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11 août 2015

d’autres psychotiques que moi Lucien Tennenbaum chroniqué par Marcelle Maugin, chapeauté par Philippe Grauer

Lucien Tenenbaum, un psychopraticien relationnel existentiel exemplaire

par Philippe Grauer


Lucien Tenenbaum, D’autres psychotiques que moi : images de la psychose ordinaire en thérapie (et ailleurs), Paris, L’Harmattan, 2015, 232 p., 24.50 €.-

parés des plumes du paon

Lucien Tenenbaum eut le courage et la lucidité, au moment de la promotion de la bien peu éthique loi dite Accoyer, de refuser le titre d’exercice de psychothérapeute qui lui revenait de droit médico universitaire, pour ne pas se voir contaminé par la pratique de collègues psychologues et psychiatres n’ayant jamais entrepris de démarche psychothérapique personnelle, se contentant de se parer outrageusement des plumes du paon arrachées aux croupions de nos psychopraticiens relationnels.

coucou c’est nous les psychothérapeutes !

Il fallait les voir courir, nos psychologues psychanalystes et psychiatres psychanalystes itou (à l’exception notable des membres de la Cause freudienne avant leur ralliement, à la fin de la Coordination psy) qui deux mois auparavant n’avaient pas de mots assez durs pour dénoncer la psychothérapie et les psychothérapeutes, il fallait les voir se jeter sur la constitution de leurs dossiers auprès des ARS, surtout ne m’oubliez pas, je suis j’ai toujours été, un authentique psychothérapeute ! spectacle à ne pas avoir manqué. Et maintenant il n’y a plus qu’eux au monde, l’essentiel étant d’écraser l’infâme, nous.

une voix discordante

Et l’on entendit une voix, une des rares ! protestant qu’elle ne hurlerait pas avec les loups et s’en tiendrait à ses exigences éthiques, de façon conséquente. Pas étonnant venant de la part d’un psychiatre défroqué depuis des décennies. Il y a des gens comme ça, si peu nombreux, à peine les remarque-t-on. Comme dans Une journée particulière, il se trouve toujours au moment où tout le monde se précipite ailleurs pour s’abreuver d’un discours dominant, une personne ou deux pour se tenir en dehors et sauver l’honneur. C’est sur ces entrefaites qu’après La dépression, une épreuve moderne, 2009, toujours à l’Harmattan, Lucien Tenenbaum fait paraître, sans tambours ni trompettes, un second beau livre. Un livre qui témoigne, brise les tabous, parle de l’ordinarité de la psychose, en français facile maîtrisant sa matière, parlant depuis une vie d’expérience professionnelle. Un livre qui continue de dire non, à la médicalisation de l’existence, à la psychopathologisation de la vie quotidienne et de la relation psychopraticienne.

L’Harmattan, édition devenue tendance ?

Toujours à l’Harmattan notions-nous, après que Max Pagès avec son dernier ouvrage (L’implication dans les sciences humaines, une clinique de la complexité, L’Harmattan, 2006), y ait paru, cela va finir par devenir tendance dans notre milieu. Les publications psys de bonne qualité ne trouvent plus de lecteurs (i.e. les psys ne lisent plus guère ?) en nombre suffisant pour intéresser les grandes maisons, celles qui diffusent. Restent les éditions confidentielles. Pas de service de relecture et de remise en forme, ni publicité ni actions de vente auprès des libraires, tirages limités, publication sans gloire, quasi artisanale. Cependant non dépourvue d’intérêt.

blanche ou ordinaire ?

