comme le soutient Roland Gori : définis par la contextualisation culturelle et les codes et classification en vigueur au lieu et moment historique considéré.
On se dérègle psychiquement selon les paradigmes de l’époque et la géo socio politique dont on relève.
La psychothérapie relationnelle nous convie à devenir l’auteur ou autrice de notre propre vie : processus de subjectivation. C’est la psychanalyse qui a fourni le cadre et la révolution culturelle qui fondent cette nouvelle façon de se voir et concevoir au monde, dans l’univers socio mental d’après les Lumières, et d’après Nietzsche, Heidegger et Buber. Un univers où prévaut la relation entre sujets dont la conscience est conscience de quelque chose ou de quelqu’un.
Le propre du sujet c’est aussi d’être assujetti, le travail sur soi peut aboutir à se désassujettir, sachant que, sujets de l’inconscient, nous demeurons pour une part étrangers à nous-mêmes. Cela n’empêche ni la lucidité ni l’autonomie.
Philippe Grauer
En psychanalyse, tout comme dans les domaines de la philosophie et du droit, le sujet est actuellement à l’honneur. Mais, pour ce qui concerne notre champ, cet honneur est bien ambigu. A la mesure de l’importance renouvelée qui paraît lui être accordée, on perçoit comme une adultération de sa définition même, de sa raison d’être dans notre pratique.
De représenté par un signifiant pour un autre signifiant, selon la très rigoureuse, et à notre avis, incontournable définition qu’en établit Lacan, il en vient à se faire signe de « nouvelles subjectivités ». Ceci d’une façon qui reste peu problématisée et surtout induit en erreur en s’appuyant sur une clinique qui n’est plus celle du sujet dans sa définition psychanalytique, puisque, comme dans la séméiologie médicale ou psychiatrique, celui-ci se retrouve alors représenté par « un signe pour quelqu’un ».
Cela rend antinomique la notion de sujet et celle de subjectivité. Le sujet est coupure, aphanisis, il s’institue dans la destitution. Le sujet ne se subjective pas. Il est moment d’éclipse qui se manifeste dans la fente de l’une bévue (Unbewusste, inconscient). Il prend la place de ce que Freud appelait « l’hypothèse de l’inconscient ». Si subjectivation il y a, elle est du ressort d’un « je », soit d’une articulation grammaticale, dont le sujet reste en dessous (sub-jet).
Ainsi, sur la base de la confusion du sujet et de la subjectivité, « les nouveaux sujets » se mettent-ils à fleurir sous la plume de certains psychanalystes : nouveaux sujets de la nouvelle économie psychique, nouveaux sujets du sinthome, … Or, prendre la subjectivité pour le signe du sujet est le plus sûr moyen de ravaler la psychanalyse au rang de psychothérapie et la soumettre à réglementation.
Ce texte provient de la présentation d’un colloque tenu le 5 novembre 2009 à Paris par la revue de psychanalyse ESSAIM.
Sujet sous-jacent, construction théorique lacanienne dessinant soigneusement un espace théorico-clinique spécifique, voici de quoi alimenter l’idée multiréférentielle : comment vivre avec des champs conceptuels mutuellement irréductibles, sans les passer au mixeur qui en fasse une soupe ?
Ravaler la psychanalyse au rang de psychothérapie, quelle horreur ! s’il s’agit de psychothérapie non relationnelle on peut comprendre. La psychothérapie relationnelle ne traite pas obligatoirement le sujet comme c’est le moment de le dire un objet, n’en fait pas l’équivalent de la personne. Cela peut dépendre. Il importe en tout cas de bien entendre l’autre, même et surtout si épistémologiquement il tient à sa distinction.
C’est en respectant les différences et les distances théoriques qu’on pourra mieux progresser sur un terrain difficile. Pas facile mais passionnant.
Philippe Grauer
novembre 2009 – 29 mai 2014
« Back to Glossary Index