« Le national-socialisme est un principe barbare. C’est son essence et sa possible grandeur. Le danger ne vient pas de lui, mais au contraire de ce qu’il soit rendu inoffensif en un sermon sur le Vrai, le Bon et le Beau. »
« Der NS ist ein barbarisches Prinzip. Das ist sein Wesentliches und seine mögliche Größe. Die Gefahr ist nicht er selbst – sondern daß er verharmlost wird in eine Predigt des Wahren, Guten und Schönen »
(M. Heidegger, Überlegungen II-VI Schwarze Hefte, 1931-1938, GA 94, p. 194).
Net, précis, schrecklich (effrayant) – connu depuis 70 ans.
La survenue des Cahiers noirs suffira-t-elle à remettre la pendule à l’heure ? Les grecs ont inventé l’aliciia (aletheia), l’énigme du surgissement de la vérité, les germains guidés par Heidegger accompliront leur démarche, nettoyant le monde des juifs qui avaient corrompu le message des « grecs » (purs aryens dont les germains guidés par Heidegger en culotte de peau héritent du flambeau).
Le monde de l’Être (germanique) contre le monde de la Loi. Tout de même un sérieux naufrage pour « le plus grand penseur du siècle. »
Ce qui reste à méditer ça n’est pas le nazisme de MH c’est l’obstination de ses traducteurs français à camoufler l’évidence. Leur Noé n’est pas nu à couvrir d’un manteau, il est couvert des bubons de la peste brune.
Ce qui reste à méditer c’est que Heidegger nous apporte en même temps qu’une pensée impressionnante, la tâche d’absorber sa « grosse » imperfection(1), son « péché »(ça c’est de la pensée juive).
Autrement dit il est bien « humain trop humain », comme vous et moi. Vicieux même, pas rusé malin, maligne. Enfoiré de nazi quoi. Que faire de ça, vous, à la première personne du singulier ? Ce malaise congénital, il relève du devoir de mémoire de ne jamais l’oublier.
À la réflexion, il serait plutôt para théologien. Dans le genre, Kierkegaard c’est infiniment mieux. En tout cas la condition humaine selon Heidegger n’est pas triste. Désolante plutôt. Nous serions jetés dans le monde. Certes nous entendons protester contre la marchandisation du monde qui tend à faire de nous des êtes jetables, des objets. Mais le jeté heideggerien fondamental, déréliction ontologique, est aussi profond qu’une fosse commune. Nous arrivons abandonnés (ah bon ? je croyais être arrivé dans une famille, qui précisément s’était réjouie de me prendre en charge, aléas de la situation compris, pour m’accompagner dans la découverte de la vie et du bonheur d’exister, j’ai dû rater quelque chose), êtres pour la mort (ça se comprend, du point de vue nazi — daté). La relation n’étant alors que pitié compensatrice, appelée Souci, pour ce pauvre étant déchu déchet d’être dans la solitude du monde. D’ailleurs cette relation prend généralement l’allure inauthentique d’un bavardage. Il va falloir passer à l’authentique. Facile : éviter « l’oubli de l’être » pour contacter notre profonde vérité : la finitude radicale de la mort. Gros « souci », l’existentialité débouche inévitablement sur l’angoisse de mort. Ce prophète de malheur n’est pas plus joyeux que le régime dont il fut l’heureux contemporain. On peut avec Robert Misrahi lui préférer le Spinoza d’une philosophie de la Joie. Vous m’objecterez que c’est de la pensée juive. Sartre et son existentialisme à dimension tragique se démarque partiellement de son maître de référence. Mais ce furent les américains qui pensèrent l’existentialisme sur le mode d’une créativité de soi qui ne suinte pas l’angoisse, et c’est Bill Schutz qui écrivit Joie. Évidemment on ne va pas non plus se la jouer « mélodie du bonheur ». Mais il reste piquant de voir certains gestalt-thérapeutes s’abreuver auprès d’une philosophie aussi sinistre en s’exonérant de la réflexion critique qu’elle requiert.
