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22 octobre 2014

les 39 : fonction soignante et pratiques du collectif

gestionnite chronique à l’hôpital

par Philippe Grauer

notre pratique en libéral nous exempt de la maladie de la gestion, ou gestionnite, qui sévit depuis des années dans le cadre hospitalier.

Nous ne sommes épargnés peut-être que provisoirement, en tout cas il est clair que nous sommes solidaires, conduisant le même combat humaniste – qu’il se réfère à la phénoménologie, l’existentialisme ou la psychanalyse, intégrative ou non –, que les psychiatres et psychothérapeutes travaillant à partir du cadre de référence de la psychothérapie institutionnelle et de l’antipsychiatrie, le plus généralement d’inspiration psychanalytique.

Nous vous soumettons pour information (et plus si affinité, nos étudiants peuvent avoir intérêt à s’informer directement de ce qui se passe chez les voisins) cet appel à participer au forum

fonction soignante et pratiques du collectif

pour mieux faire passer le message d’une commune conviction éthique et méthodologique entre les deux disciplines, psychiatrie et psychothérapie relationnelle, lorsqu’elles mettent en œuvre la doctrine d’une psychothérapie fondée sur la relation, le lien, la dynamique de subjectivation.

Cette conviction va loin. Par l’intermédiaire du concept de soignant, elle réintroduit le soin, un soin pas trop éloigné de notre souci, sur le lieu même du traitement. Cela pourrait porter à parler de psychiatrie relationnelle(1). Élargissement du débat. Mais non confusion.

cependant ne pas tout confondre

Attention ! ne pas en profiter pour se mélanger dans la tête. Que le jeu des interfaces ne « déface » pas les faces, les identités restent différentes. La psychiatrie et la psychothérapie relationnelle, comme la psychanalyse, demeurent distinctes, en tant que disciplines, et pratiques professionnelles. C’est le concept de processus relationnel et de dynamique de subjectivation qui opère comme lieu commun et fait lien, trait d’union, ici entre trois disciplines à l’identité scientifique distincte, relevant de trois métiers différents. Le fait que la conviction, posture et doctrine psychanalytique inspire le combat d’hospitaliers du mouvement des 39 en référence à la psychothérapie institutionnelle ne doit pas brouiller la perception des différences et spécificités méthodologiques et professionnelles qui différencient l’univers psy. Qu’on se réfère pour mieux s’y retrouver au carré psy.


https://cifpr.fr/les39@collectifpsychiatrie.fr

Appel au FORUM

fonction soignante et pratiques du collectif

humanité commune

« Patient et soignant sont tous deux des humains. Ils arpentent tous deux la route dangereuse, imprévisible et finie de la vie. Peu de choses, symboliquement, les différencient. En pratique, ce qui les sépare est leur situation. Le patient est un humain tombé dans un fossé (un ravin, un gouffre) et souffre. Il demande de l’aide à ses proches et, parfois, à un soignant. Le soignant est un humain qui dispense des soins. Parfois c’est un geste spontané, désintéressé ; parfois, c’est un métier choisi et il en vit. Dans un cas comme dans l’autre, c’est son attitude qui fait de lui un soignant, et non son statut. » Ces paroles de Martin Winckler lors de la Conférence d’éthique clinique à Paris en avril 2014, situent d’emblée les enjeux de ce qui nous rassemble : notre humanité commune (patients et soignants) et l’hospitalité nécessaire à la souffrance psychique.

la relation est première

Pour nous, la relation est première dans toute démarche de soin. Seule garantie d’une prise en charge cohérente, elle repose sur l’existence d’espaces de travail et d’élaboration collectifs dans lesquels chacun s’engage, s’appuyant sur ce collectif dans les difficultés auxquelles le travail le confronte. Pour nous, ceci est nécessaire aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé (libéral et institutionnel. Car, l’existence d’une fonction soignante ne va pas de soi, elle doit être remise en cause chaque jour pour chaque patient. Pas de recette à priori, mais une élaboration des expériences du quotidien, tant dans leur banalité que dans leurs impasses, et de façon régulière avec d’autres soignants.

soin et lien psychothérapique

On constate de plus en plus un manque d’attention à l’égard des patients et des familles, des contraintes pour imposer aux patients une continuité de ce qui ne peut plus avoir le nom de « soin ». Car le soin consiste avant tout à travailler la qualité du lien thérapeutique, ce qui est le contraire de la démarche qualité qu’on nous impose aujourd’hui. En effet, le soin ne peut être de qualité que si est pris en compte le lien des soignants avec les patients, leur famille, leur environnement ainsi que le lien des patients entre eux et celui des soignants dans l’institution qui les abrite.
Or il n’y a plus d’abri pour le soin aujourd’hui.

