par Philippe Grauer
Notre bon La Fontaine en eût tiré une fable. Dès le début de cette rocambolesque aventure nous avons pris la précaution d’enquêter sur ses fondements, tant le risque de hoaxe comme on dit en globish, ce qui se traduit par canular en français courant, paraissait élevé.
À mesure que se dévoilait qu’on avait affaire à un délire personnel relayé à distance nous avons tenu nos lecteurs informés de la nécessité de dégonfler la baudruche. L’ennui c’est que des personnalités prises au piège signaient, et que le processus risquait de prendre une fâcheuse allure, un pays souvent désigné du doigt se trouvant accusé à tort de persécuter la psychanalyse.
Moralité : ne signer qu’après avoir réfléchi et pris ses précautions comme me disait mon instituteur en pensant à tout autre chose.
– T. Savatier, « La psychanalyse entre débat et procès », Le Monde 02 04 2013.)
– SIHPP, « À propos d’un échange entre Jacques Alain Miller et Mitra Kadivar, » mis en ligne le 13 février 2013.
– Élisabeth Roudinesco, Henri Roudier, Docteur Foad Saberan, « Affaire Mitra Kadivar – Il ne manquait plus que ça », mis en ligne le 11 février 2013.
Comme nous l’avions annoncé dans un précédent communiqué, nous apprenons que Mitra Kadivar est sortie de l’hôpital où elle avait été internée, après un épisode psychotique. Elle a été normalement traitée, compte-tenu de son état, et elle est sortie dans des conditions normales.
Par ailleurs, nous publions ici le résumé d’un document, résumé qui nous a été adressé par un de nos correspondants.
Bien à vous
Henri Roudier
Un document de 70 pages vient d’être rendu public sur le site de LQ et sous le
Miller s’adresse à elle sur un mode maniaque et se fâche tout rouge, la menace de ne plus la contacter quand elle
L’objectif de ce texte est de montrer que la cure par mails façon lacano-Miller est un « miracle » qui permet à Mitra de renaître, de ne plus prendre de médicaments et donc d’échapper à un traitement jugé inutile et nocif. Moyennant quoi, le jeune psychiatre qui l’a prise en charge et le professeur Mohammad Ghadiri, chef du service de psychiatrie de l’École de médecine de Téhéran, apparaissent comme des incompétents et des geôliers qui ont donné à leur « victime » un poison dont elle doit se débarrasser (de l’halopéridol, neuroleptique classique utilisé dans le monde entier contre les psychoses). Miller veut faire venir Mitra à Paris…
Tout au long du dialogue, Ghadiri est accusé d’avoir inventé un faux diagnostic en vue d’un internement abusif. Miller fait de Mitra, avec sa complicité, une opposante lacano-lacanienne en lutte contre un pouvoir dictatorial. Mais Ghadiri est également sollicité pour délivrer une autorisation afin de faire venir de France une délégation de psychiatres et de psychanalystes de l’ECF : il s’agit d’éclaircir les «malentendus». On est très déférent et très gentil avec lui. On ne le voit jamais intervenir vraiment dans cet échange.
Puis Miller menace encore Mitra de rompre toute
JA Miller fait des miracles politico-cliniques en libérant Mitra de sa folie induite par le psychiatre, par les médicaments, par le contexte iranien. Il lui dit qu’elle est aussi géniale que Lacan ou que Judith, la fille de celui-ci, qu’elle peut faire marcher ses «gardiens» à la baguette et que bientôt elle sera célèbre grâce à une pétition. Le texte de ces échanges rédigés en français et en anglais, est présenté comme un document brut d’une grande valeur littéraire. On peut en douter.
Mais au nom de cette «littérature», on a fait signer, à partir du 25 janvier 2013 et à l’aveuglette, une pétition à l’élite intellectuelle et politique française et internationale : il ne manque plus que les signatures de tous les présidents de la planète ainsi que celle du nouveau Pape. On se demande comment tant de célébrités ont pu se laisser berner en prenant un délire à deux pour une persécution.