Reprenons les termes de l’article de Claude Lanher ici même intitulé Introduction à la philosophie de Heidegger [les mises en gras sont de notre Rédaction] :
« Notre existence comme êtres singuliers est fondamentalement rapport à..., donc toujours ouverture à…. et jamais subjectivité enfermée dans un individu. Nous existons dans ces multiples possibilités de nous rapporter au monde, aux autres et à nous-mêmes, comme ce monde et les autres n’existent eux-mêmes que sur fond de ces relations. Avec les analyses de Heidegger, c’est une tout autre approche du sujet qui se met en place et dont la culture du XXème siècle hérite. »
Cela fait de lui le philosophe (pas si incontournable qu’on a pu le répandre comme si durant toute une période il avait pu exercer une fascination qui reste à analyser, rendant inaudible la critique qu’il serait sain d’y appareiller) d’une réflexion sur la relation, certes pas née avec lui, la filiation part du Brentano de l’intentionnalité, passe par Jaspers et Buber, fleurit avec Husserl, le maître de Heidegger, se prolonge avec Levinas et l’exemplaire Jan Patočka – beaucoup de pensée juive dans tout ça, et se poursuit jusqu’à nos jours. Cette réflexion fonde également l’existentialisme, et reprend à sa racine la question de l’humanisme. Elle propose également une critique de l’univers de la techno-science. On connait l’antienne : »la terre ne ment pas ». Tout cela reste confus, mais comme écrit sur le mode illisible, ça passe.
Son œuvre, rédigée dans un allemand terrible (Freud lui était un grand écrivain), poético charabia (on n’est pas loin de Lacan, sur un autre mode, mais de grâce ne nous racontez pas qu’il serait Mallarméen ! à quoi peut conduire la dévotion !) qualifié de volontairement incompréhensible histoire de mépriser les innombrables en pareil cas imbéciles, « certains se font obscurs pour paraître profonds » disait déjà Voltaire, ou de génial, dans une langue donc que ne comprennent pas davantage les allemands, peut cependant s’aborder par l’intermédiaire d’excellents commentateurs. Les traducteurs en français se sont généralement arrangés pour édulcorer, jusqu’à effacer, les manifestations de pensée de type nazi qui agrémentent son œuvre. C’est facile, par exemple on traduit Vernichtung, le maître mot de Hitler, anéantissement i.e. assassinat génocidaire, par élimination. Ni vu ni connu nous voici embrouillés, l’Histoire à propos embrumée derrière le rideau de fumée de l’historial.
Tous les dix ans on établit une supplémentaire preuve du nazisme de Martin Heidegger, preuve de ce que tout le monde savait déjà, et chaque fois le nouvel élément aggrave les précédents. Tout de même il fut condamné à Nuremberg et interdit d’enseignement pour cinq ans. C’est que ce grand philosophe incontournable a fait avoisiner l’Être-pour-la-mort avec l’Être-pour-Hitler, vous me direz ça va bien ensemble. Sans compter que l’ Être-pour-la-vie c’est pas mal non plus, mais pas trop dans le style de la maison. Jamais il n’a consenti notre grand homme à se défaire de son nazisme, avec lequel il a maintenu sa complicité avec une duplicité intellectuelle aussi déterminée que sa capacité de philosopher. Si bien que ce maître de l’Être-pour-le-malaise de devoir avoir affaire à lui continue de tracasser ceux qui se trouvent obligés de se référer à sa torse pensée. Jean-Pierre Faye a bien cherché à démontrer que sa pensée serait nazie dans son essence (ou son existence comme vous voudrez), question terrible, outrance ultra gauche de son fils Emmanuel Faye désireux de rayer de la carte philosophique et Heidegger et… Jacques Derrida (parmi d’autres, l’incroyable bande des français édulcoreurs sans compter les Résistants cautions de vertu, c’est quoi ce mur de protection ?). L’humanité pour l’instant reste avec cette épine dans le pied, ou caillou dans la paire de godasses peinte par Van Gogh, on appelle ça scrupule en latin. Pas une raison non plus pour foncer dans une sorte d’anti Heideggerisme mécanique qui deviendrait contre productif. À vous de voir mais de grâce regardez-y à deux fois face aux falsifications systématiques de nos heideggerolâtres. Question de méthode, et d’éthique, avisez vous de rester, concernant le phénomène heideggérien, ça s’impose, critique.
