réflexion personnelle suffisant, soient des appliquants ou de simples techniciens ”, met en garde le Dr Kammerer, qui a “ le sentiment que les pouvoirs publics ont décidé de créer des postes de praticiens sous-qualifiés ”. Une critique reprise par la majorité des psychologues. “ Le législateur prétend que ce texte protège le titre de psychothérapeute mais, en filigrane, on voit la délégation par l’État d’un certain nombre de tâches à des professionnels sous-qualifiés et donc moins bien rémunérés ”, conclut Philippe Grosbois. Cet arrêté ministériel signera-t-il “l’an I de l’ère des techno-psy” comme l’écrit, dans Le Point daté du 3 juillet, Jacques-Alain Miller, l’un des plus éminents psychanalystes français ?

Catherine Petitnicolas in Le Figaro — 07 07 08