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18 janvier 2007

Un psychothérapeute à la tête du groupe UMP de l’Assemblée ! La SARP n’est pas d’accord ! Jean-Daniel Mattet

Jean-Daniel Mattet

Trois ans après sa première campagne parlementaire visant à réglementer la pratique des psychothérapies, Monsieur Accoyer, manifestement insatisfait du dialogue qui s’est instauré sur ces questions entre les professionnels et le gouvernement, a décidé de passer en force. Cette fois, il ne proteste plus de sa bonne foi à l’égard des psychothérapeutes bien formés car les préjugés méprisants sont sur le devant de la scène, assortis d’insinuations diffamatoires à l’endroit de ceux qui ont négocié avec le gouvernement.

Le Président du groupe UMP à l’Assemblée nationale, médecin de formation, veut protéger la population contre les actions des sectes, évoquant sans cesse les dangers que celles-ci font courir à se déguiser en psychothérapeutes. Que des sectes aient utilisé les voies de la promesse thérapeutique pour attirer à elles des esprits faibles n’est pas contestable, mais pourquoi le député Accoyer veut-il à ce point en faire porter la responsabilité à l’ensemble des psychothérapeutes ? Certains médecins eux-mêmes ne font-ils pas valoir, de bonne ou de mauvaise foi les promesses thérapeutiques des techniques qu’ils veulent promouvoir ? Faut-il le reprocher à l’ensemble des médecins sous prétexte que bien des essais thérapeutiques, de mise au point de nouvelles techniques, ne se font pas sans risque pour la vie même de ceux que l’on veut soigner. Personne ne songe à interdire la pratique médicale et l’innovation thérapeutique qui en fait sa force et c’est pourtant une telle interdiction que Monsieur Accoyer est en train de faire passer avec son cavalier législatif, en glissant un article concernant la pratique des psychothérapeutes dans une loi sur les médicaments.

En confiant aux seuls médecins et psychologues formés par l’Université la reconnaissance des psychothérapeutes, il détruit tous les efforts que les organisations professionnelles ont prodigué pour former, encadrer, garantir les pratiques psychothérapeutiques de leurs membres et il privilégie une approche des faits psychiques et de leur pathologie par la seule pharmacologie ou par le comportementalisme qui fait valoir aujourd’hui ses titres de noblesse scientistes dans les facultés de psychologie. Il dénie la dimension pratique de la formation que le praticien s’impose le plus souvent à lui même (psychanalyse personnelle en particulier) et cherche à gommer la part subjective, qui dans la relation, ne s’attrape ni par les molécules , ni par des injonctions comportementales. L’appui sur la relation intersubjective fait pourtant le fonds de 70 % des pratiques en psychiatrie.

C’est une destruction programmée de nombreux centres de formations cliniques et d’enseignement qui est à l’œuvre sous prétexte d’intérêts financiers, argument cocasse, quand on connaît les difficultés de la collectivité à financer les soins qu’elle a déjà en charge. D’où parle cet homme qui considère que cette dimension qui vise l’intime pourra disparaître des préoccupations de citoyens qui pourtant les prenaient en charge eux-mêmes ? Pourquoi privilégier la filière universitaire exclusive où le complexe médico-comportementaliste tente de s’imposer si ce n’est pour accréditer l’idée que seuls les médicaments et les TCC seraient susceptibles d’assurer l’arsenal thérapeutique des symptômes psychiques.

Les psychiatres de la SARP ne peuvent pas laisser dire une telle contre-vérité et invitent leurs confrères à méditer ce qui se joue pour les psychothérapeutes. C’est le même mouvement qui cherche à faire entrer toutes les pratiques psychiatriques dans l’ensemble économico-épistémologique de la médecine, à l’hôpital comme en ville, sous prétexte du progrès scientifique. Déjà au début du XXème siècle, ces arguments étaient utilisés pour invalider les découvertes de la psychanalyse, et ce discours n’a pas beaucoup changé. La raison est combattue au nom de la vérité scientifique et la rigueur de ce qu’un Lacan a su lire dans le discours des sujets psychotiques est méprisée.

La SARP refuse que la psychiatrie, avec son histoire, ses acquis, comme ses erreurs, soit balayée au nom d’une science thérapeutique dont les résultats sont loin d’être à la hauteur des espoirs qu’ils font naître où la clinique est réduite à la statistique sémiologique, l’acte du praticien réduit à l’application des protocoles mis en place par les recherches qui ont partie liée à l’industrie du médicament, jusqu’au scandale, comme régulièrement la presse spécialisée en donne des exemples.

La SARP, considérant que la provocation législative de M. Accoyer est l’expression des forces les plus réactionnaires de notre société qui veulent aussi en finir avec la psychiatrie relationnelle, se félicite des actions entreprises par la coordination psy pour soutenir les psychothérapeutes injustement menacés et veut témoigner que les psychiatres ne seront pas complices de ces manoeuvres.