– Dominique Janicaud, L’Ombre de cette pensée. Heidegger et la question politique, Grenoble, Millon, 1990.-
– Dominique Janicaud, Heidegger en France, Paris, Albin Michel, 2001. Collection Bibliothèque Albin Michel. Idées, ISSN 1158-4572. Vol. 1, Récit ; Vol. 2, Entretiens. Note(s) : Bibliogr. vol. 1, p. 543-572.-
– Élisabeth Roudinesco, Retour sur la question juive, Paris, Albin Michel, 2009, 325 p.-
– Élisabeth Roudinesco, Histoire de la psychanalyse en France – Jacques Lacan, Pochothèque, 2009, 2118 p, cf. pp 1608-1632 et surtout 1773-1791.-
– Philippe Lacoue-Labarthe, La Fiction du politique: Heidegger, l’art et la politique, Bourgois, 1988.-
– Philippe Arjakovski, François Fédier, Hadrien France-Lanord,) [sous la direction de], Le dictionnaire Martin Heidegger, Cerf, 2013.- un pavé qui n’en finit pas, jusqu’à la falsification traductive, pour parler comme le maître, de nier en France l’évidence du nazisme de l’homme à la « grosse bêtise ».
– Édit Blanquet, Apprendre à philosopher avec Heidegger, Paris, Ellipses, 2012, 452 p.- Édith Blanquet est psychologue clinicienne et comprend Heidegger depuis le point de vue psy. D’abord facile, l’ouvrage introduit agréablement à l’édifice philosophique, considérable, de ce « renard » (le mot est d’Hannah Arendt) d’Heidegger. L’autrice, gestaltiste par ailleurs, ne veut toujours rien savoir des croix gammées filigranées dans la tête de l’auteur dont elle organise la visite de l’œuvre.
– Claude Romano, « L’idée d’antisémitisme philosophique est un non sens », pp. 1008-1018 in Critique N° 811, 2 déc 2014 : Heidegger : la boîte noire des Cahiers.
– « Heidegger – Claude Romano se trompe » :
La pensée de l’intentionnalité disions-nous n’a pas été inventée par Heidegger loin de là, venue de Brentano elle est développée par Husserl, la maître d’Heidegger qui considérait l’humanisme européen depuis une tout autre hauteur(2), traverse tout le siècle et l’irrigue. Pour les hôtes de la région de la psychothérapie relationnelle comme pour la psychanalyse ce courant représente une puissante source d’inspiration. Le pire c’est qu’au cœur du débat se trouve la question de l’humanisme, auquel il contribue avec sa Lettre sur l’humanisme (1946)(3). On vous a dit qu’on ne s’en sortirait pas. S’informer du débat et ne pas oublier chemin faisant Jan Patočka.
En tout cas tout de même Heidegger dans sa Lettre sur l’humanisme, qu’il oppose au Sartre de l’Existentialisme est un humanisme, définit sa propre position comme anti-humaniste. Cela sera repris par l’anti humanisme théorique d’Althusser. L’idée étant de faire se prendre pour des naïfs ceux qui jusque là avaient installé l’homme au centre de gravité de leur système de valeurs, dans le cadre d’une philosophie de la liberté (ainsi Sartre). Les dénonciateurs de l’illusion (même mécanisme avec l’illusion groupale d’Anzieu, dont la dénonciation peut tout ravager sur son passage) sont à considérer avec la circonspection nécessaire.
L’expression « salaud de génie » se trouve dans le journal de Michel Leiris, première ligne de 1932 :
« Céline (« salaud de génie ») : Voyage au bout de la nuit. »
Dès 1932 Leiris détecte le sale type en filigrane. Décidément le crapulisme antisémite des années 30 aura marqué quelques personnalités extrême-droitières. L’humanisme goguenard de Céline faisant fuir en dérision les valeurs auxquelles nous tenons, mérite d’être analysé comme fielleux. Mais le mérite revient à l’écrivain d’avoir transfiguré le style prolétarien, qu’il n’a pas inventé, en un phrasé jazzy, au plus proche du français parlé. Pour le reste on peut en suivant le déroulé de l’œuvre, remarquer que tout ce que l’auteur reproche au stéréotype qu’il s’est constitué du juif, est étonnamment lisible comme portrait de l’artiste. Ouverture sur les bienfaits et limites de la projection, comme identité propre vigoureusement non réintégrée. C’est beau la phobie.