Travaillant dans son coin, à chacun son coin, Lucien Tennenbaum n’a pas eu le loisir de s’apercevoir que d’autres en même temps que lui parlaient de psychose blanche, il s’en avise au dernier moment, en toute simplicité. L’idée était dans l’air et elle lui est bien venue, condensant une vie de pratique non conforme. La nommer psychose ordinaire, articulée à celle qui circule sur les circuits de la santé mentale, la psychiatrie quoi ! nommée donc clinique, médicale ou médicalisée – remboursée si vous préférez, connote une référence à cette idée issue de la psychologie humaniste qu’on a découvert la psychothérapie pour normaux et qu’on s’y tient si on veut échapper à la psychopathologisation de l’existence. Deux termes qui ne sauraient aller ensemble aisément.

révolution terminologique

D’où la révolution terminologique. Le SNPPsy opérant la sienne dès les années 80 avait tenté de désigner la personne qui va voir quelqu’un du nom de consultant. Histoire de n’utiliser ni le patient de la médecine – nos venant nous voir, nos visiteurs, ne répondant pas au cadre de référence de la maladie et du soin mais du malaise et du souci, ni le client des professions libérales, nos consultants comme nous avions innové de les nommer, ne nous sollicitant pas à titre de conseils. Vous me direz patient renvoie à souffrance, ce qui justifierait patient. Exact. Il demeure que la connotation paramédicale reste prégnante, et nous a joué des tours, comme avec le signifiant thérapeute (qui veut dire serviteur !). Or voici qu’au moment où de guerre lasse le SNPPsy était en train d’oublier le terme consultant (c’est vrai on ne sait pas qui l’est, puisque le consultant du consultant se nomme également consultant, c’est comme hôte. D’ailleurs ça n’est pas pour rien que ça se ressemble, nous reviendrons ailleurs sur tout cela), Lucien Tennenbaum nous ramène ce signifiant, comme on dit à la Lacan.

façons de dire façons de faire

Il pousse plus loin, transformant son cabinet en atelier. J’ai souvent en ce qui me concerne confondu cabinet (j’aime bien à cause de Caligari) et atelier, étant d’une famille de peintres. Mais je croyais qu’il s’agissait d’un idiolecte à moi. Et voici que je découvre que Lucien Tennenbaum, non peintre, opère la même substitution. Là j’apprécie, et réfléchis. Déjà que Frédéric Brissaut dans son Pour un renouveau de la psychothérapie, – où ça ? mais à L’Harmattan bien sûr ! en 2010, 188 p. – triture la terminologie et nous transforme pour sa part en psychomaïeuticiens. On est en droit de s’interroger sur ce travail de remise à plat de nos façons de dire, quand, pour reprendre un titre célèbre, dire c’est faire.

relationnelle-existentielle

Et ne pas se laisser faire par la langue, cette langue que Roland Barthes traita un jour de leçon inaugurale de fasciste. La révolution dans la façon de dire notre pratique, et corrélativement notre fonds idéologique et théorique, Lucien Tennenbaum la pousse avant de façon conséquente. Si on dégage notre pratique de la gangue clinique de la médicalisation de la pensée, on parle et agit autrement, on entre dans la véritable alternative, celle s’appuyant sur la psychothérapie existentielle, relationnelle-existentielle pour être plus précis. Une psychothérapie de l’ordinarité. La nôtre.

renoncé à son identité pour sauver sa vie

Marcelle Maugin caractérise bien cette démarche, laissons accomplir cette tâche à son texte. Nous aimerions revenir sur un autre mérite de l’ouvrage de Lucien Tennenbaum. Celui, s’appuyant fort pertinemment sur Devereux (« Un patient psychotique a toujours vécu un moment où il a dû renoncer à son identité pour sauver sa vie »), et bien sûr sur sa biographe Myriam Anissimov, d’aborder l’œuvre de Romain Gary-Émile Ajar, l’homme aux personnalités multiples littéraires pourrait-on dire mais c’est bien là le problème, ayant parachevé sa description de la psychose voguant dangereusement de la forme ordinaire à la forme clinique pour déboucher logiquement sur une mise à mort une fois les semblants protecteurs démasqués dans cette Nuit du chasseur que fut sa destinée.

et les organisations limites ?

