version restaurée : colibri lanceur d’alerte, oiseaux réunis autour du pélican canadaire
Étrange brève, dont le texte s’autocontredit. Adressée déjà à de nombreux destinataires, alors qu’elle partait d’une information insuffisante, nous ne pouvons la supprimer mais entreprenons de la rattraper.
Aussi vous la livrons-nous sous forme d’un quasi dialogue agonistique à la Diderot, où s’entrelacent texte et contre-texte.
C’est qu’il se trouve que Rabhi et son conte colibriesque tronqué ne sont pas aussi recommandables qu’à première courte vue ils pourraient le donner à penser, puisque il ne suffit pas comme nous l’analysions initialement, d’oublier certaines prises de position pour sauver la posture d’ensemble, s’agissant à l’examen de l’ombre d’une imposture que nous n’entendons pas cautionner.
Notre école se situe du mieux qu’elle peut dans un espace critique et cherche à ne jamais diffuser de message inexact, ou insuffisamment examiné.
Nous avons donc réparé la version initiale, en la maintenant commentée et en l’enrichissant d’informations fiables. Alors, lisez attentivement, et réfléchissez de même.
PHG
Pierre Rabhi s’en est allé au paradis, un jardin merveilleux absolument nécessaire comme utopie. Il nous invite avec sa parabole mondialement célèbre à devenir en ce qui nous concerne des psycho colibris, contribuant de façon apparemment insignifiante à éteindre l’incendie du productivisme scientiste (y compris sans doute sous l’avatar de sa contrefaçon « durable ») et à réensemencer l’humanité en humanité. Dommage, le coup du colibri comme coup fourré. Lisez la suite. La révolution relationnelle d’un rapport humain et juste à la terre et à la vie, résolument rénovateur, dont procède son militantisme pacifique, continuera, invisible, interstitielle, de pousser la roue de l’Histoire dans le bon sens. Il ne fut pas parfait, mais heureusement la perfection n’est pas de ce monde, ses positions sur l’homosexualité, son allégeance à la théosophie, peuvent mériter la critique. Et même de fortes réserves. Sa douce persévérance pour une autre orientation de civilisation, un nouveau paradigme comme le dit le langage à la mode, à l’enseigne de l’écologie aux mille facettes, fait de lui une figure exemplaire d’une mise en mouvement de l’éco humanisme dans la simplicité pratique dont notre époque a besoin, et qui convient bien à l’obstinément humain exercice de notre métier.
Nous n’avons plus besoin de guerres ni de glyphosate, de meurtres de masse, d’abolition des espèces et des neiges éternelles, mais de printemps arabes, de terres arables, de sols aimables et vivaces, de vers de terre, d’insectes, d’oiseaux, de ratons-laveurs bien entendu, de nouveaux paysans, de nouveaux urbains, et de nouvelle fraternité (sororité comprise). Et, pourrions-nous dire, en matière de progrès humain, de psychothérapie à l’ancienne, en lenteur, artisanale, en relation, exercée par des colibricoleurs d’âmes. Cf. l’alternative des pélicans coopérateurs.
À quand un Ordre de la Libération des sols ? Les temps sont durs, la mort industrielle abreuve nos sillons, labourant leur chair jusqu’à l’os, dont ils empoisonnent la moelle même. Puisse l’exemple de Rabhi — ou au moins son mythe — contribuer à en finir avec l’arrogant ravage mondialisé, générateur de profits criminels, à revitaliser le sol violé, à procéder au renouveau que notre époque prépare en secret, au profond des bonnes terres et de la bonne volonté commune qui nous restent. Sachons rester organisés et déterminés à constituer et maintenir la force nécessaire. N’oublions pas au plus âpre de la nuit aux glaises désertifiées, l’entêtée, entée sur la mobilisation collective, l’entéléchique germination du principe Espérance.
"Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit : "Colibri ! Tu n’es pas fou? Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! Et le colibri lui répondit : "Je le sais, mais je fais ma part."
Au bout de quelques heures, le petit colibri mourut d’épuisement — très fier de lui. Si fier de lui qu’il avait réussi à se construire un ego aussi monumental que l’incendie de forêt qu’il prétendait combattre. Col-hubris. Puis la forêt brûla tout entière, comme de juste, jusqu’à la dernière fougère, jusqu’au dernier brin d’herbe. Pas de quoi être si fier ?
Voici une "véritable histoire du colibri" qui raconte sa mort en pure perte, pris d’un délire de grandiosité. Sans compter qu’un colibri égale une goutte d’eau, un toucan combien ? Tout autre version, d’autres écologistes font du colibri un lanceur d’alerte, rassemblant tous les oiseaux pour sauver leur forêt. Entre alors en scène le pélican, bien équipé, qui parvient, sorti on ne sait d’où en escadrille, à éteindre l’incendie néolibéral. Cela renforce la conclusion de mon premier message : constituer et maintenir la force nécessaire à la victoire commune.
Il serait mal avisé de diffuser sans sa critique le message selon lequel la réunion des dés à coudre individualistes chacun dans son coin pourrait arrêter Bolsonaro — puisqu’il s’agit d’un conte amazonien.
On me mande également que Rabhi, largement souvent invité par les incendiaires, les intéressa fort. Et que son système local est peu recommandable. Enfin, de source du Monde diplomatique de 2018, le personnage apparaît comme plus trouble qu’on l’imaginerait de prime abord.
Je dispose à présent d’un dossier intéressant là-dessus, mais ne saurais dans un premier temps en alourdir davantage cette brève. Puisque mon texte est déjà parti je préfère apporter les nécessaires correctif sà mon erreur. Après tout le statut de l’erreur c’est de fournir l’occasion d’apprendre. Cette fois-ci c’est ma tournée. Allez, bonne réflexion à tout le monde.