À ce propos Emmanuel Faye poursuit son combat dans Le Monde du 28 janvier 2014, à l’approche de la publication des fameux Carnets noirs, auxquels leur couleur ne sied pas si mal. Il pose la question, dérive ou racisme ontologisé ? par leur « déracinement de tout étant hors de l’être » les juifs sans foi ni sol apportent à l’Allemagne la « dégénérescence de leur vision du monde », un monde dont ils sont philosophiquement et « historialement » exclus puisque « sans monde », carrément.
Jean-Pierre Faye prolonge sa pensée. Uni sous la Führung (commandement) hitlérienne, le peuple germanique se trouve, par son être même, inscrit dans un monde ou espace commun dont sont exclus tous les autres. C’est soutient-il d’un racisme ontologisé qu’il s’agit.
Alors, errance, erreur, ou philosophie d’essence (et d’existence !) nazie, serviteure du Mal ? L’affaire reste obscurcie du fait des diverses cautions dont a bénéficié celui qui avec le « talent calculateur prononcé » qu’il attribue généreusement aux juifs, n’en étant personnellement pas trop dépourvu lui-même, s’est toujours finalement bien tiré d’affaire jusqu’ici.
Alors on nous annonçait récemment que la sapin de Noël 2013 philosophique serait un marronnier sur Heidegger le renard dont parle Hannah Arendt, on a trouvé la preuve dans ses Carnets noirs enfin que sa pensée en soi nazillait, pourvue d’un antisémitisme « lamentable » au dire d’Hadrien France-Lanord (l’auteur du fort utile et controversé Dictionnaire Martin Heidegger). En finira-t-on jamais ?
De fait, Heidegger, crut réellement à l’efficacité en philosophie du Führer Prinzip, on appelle ça un nazi, même si de variété pas directement antisémite disent ceux qui désirent aveugler cette dimension [Précisément à ce sujet les Noirs carnets sont navrants et vont contribuer à dessiller mais on le savait de longue date.] mais ça veut dire quoi ? et n’a jamais été capable (marié à une nazie convaincue pour ne rien arranger) de condamner au moins après-coup l’horreur des camps et de la Shoah. Tout de même une Ereignis de nature à secouer le cocotier de la philosophie (Hans Jonas, Le Concept de Dieu après Auschwitz). L’ensemble donne soit un grand philosophe dans la peau d’un personnage veule et sans qualité morale, réfugié dans son intelligence – le Ne-pas-vouloir-savoir ne relevant pas de ses catégories, soit un fourrier du nazisme en philosophie. Maudit Heidegger ! Nicht versöhnt (non réconcilié)(4) pour paraphraser Jean-Marie Straub. L’humanité est ainsi parfois faite, et l’Histoire bégayante. Tout de même, comme certains gestalt-thérapeutes ne jurent que par Heidegger, il faudrait songer dans ce contentieux (« unfinished buisiness ») permanent, à chercher à y voir clair (« awareness ») et prendre quelque peu ses distances.
L’inconfort est pour l’interlocuteur du philosophe, qui lui ne doit pas oublier. Être-pour-la-mort sous sa plume restera connoté Nuit et brouillard. Seulement quand on a ce passé jouer au petit malin qui se débrouille avec un tel brouillard en fait le roi de l’embrouille et le réduit à sa malignité et petitesse. Cet homme infréquentable par le mépris qu’il inspire (même si René Char et Hans-Georg Gadamer furent ses amis, le renard ne saurait se voir dédouaner à si bon compte) nous laisse une philosophie incontournable à laquelle emprunter la rigueur de sa construction et la puissance d’une pensée révolutionnaire de l’espace être-temps, ayant tout de même engendré l’existentialisme – toujours sans oublier que la reliure du bouquin s’orne d’une tête de mort de sinistre mémoire. Ceux qui veulent méditer là-dessus le peuvent. Son côté marronnier fatigue la matière, mais c’est qu’il s’agit d’insister, l’enjeu étant de taille, sans verser dans l’ultra-gauche qui transforme en nazis d’authentiques honnêtes penseurs.
