Les psychologues, et à présent les psychothérapeutes de nouveau régime, tout comme les médecins, qui les administrent, procèdent à des traitements. Ils entendent traiter des patients, au statut de malades ou quasi malades (tout est là, le docteur Knock tenait la réponse : qu’est-ce qu’un quasi malade ? le patient d’un psychothérapeute nouveau style ?), venus les consulter à l’occasion d’un trouble psychopathologique (répertoriable au DSM).
Le patient lui est tenu de suivre son traitement. Celui-ci peut comporter une médication (psychiatre, médecin) ou une simple série d’entretiens (chez le psychiatre n’excédant en moyenne 15 minutes, le malheureux n’a pas le temps), prescrits à l’occasion d’un diagnostic, implicite ou explicité. D’ailleurs qui tient le diagnostic tient le traitement – et le « patient » (terminologie médicale, pas trop innocente). L’ennui avec le psychisme c’est que nombreux sont les « patients » qui ne sont rigoureusement pas des malades. Ainsi si vous venez de perdre un proche ou que votre mari vous trompe, où est la maladie ? a fortiori le traitement ? Certes vous en êtes « malade », au sens où cela vous fait souffrir, c’est la « maladie d’amour », mais il s’agit d’une façon de parler. Par exemple la tristesse n’est pas la dépression, et il est abusif de faire de tout épisode dépressif une maladie à guérir médicamenteusement, de tout trouble un mal à colmater par prescription, par traitement normalisateur, chimique ou psychologique. Prenez ça, faites ça, et vous irez mieux (i.e. vous sentirez moins votre souffrance, mise sur le mode Mute).
Une zone grise intermédiaire entre malaise et maladie permet une pêche en eau trouble. Si l’on s’adresse à un psychothérapeute de nouveau régime on risque fort de se trouver du côté du soin-traitement, dans le cadre d’un protocole plus ou moins nappé d’une sauce relationnelle. On pourra repérer si on a ou non l’initiative, si le praticien en face s’implique réellement, quel type d’écoute et de démarche il propose. On ne rendra jamais cette zone intermédiaire claire.
Pourtant il importe de ne pas s’y égarer. Le concept alternatif de soin-souci permet de se mouvoir dans un espace bipolarisé. Le concept de relationnalité, compris rigoureusement, devrait permettre de ne pas céder aux arguments de ceux qui ont intérêt épistémologique et professionnel à chercher à tout confondre pour récupérer la donne – histoire de pouvoir psy et de corporatisme, de droit à la psycho diversité, histoire d’idéologie et d’anthropologie, de citoyenneté, de conception de l’Homme.
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