Nous venons de retrouver, le 19 septembre 2019, Vingt ans après, le Rapport moral de JMichel Fourcade, rendant compte de la création de l’AFFOP. L’AFFOP fut portée sur les fonds baptismaux en octobre-décembre 1998, à partir de la rencontre fondatrice au Petit suisse (angle Vaugirard/Corneille), de Gérard Béthune, Bruno Dal Palu, Jean-Michel Fourcade, Philippe Grauer, Alain Naissant (Michael Randolph y était-il ?), en marge d’un colloque FFdP au Sénat, confirmant par la façon dont était conduit le débat et éconduite la parole des intéressés, le clivage institutionnel en cours, sous la direction du tandem Meignant-Ginger.
Nous avons restauré le document, altéré mais resté lisible. Nous l’avons remis en forme, en nous tenant au plus près de l’original. La conjoncture politique, idéologique, scientifique, culturelle, a profondément changé. Mesurer la distance parcourue et la différence des situations peut aider à déterminer une juste orientation actuelle du mouvement de la psychothérapie relationnelle, déjà nommée ainsi dans ce document.
La Commission d’arbitrage devant laquelle Jean-Michel Fourcade défendit bec et ongles le bon droit de l’AFFOP, prit une décision qui se révéla purement et simplement non contraignante. Mais alors à quoi bon tant de dépense d’énergie de négociation ? C’est que j’ai appelé les Accord fantômes de Jussieu. Par écœurement politique l’AFFOP, devant le refus de coopérer comme stipulé de l’équipe Meignant Ginger et des plus hautes instances de l’AEP, jeta l’éponge. À quoi bon insister envers une organisation internationale qui appuie sa fédération nationale de mauvaise foi, après avoir jugé elle-même que les deux fédérations devaient entamer un processus de coopération ?
Cet événement appartient à l’Histoire. Il importe qu’elle soit connue, étudiée, comprise. Faute de quoi elle se répète indéfiniment. Les efforts répétés de l’AFFOP et du SNPPsy pour restaurer un lieu d’échange et de débat — ce fut le cas du GLPR —, souffrirent à répétition d’une conduite malaisée à base d’orientations politiques divergentes. De plus, ayant tourné le dos au principe européen de ne fédérer que des organismes, la FFdP puis FF2P, s’étant engagée dans la concurrence déloyale du recrutement de candidatures individuelles, alors que l’AFFOP maintenait son mandat exclusif, se trouva dans la position de siphonner les deux syndicats partenaires, et d’affaiblir relativement l’effectif de l’AFFOP. Les Méthodes l’emportèrent sur les syndicats historiques, mais ne parvinrent pas à les supprimer.
La situation de rapport de force et de mépris de la loi qui fut ainsi indéfiniment reconduite, ne fut jamais analysée en commun (au GLPR on en connut des esquisses, vite interrompues) dans l’après-coup qui eut permis un véritable assainissement de la relation et du lien.
PHG
Jean-Michel Fourcade
— la FFdP, au bout de trois ans, ne mettait toujours pas en place des critères d’adhésion rigoureux pour les organisations candidates, dans le but d’avoir le plus grand nombre possible d’adhérents [commentaire de PHG en 2019 : entendre qu’afin de grossir les rangs pour faire nombre, la direction tardait indéfiniment à critériser les admissions].
— nous refusions la façon dont le sous-groupe au pouvoir à la FFdP était entré dans une course à l’attribution des CEP, par le biais de la Clause du Grand-père, qui ne respectait pas les principes que l’EAP s’était donnés à elle même à Rome en 1997 parce que la FFdP, utilisant la force d’attraction de l’organisation européenne de l’EAP et d’un "certificat européen", a tenté de balayer le travail accompli par les organisations qui depuis 30 ans ont commencé à construire la profession de psychothérapeute en France, de se substituer à elles auprès des professionnels de la psychothérapie et des pouvoirs publics, et de les détruire.
— nous déplorions la façon dont la FFdP avait provoqué les réactions négatives des représentants des professions voisines à l’encontre des professionnels de la psychothérapie.
— construire une organisation réellement fédérative
— nous faire connaître de nos collègues français
— créer des relations positives avec les autres acteurs de la Santé mentale
— obtenir une reconnaissance de la psychothérapie en tant que telle de la part des pouvoirs publics
— créer une image de la psychothérapie comme profession dans la presse française
— lutter pour conquérir notre place dans le concert européen
— défendre nos principes dans la construction de la profession
Nous avions, avant l’assemblée constitutive, préparé les Statuts inspirés de ceux de UKCP, que vous avez adoptés et dont je rappelle les caractéristiques principales :
Ces statuts permettent de fonctionner comme une fédération d’organismes et non comme une association de personnes.