Rendus là, une question connexe risque de se poser, que l’ami Fourcade se fera un plaisir de saisir, comment théoriser et articuler les deux espaces « cliniques » – il faut maintenant des guillemets, de l’organisation limite et de la psychose, comment théoriser la vieille théorie des noyaux psychotiques, soudain surgissants, à raccrocher ou non à la pathologie du narcissisme ? où l’on voit que, comme le soutenait Kurt Lewin, si dans notre discipline les édifices théoriques restent de l’ordre d’une logique dite molle, rien ne vaut une bonne théorie pour orienter notre pratique.

de la braise à la porte ouverte sur la mort

Et l’ouvrage de Tenenbaum nous livre un éclairage original sur l’univers de la psychose à partir de la singulière personnalité de Romain Gary. Un éclairage de tonalité et de conviction méthodologique relationnelle, humaniste bien entendu, étayée autant à la psychanalyse qu’à l’expérientiel existentiel, un éclairage précieux à nos yeux. Il nous donne une lecture inspirée de sa pratique de la tragique trajectoire qui conduit l’homme de braise à devenir celui de la porte battante (l’auteur remarque pertinemment que jar pour braise en russe n’est nulle part dans cette langue ajar, mais bien porte laissée battante de l’anglais ajar), sujette à de méchants courants d’air avec la terreur.

existentiel psychocorporel

Enfin dans une dernière section, le dialogue témoignage issu de sa pratique décrit avec tact et humanité des parcours psychotiques complexes en français facile et nous donne à éprouver au fil de la lecture en quoi consiste une pratique existentielle psychocorporelle. Nous développerons cela un peu plus tard.

voyage en psychotie

En attendant est-il trop tard pour acheter ce livre et le laisser traîner sur une plage caniculaire ? alors faites-en une acquisition de Rentrée. Merci à tous, à Marcelle Maugin, à Tenenbaum, à Gary-Ajar même toujours bon à lire (de nos jours on ne lit plus on relit. Relisez-le si ça vous convient davantage), surtout pour nous, et bon voyage en psychotie et en psychopraticoland.


Lucien Tennenbaum chroniqué par Marcelle Maugin, chapeauté par Philippe Grauer

Commentaires de lecture. Marcelle MAUGIN
D’autres psychotiques que moi, Paris, L’Harmattan 2015

Images de la psychose ordinaire en thérapie (et ailleurs).

par Marcelle Maugin
Nantes le 10 juin 2015

(les passages en italiques sont extraits du livre)


Quel titre !

Quel professionnel de la Santé Mentale ose ainsi parler de la folie en s’incluant lui-même d’entrée de jeu dans son propos ?

Lucien Tenenbaum… un psychiatre qui se définit comme psychopraticien et qui a eu l’audace d’écrire à l’ARS de la région PACA pour demander officiellement à « ne pas être inscrit sur le Registre national des psychothérapeutes » au motif qu’il refusait de porter un titre « délivré dans ces conditions » (celles du décret du 20 mai 2010).

Comment ne pas être « accroché » de suite par un titre aussi prometteur ? Voici qu’un observateur sensé être objectif introduit d’emblée un biais personnel dans son observation : les découvertes de la physique quantique auraient-elles contribué à relativiser le regard porté par les soignants sur les malades ? Auraient-ils enfin pris conscience de la subjectivité de leur position et donc de leurs énoncés sur la folie ? C’est assez inhabituel pour qu’on s’en réjouisse.

nouvelle sémantique

Parmi les indices de ce changement d’angle de vue, on notera le changement de vocabulaire par l’auteur : les patients deviennent des consultants, les cabinets de psychothérapie des ateliers, signifiant par là qu’on s’attèle ensemble à une tâche, qu’on est dans l’artisanat, qu’on chemine de conserve vers un résultat co-construit. Les bouffées délirantes sont considérées comme des crises révélatrices d’un potentiel de vie étouffé et explosif… Cette nouvelle sémantique ne cesse de nous rappeler que la définition de la folie « se situe dans le cadre d’une rencontre et dans le champ du langage ». Nommer autrement n’est jamais anodin.

existentiel vs. DSM

L’atmosphère qui se dégage de la description de ces chemins de vies nous rappelle l’époque trop oubliée où les thérapeutes américains se réclamaient d’une « psychothérapie existentielle ». On pense à Rollo May dans les années 70 définissant la psychothérapie « sur la base du concept de l’existence du malade étant dans le monde et du médecin existant et participant à ce monde »(1). Nous voici bien loin des découpages en quatre de symptômes et de l’objectivation des classifications du DSM5.

