Le bons sens, chose la mieux partagée, faculté de bien juger et de distinguer le vrai du faux — donc de distinguer un professionnel dûment formé d’un charlatan sans toujours tout confondre —, pourrait-il se voir mis en échec au pays de Descartes auprès de la représentation nationale ? sans délibérer, à minuit moins cinq, un amendement est adopté, procédé cavalier bien connu en particulier coutumier de la méthode Accoyer.
Puis c’est l’unanimité enfin une bonne loi égale pour tous, — cependant inégale pour nous, on en distingue de plus égaux que d’autres mais cela ne semble pas visible — qui sont les tous en question : tous les autres sauf nous.
Et maintenant débat au Sénat, où de nombreux sénateurs de droite comme de gauche marquent leur désaccord. Cela suffira-t-il ? C’est dans ces circonstances qu’apparaît le texte émanant de la FF2P que nous diffusons, un peu tardif peut-être mais le voici tout de même, qui alerte. Il n’est pas sûr que les patients, comme la patrie, soient en danger, à ce point, à l’hôpital où depuis toujours ils sont soumis au régime prévu par cette loi. De plus on compte également des professionnels très compétents à l’hôpital et dans les CMP. Mais on peut comprendre que des collègues s’alarment car il y a lieu la sonnette du même nom, de la tirer.
Il n’est ni juste ni correct ni responsable de chercher à déstabiliser et décrédibiliser une branche professionnelle toute entière, pour satisfaire au singulier mélange d’idéologie scientiste, de corporatismes, de populisme et de raisons personnelles. L’amendement présenté suscite l’indignation.
On ignore ce qu’il en sera délibéré et voté. On peut assurer d’avance que notre profession triomphera. Quand et comment c’est à notre pugnacité, à notre amour de notre métier, au soutien obejctif de ceux qui nous font l’honneur de recourir à notre travail de praticiens, de fournir des éléments de réponse. On peut nous faire confiance, non seulement pour l’éthique de notre exercice contrôlée par nos institutions historiques, mais aussi pour maintenir vivante notre psychothérapie.
Nous n’en démordrons jamais, elle ne sera jamais rayée d’un trait de plume de la réalité sociale et psychosociale de ce pays. Le SNPPsy et l’AFFOP se tiennent sur la brèche, et plus nombreux s’y tiendront ensemble mieux cela sera. C’est ainsi que la psychothérapie relationnelle de toute façon vivra !
Philippe Grauer
La nouvelle loi hospitalière (HPST) est en débat, en urgence, au Sénat, cette semaine. Curieusement, un article y a été intégré concernant la protection du titre de psychothérapeute — cela alors que plus de 90 % des psychothérapies sont effectuées hors du milieu hospitalier, à l’initiative des usagers eux-mêmes.
Lors de sa séance du 4 mai 2009, consacrée au débat sur ce projet, du fait de l’absence de plusieurs Sénateurs à la Commission de Affaires sociales du Sénat, cinq amendements rectificatifs préparés par les Sénateurs UMP et centristes, ont été automatiquement retirés, et le texte voté à la hâte par l’Assemblée Nationale, à minuit moins cinq, sans le moindre débat, devant un hémicycle désert, a donc été adopté par la Commission et risque fort de se trouver ratifié par le vote général du Sénat, prévu le 12 ou 13 mai prochain.
Si ce nouveau texte de loi entrait en vigueur, les 4 millions d’usagers français vulnérables (8 % de la population adulte) ayant recours à une psychothérapie, se trouveraient en danger évident d’être confiés — sous couvert de l’État — à des personnes inexpertes.
En effet, la loi prévoit paradoxalement d’accorder le titre (générique) de « psychothérapeute » à des professionnels non formés spécifiquement à cette spécialité (en effet, les psychologues et les psychiatres ne sont pas formés à la psychothérapie (1), ni à la psychanalyse, à l’Université) et d’en interdire l’usage aux professionnels qualifiés, formés spécifiquement, à un niveau d’études de bac + 7, à cette spécialité, dans une trentaine d’instituts d’enseignement supérieur privés(2)
Les Parlementaires, bousculés par l’urgence, ont ainsi cédé à deux amalgames successifs :
– dans un premier temps, ils ont confondu les psychothérapeutes professionnels qualifiés et certifiés, avec de soi-disant « psychothérapeutes » autoproclamés, sans formation suffisante — parmi lesquels se sont infiltré quelques charlatans et gourous de mouvements sectaires ;
– dans un second temps, ils ont confondu les psychologues et psychiatres avec les psychothérapeutes, sans prendre en compte les exigences différentes de formation, pourtant reconnues dans tous les pays d’Europe, notamment l’exigence d’une psychothérapie ou psychanalyse personnelle pour tous les psychothérapeutes, ainsi que d’une supervision permanente de la pratique professionnelle, cela en sus de la formation théorique, impliquant bien entendu, une solide formation en psychopathologie.