Dans l’AFFOP, les personnes sont des représentants des organisations et elles ne peuvent plus voter ni remplir de fonction élective si l’organisme qu’elles représentent leur retire leur mandat.
D’autre part, les organismes se rattachent à un des quatre collèges qui caractérisent les activités des psychothérapeutes : praticiens, écoles, sociétés de méthode, syndicats.
Ces collèges élisent des représentants ès qualité au Conseil d’administration. Les membres du Bureau et les responsables des deux Commissions les plus importantes — Adhésion et Déontologie — ainsi que les membres du Conseil de médiation et d’Appel, sont élus par l’assemblée générale directement. Ceci permet une influence plus directe de l’assemblée sur le choix des responsables qu’une élection des responsables par le CA.
D’autre part le pouvoir exécutif ñ le CA ñ est sous la contrôle du Conseil de Médiation lui aussi issu de l’AG. La division et l’équilibre des pouvoirs reste un bon principe démocratique.
Un long débat entre les fondateurs a permis d’aboutir à une représentation équilibrée des organisations en fonction de leur poids ñ ni trop, ni pas assez ñ et des collèges entre eux, au sein du Conseil d’administration.
Un autre des soucis des fondateurs concernait la qualité des organismes membres. Pour s’en assurer, quatre catégories de membres ont été prévues : les titulaires, qui auront droit de vote à l’AG, les associés —représentants des professions voisines et des organisations de consommateurs élus par l’AG — , les adhérents et les provisoires qui n’ont pas droit de vote à l’AG. Au début de l’existence de l’AFFOP, tous les organismes membres sont adhérents et ils ne deviendront titulaires que lorsqu’ils auront démontré qu’ils répondent aux critères de qualité que chaque collège devra déterminer et faire adopter par l’AG suivante.
Forts de l’expérience de la vie des syndicats et des fédérations, nous avons immédiatement créé un conseil de médiation et d’appel et un responsable du contrôle du fonctionnement institutionnel.
Une politique fédérative clairement annoncée
Les pouvoirs de l’AG sont importants†: en plus du choix des responsables de la fédération, comme nous l’avons déjà dit, l’AG élit les membres (titulaires, associés, adhérents, provisoires) de l’AFFOP, et doit se prononcer sur les radiations et les exclusions, en plus de son pouvoir habituel de détermination de la politique générale de la Fédération.
Au niveau national, les objectifs de l’AFFOP sont d’abord d’aider les organismes membres à se développer — et non agir contre leurs intérêts — en respectant le rôle de chacun.
Avec l’aide de Philippe BOUTROLLE ñ qu’il soit ici remercié pour son travail amical pour notre fédération – nous vous proposons une mise en ordre des statuts qui n’entraîne que des modifications de forme.
Nous vous proposons un règlement intérieur comprenant, entre autre, un ensemble d’articles qui constitueront notre code de procédure de plainte.
Les collèges ont mis du temps à se mettre au travail. Leurs représentants nous feront part des résultats de leurs réunions.
Les collèges devront préciser rapidement les critères d’adhésion à l’AFFOP.
L’un d’entre eux a proposé l’organisation d’une journée d’étude à Bordeaux, le 27 janvier 2.000, ayant pour thème : "Quelle place et quelle fonction accordons-nous aux méthodes dans la définition des contours de la psychothérapie ?"
Que son organisateur, Jean-Marie ROBINE, en soit d’avance remercié.
L’adoption d’un règlement intérieur précisant les responsabilités des membres du Bureau va permettre au prochain bureau de mieux fonctionner et à chacun de prendre la responsabilité de ses tâches. Au président et au Bureau exécutif la conduite de la mise en œuvre de la politique de la Fédération ; au secrétaire général le fonctionnement interne de la fédération.
Du point de vue politique l’Équipe composée avec Alain NAISSANT, Philippe GRAUER, Marie BOUTROLLE et Michael RANDOLPH a très efficacement fonctionné. Son travail par fax, e-mails, téléphone a été énorme et a concerné surtout, dans un premier temps, les relations avec l’EAP et la procédure d’arbitrage.
Le Conseil d’administration a me semble-t-il, bien fonctionné.