psychotiques cliniques / psychotiques ordinaires

Les psychotiques sont partagés par l’auteur entre psychotiques cliniques (ceux qu’on retrouve à l’HP) et psychotiques ordinaires, en fonction de leur capacité à sauvegarder certaines dimensions de leur personnalité leur permettant un minimum d’indépendance économique et d’adaptation à la vie en société. Plus ou moins fermés, plus ou moins ouverts ils entraînent dans tous les cas leur thérapeute dans un jeu complexe de chasseur/ chassé significatif de leur difficulté à des liens de confiance et de leur ambivalence face à toute proximité éventuelle. L’auteur nous décrit finement ces méandres du travail relationnel et nous y reconnaissons sans peine l’évolution des processus thérapeutiques qui nous sont familiers. Il invite par ailleurs à la fin de son livre les consultants à mettre leurs propres mots sur ces épreuves traversées en commun.

aspects psychotiques de notre être

Plus surprenant : Lucien Tenenbaum nous dit des psychotiques ordinaires « qu’ils sont nombreux, tant comme consultants que comme psychopraticiens ».Voici donc consultants et consultés pris dans le même sac : « deux personnes existant dans un monde » disait déjà Rollo May dans les années 60. L’auteur analyse leur interaction en décrivant des séances de supervision où il apparaît que leurs difficultés s’entremêlent, ce qui aux yeux de certains lecteurs pourra sembler légèrement inquiétant. D’autant qu’il affirme que les psys eux-mêmes (à des degrés divers) en seraient passés par là, par la psychose ordinaire, qu’il nous dépeint comme une façon de vivre à petit feu, de se protéger des turbulences des émotions : « Pour avoir souvent eux-mêmes bâti leur vie à l’économie psychopraticiens et psychanalystes connaissent la question » ! Ce qui ne l’empêche pas d’affirmer sa conviction, visiblement d’expérience, que « les aspects psychotiques de notre être ajoutent à notre compétence professionnelle ».

ordinarité psychotique difficile à déceler par les psychothérapeutes NN

Voilà donc ces psychotiques ordinaires reconnus comme faisant normalement partie de la patientèle du psychopraticien (non moins ordinaire). On nous avait pourtant dit de nous en méfier, que ce n’était pas nos oignons, qu’il fallait les repérer le plus tôt possible après nous être équipés de solides connaissances en psychopathologie. Le but étant de les renvoyer vers des spécialistes plus compétents qui sauraient les « soigner » grâce aux progrès de la science médicale et de la pharmacologie. On imagine sans peine les psychothérapeutes NN (nouvelles normes) n’ayant pas exploré leur propre vulnérabilité (aucun travail sur soi n’étant requis par la nouvelle loi pour exercer ce métier) se retrouvant de fait en grande difficulté pour les accompagner. Ne les percevant pas comme psychotiques en l’absence de délire manifeste, ils risquent en effet d’être rapidement déroutés, déstabilisés voir effrayés par des consultants aussi peu gratifiants

dimension pourtant universelle de notre humanité

En insistant pour nous transformer en psychopathologues et en diagnostiqueurs, le législateur manifeste de façon criante le refus de notre culture d’accepter cette dimension pourtant universelle de notre humanité. Notre société post-moderne qui préfère les personnages aux personnes et favorise l’anosognosie généralisée s’évertue davantage à les médiquer ou à les coacher qu’à les comprendre.

quand on n’a pas eu d’autre choix que de se couper de soi pour survivre

Lucien Tenenbaum nous démontre que ce n’est justement pas si simple que ça, que la psychose c’est bien plus profond, bien plus subtil et bien plus répandu qu’on ne l’imagine. Que c’est une certaine manière, coûteuse certes, mais qui en vaut une autre, d’être-au-monde, de faire face à la perte de son identité quand on n’a pas eu d’autre choix que de se couper de soi pour survivre. Que cela n’empêche pas forcément un psychotique ordinaire d’éventuellement se marier, d’avoir des enfants, de travailler et même pour certains d’atteindre une apparente réussite sociale. Ses mécanismes de protection psychotiques ne se manifesteront peut-être que lorsque les circonstances de la vie menaceront son équilibre précaire ou lors de certaines phases du travail thérapeutique lui-même. Que cela se traduit surtout par un manque-de-soi très douloureux, la conscience d’un manque-à-être qui vous conduit chez le psy (fuyant souvent hospitalisation et médicaments) comme poussé par une nécessité absolue.