Nous publions ci-après, un appel solennel signé par un certain nombre de psychothérapeutes éminents — qui s’alarment de ce danger de régression dans notre législation, en espérant que les Sénateurs vont se ressaisir in extremis lors de la séance plénière de vote, prévue le 12 ou 13 mai.
(3)?
Avec le « cinquième acte » de la tragédie qui se joue actuellement au Parlement, dans le contexte de la Loi HPST, définissant entre autres, l’usage du titre de psychothérapeute, le législateur continue de méconnaître gravement la vraie spécificité et la fécondité des apports de la psychothérapie, notamment celle du courant humaniste. La volonté légitime de vouloir protéger les usagers, ne tient aucun compte des règles rigoureuses de fonctionnement, de recrutement et de formation — incluant la psychopathologie – que, depuis 30 ans, les organisations professionnelles se sont données.
Règles qui sont aussi celles de l’Association européenne de psychothérapie (EAP) qui regroupe 120 000 psychothérapeutes qualifiés, de 41 pays. Malgré les réactions de professionnels éminents, psychiatres, psychologues, universitaires, et des praticiens certifiés, la loi qui doit être votée au Sénat entre le 12 et le 14 mai, s’entête à vouloir faire de la psychopathologie clinique le critère principal de validation de la profession. Cette méconnaissance de la réalité de la profession entraîne une quadruple erreur :
• celle de méconnaître la spécificité du métier et de ses exigences de formation ;
• celle de confondre les perturbations psychiques graves — qui en appellent aux
compétences du psychiatre — et ce qu’il est accoutumé d’appeler les souffrances psychosociales — qui constituent l’essentiel des demandes d’aide psychothérapeutique ;
• celle d’éloigner de ce métier les personnes qu’un parcours personnel et professionnel prédispose particulièrement à son exercice. En effet il s’agit en réalité, pour la majorité des personnes qui s’adressent aux instituts de formation, non pas d’étudiants nouvellement sortis d’un cursus universitaire en psychologie, mais de professionnels entre 35 et 50 ans, exerçant des métiers de relation d’aide sociale, sanitaire, éducative et autres.
• celle de menacer la créativité même de la Psychothérapie.
Telle qu’elle est proposée, la loi créerait un no man’s land où pourraient s’infiltrer sans vergogne des « aidants » non formés ni certifiés ainsi que des groupes sectaires au nom prometteur. Par ailleurs, le clivage fait entre les psychanalystes — qu’elle intronise — et les psychothérapeutes — qu’elle exclut (les uns et les autres sont formés dans des instituts privés, selon des critères de formation très proches) — rend ce texte socialement et éthiquement inacceptable.
Précisons que beaucoup de ceux auxquels la loi accorde, après simple inscription sur une liste préfectorale, le libre usage du titre — médecins, psychologues et nombreux psychiatres — ont acquis leur vraie compétence de psychothérapeute dans les écoles et instituts de formation que la loi ignore.
Les signataires de ce Manifeste en veulent solennellement témoigner.
Marie-Françoise Bonicel, Maître de Conférence en psychologie sociale à l’université de Reims, psychologue clinicienne, psychothérapeute (4)
Cyrille Cahen, neuropsychiatre, psychothérapeute
Pierre Canouï, psychiatre, pédopsychiatre, psychothérapeute
Isabelle Crespelle, psychologue clinicienne, présidente de la Commission européenne
des méthodes de psychothérapie
Alain Delourme, docteur en psychologie, psychothérapeute
Charles Gellman, neuropsychiatre, psychothérapeute
Serge Ginger, psychologue clinicien, psychothérapeute, président de la Commission
européenne d’accréditation des instituts de formation à la psychothérapie
Edmond Marc, psychologue, professeurdes universités, Paris X
Michel Meignant, médecin, psychothérapeute, représentant l’EAP au Conseil de l’Europe
Max Pagès, professeur émérite des universités, psychologue, psychothérapeute
Lucien Tenenbaum, ancien chef de service des hôpitaux psychiatriques, psychothérapeute