Nous étions dans une première année d’existence: notre budget initial a été dépassé et nous devons être plus dotés financièrement pour le prochain exercice pour résorber le déficit de l’exercice précédent et pour avoir les moyens de notre politique et du rôle national et européen que nous devons tenir pour la défense de notre profession.
Nos raisons de quitter la FFdP étaient claires. Trouver une formulation convaincante et cohérente de notre spécificité, avec la méthode de consultations multiples des organisations membres pour la rédaction définitive de nos documents a pris du temps.
La mise au point de l’"Appel aux organismes français de psychothérapie et aux psychothérapeutes" a pris trois mois. Son envoi à 3.900 psychothérapeutes et psychologues répertoriés dans les pages jaunes de Postes et à 157 organismes de Psychothérapie a commencé il y a trois semaines et s’est achevé une semaine plus tard. Les réactions positives se sont fait sentir déjà à l’AG du SNPPsy et depuis.
Les conditions pour figurer dans le futur annuaire des psychothérapeutes de l’AFFOP doivent être précisées.
Nos contacts avec les professions voisines — psychiatres, psychologues et psychanalystes — nous avaient montré que deux facteurs provoquent leur exaspération :
la prétention des "psychothérapeutes" a être les seuls à exercer la psychothérapie, alors que les psychiatres, les psychologues cliniciens et les psychanalystes ont le sentiment d’avoir une FONCTION PSYCHOTHÉRAPEUTIQUE depuis toujours.
le contenu de la Déclaration de Strasbourg qui applique à tous les psychothérapeutes des critères qui ne sont épistémologiquement justifiés que pour les psychothérapies de type relationnel et non pour les psychothérapies de type prescriptif. Les déclarations sans nuance des responsables de la FFdP leur ont donné le sentiment que les psychothérapeutes voulaient empiéter en réglementant dans des champs qui ne sont pas les leurs. Le ou équivalent du CEP leur donnant raison.
Il a donc été nécessaire d’affronter ces problèmes, de repositionner la Déclaration de Strasbourg ‡ sa juste place.
Même si le Ministère, entraîné par l’effet de masse du concept de "profession-psychothérapeute", qui lui permettra de réglementer la profession des psychothérapeutes qui ne sont ni diplômés de psychologie ni de psychiatrie, va dans le sens de notre positionnement politique initial —faire reconnaître la profession de psychothérapeute comme une profession spécifique différente de la profession de psychiatre ou de psychologue —nous n’obtiendrons des relations de reconnaissance et de respect des professions voisines que si nous avons la sagesse de limiter nos prétentions réglementaires et de contrôle à ce qui nous est épistémologiquement légitime.
Les contacts avec les psychanalystes lacaniens montrent leur refus que la profession de psychanalyste soit réglementée par l’État, fut-ce au prix d’avoir à passer par la nécessité de titres universitaires autres pour pouvoir exercer leur métier ou profiter des avantages fiscaux qui y sont rattachés. Respectons ce refus puisqu’il nous permet d’obtenir leur soutien pour aux pouvoirs publics que l’exercice de la psychothérapie ne soit pas réservé aux seuls détenteurs du diplôme de psychiatre ou de psychologue, ainsi que le demandent les représentants d’autres groupes de psychanalystes (la Société Psychanalytique de Paris, l’Association Psychanalytique de France et le IVe Groupe) et l’Association des Psychiatres Européens.
Nous avons informé le Secrétaire d’État à la Santé, Bernard KOUCHNER, de la création de l’AFFOP et de ses objectifs et nous lui avons demandé audience. Il nous a répondu que nous serions reçus par Madame DUX. Mais le changement de fonction de Madame DUX puis le départ de Bernard KOUCHNER et de son cabinet n’ont pas permis de réaliser cette rencontre es qualité.
Cependant, ayant rencontré Madame DUX, en janvier 1999, nous avons appris qu’une délégation de la FFdP, reçue par elle peu de temps avant, avait annoncé notre création, affirmé notre non- représentativité. Nous lui avons fourni les informations qui démontraient, au contraire, notre représentativité et nous l’avons convaincue.
Lorsque nous avons envoyé une lettre au Monde à la suite de ses articles sur l’affaire des psychothérapies par téléphone, au nom de l’AFFOP, nous en avons communiqué le contenu préalablement à Madame DUX qui l’a approuvé.