comment en est-on arrivé là ?

du médicosocial à la simple technique

Depuis 2007, avec la RGPP – Révision générale des politiques publiques, puis avec la Loi Hôpital, Patients, Santé et Territoires – HPST, suivie en 2012 par la Modernisation de l’action publique – MAP, les gouvernements successifs n’ont eu de cesse de transformer le Secteur et le Médicosocial en entreprises soumises à la concurrence du privé dans des missions de service public. Ils ont ainsi transformé ceux qui se trouvent sur une route difficile, du fait de multiples facteurs autant subjectifs que sociétaux, en simples clients auxquels est faite l’offre d’un panel de réponses codifiées : le modèle hégémonique proposé est celui d’un homme dont la vie et l’existence sont réduites à un ensemble de neurones à médiciner et de comportements à rééduquer, réduisant les professionnels de la santé et du médicosocial à n’être que de simples « techniciens ».

abolition du soin

La Haute autorité de Santé – HAS, avec son volet Psychiatrie dont nous demandons la suppression, est une machine qui produit en continu des normes et des techniques qui n’ont rien à voir avec le lien thérapeutique tel que nous l’entendons, patients, familles et soignants réunis dans le Collectif des 39. La notion de « profession » et celle de « soin » sont abolies dans cette orientation.

pas là pour apprendre la tarte aux pommes

Sur le terrain chacun assiste à un mépris du travail quotidien, de la notion d’équipe, et des professionnels. « Est-ce que la psychiatrie est là pour apprendre la tarte aux pommes ? » répondait à la délégation d’Inter-Collège des psychologues d’Ile-de-France une représentante de la Direction générale de l’organisation des soins. Ou encore « Les patients ne sont pas là pour prendre du plaisir mais pour se faire soigner » entend-on ailleurs. Comme si l’objectif du soin n’était pas « avant tout, le mieux-être (ou le moins-mal-être) du patient » ! Mais alors quel serait-il ?

procédures opératoires et gestes techniques

Ainsi, dans cette orientation que nous contestons, le socle commun des sciences humaines – qui s’associait jusque là au médical – est abandonné au profit de l’application de ces procédures opératoires et de gestes techniques qui nient l’histoire de chacune des personnes accueillies, nient sa parole et empêchent toute construction subjective.

DPC : formation continue dépecée

Quel est le socle commun de ces formations obligatoires ?

Le Néolibéralisme triomphant a besoin de techniciens et non pas d’humains qui pensent et réfléchissent collectivement. La compétition encouragée, toute démarche collective devient impossible voire dangereuse. Aussi sous couvert de DPC – Développement professionnel continu, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé, sont appliquées comme dans l’industrie agro-alimentaire, une « traçabilité » et une « transparence », qui fusionnent dans un concept commun l’évaluation des pratiques et une formation continue obligatoire, au lieu d’une dialectique entre savoirs acquis et expériences de terrain.

C’est ainsi que nous analysons la souffrance des professionnels qui ne trouvent plus de sens à leurs actions et se replient dans des actes techniques ou administratifs, abandonnant les patients, les « usagers ».

C’est ainsi que nous comprenons la gravité, parmi d’autres, des faits suivants :

 

– l’apparition dans le secteur médico-social de techniques de management qui font fi, comme à l’hôpital, du « prendre soin » des personnes accueillies,
– Le DSM comme seule théorie de la souffrance psychique,
– le refus de formations liées à la psychanalyse (cf. le CMPP d’Orly) par des acteurs qui vont, par collaboration ou soumission volontaire, encore plus loin que les préconisations de la HAS,
– le refus de la spécificité d’une formation infirmière,
– la mise à mal des services qui pratiquent la psychothérapie institutionnelle avec suppression de postes d’internes,
« l’oubli » de la présence des psychologues à l’hôpital dans le projet de loi de santé de septembre 2014, qui est un acte symbolique fort que nous adresse le Ministère.

subversion & résistance

Pourtant des pratiques de subversion et de résistance se font connaître à l’Hôpital, dans les Secteurs, dans le Médicosocial : elles se sont forgées au cours des années, en même temps que la logique de ces attaques était analysée et devenait plus lisible.

C’est pourquoi, nous souhaitons, dans ce Forum Fonction soignante et pratiques du collectif, donner parole à tous ceux qui voudraient bien partager leurs expériences de terrain et de lutte pour récuser une telle dérive destructrice.

Venez nombreux le 1er novembre à Montreuil à La Maison de l’arbre !

www.collectifpsychiatrie.fr