cheminement possible nous humanisant autant qu’eux

Mais l’auteur nous fait comprendre aussi, sans prétendre à fournir des recettes et sans garantie de « réussite », qu’un cheminement est possible avec ces consultants psychotiques qui peut parvenir à les humaniser et nous humanise autant qu’eux. Les consultés qui tentent cette aventure peuvent proposer aux consultants une relation vivante et vivifiante dans la mesure même où ils ne craignent pas de s’aventurer sur des terres qui ne leur sont pas tout-à-fait inconnues, même si chaque voyage reste unique et chaque parcours imprédictible. Il s’avère nécessaire pour cela qu’ils aient eu l’occasion d’apprivoiser leurs propres failles au cours d’une longue exploration de leur propre intériorité (en relation duelle, souvent en groupe, au cours des séances supervision), ainsi que l’exigent d’eux les formations professionnelles responsables.

lutter contre la terreur

Au final Lucien Tenenbaum nous propose une compréhension du mécanisme de défense psychotique comme une stratégie de survie adoptée par un sujet dans un temps précoce où ses ressources personnelles ne lui permettaient pas de lutter contre la terreur ressentie, et où il lui a fallu sauver son être. Les individus les plus concernés ont dû « protéger leur vie intime menacée en masquant leur identité par quelque moyen que ce soit ». Produit d’une relation toxique, leur organisation défensive aura à s’apprivoiser progressivement. Le psychotique ordinaire devra expérimenter un autre mode de rapport à l’autre, apprendre à remettre du jeu dans la relation. C’est à nous psychopraticiens relationnels qu’il incombe d’offrir à ces personnes à la recherche d’eux-mêmes «une parole qui n’enferme pas la vie dans des définitions d’elle-même mais la laisse dire ce qu’elle est, comme elle est. Une parole qui n’arrête pas le mouvement de la vie, ne la fige pas dans des règles mais consent à ses impasses et prend tout le temps qu’il lui faut pour se dire »(2).

sémiologie de la rencontre

Lucien Tenenbaum n’a pas la prétention d’énoncer des vérités sur la psychose, mais sa façon de l’envisager lui redonne une place en tant que stratégie existentielle aussi impérieuse que respectable. Un rapport-au-monde comme un autre, impliquant les corps, bien plus répandu parmi nous qu’on ne l’imagine habituellement. Praticien d’une sémiologie de la rencontre, il nous invite à porter sur ce mode d’organisation un regard qui ne stigmatise ni n’exclut aucun d’entre nous. Il a le mérite ce faisant de réinscrire la défense psychotique à sa place légitime dans l’espace relationnel commun des humains que nous sommes.

patience indéfectible et capacité de fraternité à toute épreuve

Ce positionnement nous fait du bien, il est susceptible de redonner du sens au « cœur de métier » de tous les psychopraticiens relationnels. La généralisation actuelle des approches rééducatives pourrait faire que nos ateliers deviennent pour beaucoup de ces psychotiques ordinaires un ultime refuge. C’est à nous en effet que revient la mission de transformer la terreur du consultant en souffrance ordinaire, de désactiver dans la mesure du possible ses scénarios dysfonctionnels : il nous faudra parfois pour cela une authentique créativité, une patience indéfectible et une capacité de fraternité à toute épreuve.

ouverture des portes de la psychose ordinaire

On ressort de la lecture de ce livre plus proches de nos consultants comme de nous-mêmes, plus enclins à ressentir de la tendresse pour ces lieux si fragiles, tellement partagés par tous et si constitutivement humains. On se surprend même à éprouver de la reconnaissance envers ces consultants qui nous ouvrent les portes de la psychose ordinaire trop souvent hermétique à nos contemporains.