Le président de l’AFFOP a été invité à participer à la réunion organisée par la Direction générale de la Santé, le 7 juillet 1999, à la suite de la remise du rapport de l’AFNOR sur l’exercice de la Psychothérapie en France.
Ayant rencontré avec Monsieur MORVAN, lorsqu’il recueillait ses données, des représentants des Organisations de Consommateurs, nous avons rappelé que ceux-ci tenaient beaucoup à la diversité des méthodes psychothérapeutiques et à la diversité du cadre juridique d’exercice professionnel : public et libéral.
La discussion a été plutôt vive : entre les représentants des psychiatres et des psychologues qui défendent la position "universitaire" (il faut un diplôme de psychiatre ou de psychologue pour exercer la psychothérapie) et les psychothérapeutes qui souhaitent une formation spécifique, entre les psychiatres et la représentante du Collectif Interassociatif des Usagers qui dénonçait "la non-transparence de l’hôpital public" où se pratique de plus en plus exclusivement des chimiothérapies et "la possibilité de choisir la psychothérapie est de plus en plus restreinte."
Les représentants des psychiatres et des psychologues ont admis qu’il serait utile de distinguer la "psychothérapie psychiatrique", la "psychothérapie psychologique" et la "psychothérapie relationnelle" et souhaité que d’autres réunions aient lieu pour les définir. J’ai, pour ma part, indiqué que la position de l’AFFOP était de rechercher une reconnaissance mutuelle des professionnels de la santé mentale, et une collaboration dans la complémentarité entre eux.
La réunion de la délégation du SNPPsy avec le nouveau conseiller de l’actuel Secrétaire d’État à la Santé, Monsieur OBRECHT (compte-rendu en annexe) montre que le Ministère a toujours l’intention de réglementer l’exercice de la psychothérapie, et ce dans un délai très bref.
Il est nécessaire de préciser quel sera le rôle de l’AFFOP par rapport aux initiatives de ses membres puisque le Conseiller sollicite la collaboration sur des points très précis : définition de la psychothérapie, cursus type de formation des psychothérapeutes, définition des pré-requis universitaire en formation initiale, définition des pré-requis en termes de psychothérapie personnelle, en terme d’expérience de vie, définition des critères d’accréditation de l’apprenti qui a accompli son cursus de formation, des critères d’accréditation des organismes de formation, de la composition et du rôle d’accréditation professionnelle et de sanction du Conseil National de la Psychothérapie, d’un Code national de déontologie, de procédure disciplinaire ; enfin le contenu de la clause du grand-parentage.
Les psychothérapeutes ont été systématiquement écartés de l’homologation par les représentants locaux de l’administration du Ministère de la Santé, par les Commissions régionales d’homologation, par les tribunaux administratifs, et ce contrairement à l’esprit et à la lettre de la Loi de 85.
Le 7 janvier 1999, nous avons interrogé Madame DUX sur la position du Ministère sur cette situation. Madame DUX a répondu qu’elle ferait faire une recherche dans les services du Ministère à ce sujet. Le chef-adjoint du Cabinet du Secrétaire d’État à la Santé, Monsieur Alain MANVILLE, a écrit ensuite au président du SNPPsy pour lui indiquer que dans deux arrêts récents de la Cour administrative d’appel de Paris "il semble qu’implicitement la cour ait assimilé les deux professions, alors qu’il existe deux titres professionnels, l’un protégé, l’autre non."
Nous avons aussi rappelé à Madame DUX qu’en l’absence d’une loi protégeant spécifiquement le titre de psychothérapeute, et en concordance avec la volonté de la loi de 85 et du décret de 90, les psychothérapeutes qui remplissent les conditions de l’un des trois articles du décret de 90 ne peuvent être écartés du bénéfice de la loi au motif que, aujourd’hui, psychothérapeute et psychologue seraient deux professions différentes, alors qu’à l’époque, la frontière entre les deux professions n’était pas définie.
C’est la position qui a été prise récemment par deux Cours Administratives d’appel dans deux arrêts qui sont favorables aux psychothérapeutes :
— Cour Administrative d’Appel de Paris du 1er décembre 1998, M. PETIT, page 2 ß2, "considérant qu’il ne résulte pas de ces dispositions que le législateur ait entendu exclure les psychothérapeutes de leur champ d’application"
— Cour Administrative d’Appel de Montpellier du 13-07-99, C. POULIN, page 3 ß3,"eu égard au contenu des formations suivies et aux objectifs et à la nature de ses interventions une expérience professionnelle comparable à celle d’un psychologue d’une durée équivalente aux 10 années exigées par les dispositions précitées du décret du 22 mars 1990".
À ce point, il serait utile d’entreprendre la rédaction d’un mémoire destiné à soutenir nos démarches auprès du Secrétariat d’État à la santé, sur le thème suivant : la réglementation légale de la profession de psychothérapeute par le moyen du décret de 1990 est un échec par la volonté même des psychologues qui l’ont refusé ; il est donc nécessaire de réglementer la profession de psychothérapeute de façon spécifique.
Nous avons adressé au Monde une lettre expliquant la position de l’AFFOP sur la psychothérapie à la suite des articles que ce journal a publié sur l’affaire des psychothérapies par téléphone, dans lesquels seul des psychiatres avaient été interrogés par le journal. Pas d’accusé de réception ni, à ma connaissance, de publication de la lettre.
Nous avons eu avec Sylvie ODY, rédactrice en chef de l’Express, plusieurs entretiens sur la situation de la psychothérapie lorsqu’elle préparait le dossier "Les psys peuvent-ils tout guérir" publié dans le numéro 2511 du 19/25 août 1999. À part la brève phrase dans laquelle elle écrivait que nous avons quitté la FFdP "avec le plus gros des troupes", nous sommes plutôt peu satisfait de ce dossier qui reflète l’opinion du public de ce journal : seule la médecine est crédible et les diplômes universitaires sont la garantie d’une bonne formation.
Dans la période de préparation des textes réglementaires sur l’exercice de la Psychothérapie, l’opinion publique et la presse pourront avoir un rôle important dans les décisions que prendra le législateur. Nous devrons dans ce domaine être attentifs et peut-être plus actifs.
La situation particulière de la France concernant la psychothérapie face à celle des autres pays européens.
La France est le seul pays où la profession de psychothérapeute ait été organisée au niveau national par des syndicats. Il y a des syndicats de psychothérapeutes en Italie et en Irlande, mais ils ne semblent pas avoir eu un rôle organisateur de la profession aussi important que celui qu’ils ont eu en France. En créant une procédure de titularisation du psychothérapeute, une procédure d’agrément des organismes de formation, en édictant des codes de déontologie, les syndicats on été les premiers organismes d’autoréglementation de la profession en France, avant que ne soient créées, récemment, les fédérations nationales de méthodes.
En jouant ce rôle, les syndicats ont contribué à créer l’identité de la profession de psychothérapeute par delà des différences d’écoles et de pratiques professionnelles. Aussi n’est il pas surprenant que la Déclaration de Strasbourg, qui reprenait au niveau européen les critères fondateurs de la profession de psychothérapeute qu’ils avaient établis en France, ait entraîné leur adhésion à l’organisation européenne qui se présentait comme porteuse de ces principes, à savoir l’EAP.
La réalité de l’EAP ne s’est révélée que progressivement : les méthodes plus que le praticien.
L’EAP s’est en effet organisée sur une double base : celle des méthodes, et celle des États. Chaque organisation européenne de méthode "scientifiquement validée†" reconnue par l’EAP a un représentant au Conseil d’administration de l’EAP ainsi que chaque Fédération nationale reconnue comme représentative par l’EAP.
L’EAP a donc provoqué, dans tous les pays, la création de fédérations nationales ayant vocation à regrouper toutes les organisations de psychothérapie existantes (écoles, organisations nationales de méthodes, organisations de praticiens, et syndicats ) pour gérer les affaires nationales, représenter les pays dans l’organisation européenne, et participer à l’attribution des CEP.
L’organisation nationale ainsi créée en France s’est donc trouvée, par ses buts, reprendre le rôle joué jusque là par les syndicats : validation des professionnels, représentation et défense des intérêts professionnels au niveau national, validation des organismes de formation.
Les syndicats ont, au départ, accepté cette création en pensant que leur place historique reconnue, un rôle leur serait donné dans l’attribution du CEP qui ne substituerait pas ce certificat à la titularisation qu’ils avaient mis tant d’années à construire et à faire respecter par les professionnels. C’est dans cet esprit que, par exemple, le SNPPsy qui avait été le commanditaire de l’étude de l’AFNOR sur l’exercice de la psychothérapie, a transmis à la FFdP le contrôle de ce travail. La FFdP et l’EAP ont bien accepté l’adjonction aux critères d’attribution du CEP adoptés à Rome en 97, d’un critère de "reconnaissance par des pairs" incluant la titularisation obtenue auprès d’un syndicat, pour la France. Mais ce critère pourrait être aussi rempli par une reconnaissance par des pairs obtenue auprès d’une organisation nationale de Méthode plus facile à obtenir lorsque le futur psychothérapeute a été formé par une école appartenant à la même méthode.
Il est donc apparu que la reconnaissance des compétences du professionnel serait très vite balayée par une reconnaissance de sa conformité aux critères propres à chaque méthode.
Ce déplacement dans les critères de reconnaissance est accompagné d’un affaiblissement du pouvoir de reconnaître qui était celui des syndicats : en effet, s’ils ont eu une place dans la fédération qui attribue le CEP au niveau national, leur représentation dans la fédération nationale est très réduite face à la représentation des écoles et des organisations nationales de méthodes qui défendent ensemble des critères "par méthodes" plutôt que des critères pour l’ensemble de la profession — les critères du praticien.
Ce clivage est vite apparu à l’intérieur de la FFdP : d’un côté une soi-disant "majorité" composée de représentants des écoles et des méthodes ayant une organisation multinationale forte — une des fédérations de Gestalt, l’AT et la Psychodynamique — et de l’autre une soi-disant "minorité" composée des représentants des syndicats et des écoles et méthodes plus sensibles à la multiréférentialité et aux critères de reconnaissance professionnelle communs. C’est ce que reflétait le témoignage d’un des leaders de l’EAP à la dernière AG du SNPPsy : "Il faut reconnaître que les syndicats ont été très maltraités à la FFdP."
Au niveau européen, l’EAP a produit une reconnaissance par les méthodes : le CEP apparaît comme le plus grand commun dénominateur entre les exigences de chaque méthode par le moyen de quantification de la formation en heures pour les quatre grands critères, et par la neutralisation des critères impossibles à respecter par les méthodes psychothérapeutiques non relationnelles — systémiques, comportementalistes ou cognitivistes — grâce à la formule "ou équivalent". Il reste peu en commun.
Une fois l’absorption des grands-pères dans le CEP faite, les futurs CEP seront attribués par la seule obtention des diplômes délivrés par les écoles, elles mêmes agréées pour délivrer ces diplômes par les Fédérations nationales, les Fédérations européennes de Méthodes et l’EAP. Les Méthodes et les Écoles ont, dans ces trois institutions, nous l’avons dit, repris tout le pouvoir de formation et de validation des professionnels.
D’autre part, le CEP tel qu’il est aujourd’hui, privilégie plus les formes universitaires d’acquisition de savoirs, que les formes de transmissions du Savoir-être et des savoir-faire, pourtant apparemment compris dans les critères professionnels de la déclaration de Strasbourg.
La France devrait apprécier ce type de formation inspirée du modèle universitaire, ont supposé les dirigeants de la FFdP. Et un diplôme européen, même non reconnu par les États, devrait attirer les professionnels de la psychothérapie qui n’ont pas de titre universitaire. Dans cette perspective, l’un des responsables de la FFdP [il s’agit de son deuxième Président, Michel Meignant — PHG 2019] a pu dire que les syndicats auraient disparu de la scène française d’ici trois ans.
Nous avons pensé que nous pourrions agir au niveau européen, dans l’EAP, pour obtenir une disqualification par l’EAP des méthodes de la FFdP et assurer, dans un premier temps, un contrôle sur l’attribution des CEP en France, dans un deuxième temps obtenir la qualité d’ONA que la FFdP avait obtenue de l’EAP par des déclarations mensongères.
Ayant saisi le Conseil d’Administration de l’EAP, celui-ci nous a répondu que les plaintes que nous formulions concernant la FFdP relevaient d’un jugement de la Cour d’Arbitrage. Nous avons donc saisi l’EAP d’une demande d’arbitrage et instruit les plaintes. L’audience de la Cour d’Arbitrage s’est déroulée le 1er juin 99 et a abouti à un accord entre la FFdP et nous qui nous donnait un droit de veto sur l’Attribution des CEP pendant six mois et créait un comité paritaire qui établirait les règles de fonctionnement communes à la FFdP et l’AFFOP pour la représentation nationale auprès de l’EAP et l’attribution de CEP.
La FFdP a continué à instruire les dossiers de candidature au CEP sans respecter l’accord de Jussieu. Elle a publié un annuaire de psychothérapeutes français membres de la FFdP sans vérifier que les personnes dont les noms étaient publiés aient donné leur accord et qu’elle aient réellement adhéré au code de déontologie dont l’annuaire disait qu’elles y avaient adhéré.
Nous avons sollicité l’intervention de la Cour d’arbitrage pour l’interprétation de l’accord de Jussieu. Vous en connaissez aujourd’hui la réponse. Nous avons donc à décider quelle politique suivre concernant nos rapports avec l’EAP, la FFdP et le CEP.
Le CA de l’EAP comprend plus de 100 membres — les représentants des méthodes, les représentants des pays plus les élus aux postes de responsabilités – , ce qui rend difficile un débat sur les motions préparées par le Bureau. Un nombre de plus en plus grand de membres sont les représentants des pays de l’Est dont le contact le plus fort est le Secrétaire Général de l’EAP, ce qui assure une majorité automatique pour les positions que celui-ci défend au CA et pour sa réélection chaque année.
Si on ajoute que le Président change tous les ans, qu’il a la charge d’organiser le Congrès annuel de l’EAP, il a peu de temps à consacrer aux problèmes de gestion de l’Association vis-à-vis desquels il est plutôt sans pouvoir.
Le véritable pouvoir est entre les mains du Secrétaire Général, Alfred PRITZ, et de 6 à 10 personnes qui sont en place de façon permanente depuis plusieurs années. Cela fait penser à Montesquieu : plus le royaume est étendu, plus les peuples qui le composent sont différents les uns des autres, plus le pouvoir est autocratique et centralisé ; cf. l’empire autrichien, l’empire russe, etc.
Depuis Montesquieu les moyens modernes de diffusion de l’information ont changé les données : le partage de l’information et des décisions est devenu possible entre personnes très distantes, de langues différentes, ce qui permettrait à l’EAP, si tel était son désir, de fonctionner de façon plus démocratique.
Le fonctionnement peu démocratique actuel est contagieux : c’est en partie pour des raisons de cet ordre que s’est produite la scission de la FFdP.
Construction de relations avec les autres fédérations nationales européennes : l’UKCP.
Dans la même période l’organisation anglaise, UKCP, mécontente de ce fonctionnement et inquiète de la façon dont le CEP commençait à être distribué sans respect des règles établies à Rome en 1997 et grâce à l’utilisation d’une clause du grand-père mal préparée et mal définie, a décidé depuis le CA de février 99 de fermer le local mis ‡ la disposition de l’EAP dans ses locaux de Londres, de ne plus participer aux CA et aux décisions jusqu’à ce que le fonctionnement de l’EAP soit réformé, de geler l’attribution de CEP en UK jusqu’à juin 2000, et de se retirer de l’EAP après cette date si des améliorations substantielles ne sont pas obtenues dans les deux domaines majeurs causes de la crise actuelle : fonctionnement de l’EAP et attribution du CEP.
Le plus grave problème qui se pose à l’EAP aujourd’hui n’est pas un problème d’amélioration technique du travail du CA et du Bureau, mais de partage du pouvoir.
La personnalité du Secrétaire Général en est une des causes, mais le fonctionnement réglementaire et statutaire, qui n’oblige pas à une concertation suffisamment large et à des prises de décision plus participatives, est une cause autrement importante. Une simple mesure technique comme celle qui a été proposée "pour améliorer le fonctionnement du CA", est donc apparue comme inadéquate aux membres de l’AG de juillet 99 qui l’ont rejetée.
Nous avons en juillet adressé à la présidente de UKCP un courrier contenant notre analyse de la situation actuelle de l’EAP. Elle nous a répondu qu’elle la partage.
Nos contacts récents avec elle nous ont informé que les conversations avec les responsables de l’EAP concernant les réformes des statuts de l’EAP et de ses modes de fonctionnement n’avaient pas continué depuis juillet et que l’UKCP envisageait d’autres solutions européennes. Elle nous a renouvelé son assurance que l’AFFOP était l’organisation française de psychothérapie qu’elle associait aux projets de l’UKCP.
D’autre part, l’UKCP est entré dans une phase de négociations très actives avec le gouvernement anglais pour légiférer sur l’exercice de la psychothérapie en GB. Je l’ai informée de la situation française actuelle —tant de la procédure d’arbitrage entre la FFdP et l’AFFOP que des contacts avec le Ministère de la Santé pour la réglementation de la psychothérapie en France — et il est convenu que nous allons continuer à échanger régulièrement des informations.
Les rythmes sociaux de notre travail et de notre vie institutionnelle veulent que le président d’une association, même fédérative, présente aux membres de l’association réunis en Assemblée générale un rapport moral. En finissant de préparer celui-ci je me disait que l’Éthique est un des piliers majeurs de notre profession et qu’au delà de nos limites personnelles, institutionnelles, et autres, et malgré nos erreurs, un commun accord nous réunit sur des principes simples dont j’ai essayé de faire une liste rapide et donc incomplète, mais qui explique pourquoi nous avons pris nos distances avec des confrères dont les comportements institutionnels ne nous paraissent suffisamment respecter ces principes.
— faire passer la qualité avant la quantité
— respecter la place des différents types d’organisations qui s’occupent de la psychothérapie et leur rôle historique
— respecter dans les rapports entre professionnels les mêmes principes éthiques que ceux que nous défendons dans nos rapports avec nos patients
— promouvoir la profession de psychothérapeutes et non les méthodes d’abord en nous opposant à l’idéologisation des méthodes, à la fétichisation et à la commercialisation du CEP, au refus de l’analyse institutionnelle et politique de ce que sont la FFdP et l’EAP.
L’année a été difficile car il a fallu faire face sur plusieurs fronts. La période est cruciale pour la psychothérapie en France depuis et à cause du changement de position du Secrétariat d’État à la Santé concernant la réglementation de la psychothérapie, et des effets du comportement de la FFdP et de la Déclaration de Strasbourg sur les professions voisines. L’année qui vient sera aussi difficile dans les relations avec l’EAP avec qui nous avons à conduire jusqu’au bout la procédure d’arbitrage et la demande qu’elle réforme son fonctionnement. Mais il est clair aujourd’hui que la priorité va maintenant au travail avec les pouvoirs publics français pour la réglementation de notre profession.
Je vous propose un projet pour l’année prochaine en Annexe.
Mes remerciements vont en particuliers à Michèle TORDJMANN qui a continué à nous apporter son expérience des organisations internationales et des relations entre communautés de culture différente, à Alain NAISSANT et à Philippe GRAUER avec qui l’équipe de proximité a très efficacement fonctionné, à Michael RANDOLPH malgré les kilomètres, à Marie BOUTROLLE et à tous les membres du CA qui m’ont beaucoup soutenu dans cette période difficile, à Serge BEAUGRAND qui nous a accueilli dans ses locaux, au SNPPsy qui nous soutient en moyens matériels avec l’aide de Christine BIDEAULT, à Philippe BOUTROLLE qui nous a apporté son expérience dans le domaine juridique pour l’amélioration de nos statuts et la rédaction du projet de règlement intérieur, à Alexis TUTAJ pour son travail pour l’Appel, à la FLdP qui a pris en charge une partie de nos réunions, à ma secrétaire Françoise LAIK qui travaille presque plus pour l’AFFOP que pour son employeur, à mes patients qui, depuis un an et contrairement à mes principes antérieurs, entendent les appels de ma ligne téléphonique directe pendant leur séance.
Jean-Michel FOURCADE, président
ANNEXE : PROJET POUR L’ANNÉE 2.000
I — Construction de l’AFFOP
— Augmenter la vie interne de l’AFFOP par le renforcement du Secrétariat Général
— Augmenter la vie propre des Collèges
— Réussir la Journée de Bordeaux
— Faire fonctionner les Commissions statutaires
— Adhésions : produire les Critères
— Éthique : produire notre Code de DÉontologie
— […] les finances
II — Avec nos collègues Français
— publier "Le Manifeste"
— publier le journal de l’AFFOP "Psychothérapeute"
III – Avec les autres acteurs de la Santé mentale
— réaliser le programme de contacts que nous avons établi au CA du 21-10-99 pour aboutir à une journée nationale des États généraux de la Psychothérapie avec des représentants de toutes les professions de santé mentale
IV — Avec les pouvoirs publics
— Rechercher les appuis politiques
— Agir avec le Secrétariat d’État à la Santé
— Proposer des alternatives à la proposition de loi Accoyer
V — Avec la presse française
Écrire des articles à proposer aux journaux
VI — L’Europe
— Achever la procédure d’arbitrage
— Développer les relations avec les fédérations nationales qui ont des sensibilités proches de la notre
– […] projet européen alternatif
19 sept 2019 : octobre-décembre 1998 – Création de l’AFFOP par scission