Sartre l’a exécuté en quatre mots, grand philosophe et nazi. Précisant philosophiquement dans Critique de la raison dialectique p. 248 de l’édition 1967 : « Toute philosophie qui subordonne l’humain à l’Autre que l’homme, qu’elle soit un idéalisme marxiste ou existentialiste, a pour fondement et pour conséquence la haine de l’homme : l’Histoire l’a prouvé dans les deux cas. Il faut choisir : l’homme est d’abord soi-même ou d’abord Autre que soi. Et si l’on choisit la seconde doctrine, on est tout simplement victime et complice de l’aliénation réelle ». Mais l’ontologie générale que tente Heidegger a-t-elle à voir avec l’autre en majuscule ? La compréhension de l’être en général passe par une compréhension de l’être de l’homme, en évitant le piège d’une subjectivité qui prendrait notamment appui sur la conscience. Ce faisant, outrepassant Descartes puis Husserl, on passe de l’intentionnalité au souci, on écarte Sartre d’un revers de main, pour tomber à pieds joints sur le Dasein. Si vous n’avez pas tout compris c’est normal, il faut étudier, penser, c’est la dure loi de l’étant et Heidegger savait penser dur, durement même.
La question étant (!) de déterminer s’il pensait nazi. Voici le point qu’en établit au cours d’un dialogue avec Jean-Pierre Faye, Éric Aeschimann qui conclut par
« trois remarques :
1) Que Heidegger ait rallié le parti nazi, c’est un fait établi (et que le premier Faye a contribué à établir);
2) une philosophie qui ne permet pas de percevoir la vérité du nazisme, voire qui contribue à s’aveugler, a un problème sérieux avec le réel. On est fondé à juger qu’un tel échec ôte à Heidegger toute crédibilité – [toute ? NdlR].
3) de là à accumuler des citations effrayantes, à poser en regard la dette de Derrida envers le penseur allemand puis à conclure que le Collège international de philosophie serait une porte d’entrée de la pensée nazie en France, il y a un pas que je persiste à trouver trop rapide. »
Quand notre grand penseur se met à penser aux juifs, penser la juiverie plus précisément – Judentum – cela demeure effrayant, que voulez-vous, le grand homme rongé par l’historialité, engouffré dans le cauchemar de l’Histoire n’a pas pensé non plus l’étant de la SS. Et il n’a jamais voulu à la sortie de l’horreur, penser, – il a suffisamment répété que c’était la tâche du philosophe, quelque chose de son parcours et de celui de l’Allemagne. Alors, sale type ou sale philosophe ? Radicalement, sa philosophie elle-même, de l’Être en tant que telle, est-elle abjecte (5) ? Comme dirait l’humoriste demerden Sie sich avec ça. Emmanuel Levinas parle de la dette de tout chercheur contemporain envers Heidegger : « dette qu’il lui doit souvent à regret. » (Emmanuel Levinas, Dieu, la mort et le temps, Livre de poche, p. 16.). Peut-on s’en tenir là ?
Après tout l’exigence idéaliste de voir communier entre eux le bon le beau et le vrai (Platon) n’a rien d’évident. Quant à la morale Heidegger se défend d’être existentialiste humaniste façon Sartre. Il propose une décentration plus radicale, qui engendrera le fameux « anti-humanisme théorique » (Althusser). La question d’une philosophie de l’être, d’une distance critique entre l’Idée et la réalité (noumène et phénomène chez Kant), comme celle de la problématique de la rencontre et de la subjectivité et intersubjectivité, reprise notamment par Lacan mais aussi par l’ensemble du courant phénoménologique depuis Brentano (1862) (6) donne au praticien en psychothérapie, et spécifiquement la relationnelle, la responsabilité imprescriptible de l’explorer. Sans connaissance de ses racines un tel praticien flotterait dans un référentiel complexe auquel ne comprenant rien il se trouverait non pas lié mais ficelé. Nous n’avons pas davantage le droit d’être naïfs (complices de la perversion) qu’ignorants.
Le nazisme d’Heidegger peut déchaîner les passions. S’en informer et rester calme, presque sans Faye.
– wikipedia, bien fait.
– Édith Blanquet, Apprendre à philosopher avec Heidegger, Paris, Ellipses, 2012, 452 p.- Édith Blanquet est psychologue clinicienne et comprend Heidegger depuis le point de vue psy. D’abord facile, l’ouvrage introduit agréablement à l’édifice philosophique, considérable, de MH.
– Claude Lanher, Introduction à la philosophie de Heidegger
, [mis en ligne le 11 janvier 2013].
– Heidegger encore une fois [Mars 2013] par Nicolas Truong, Le Monde.
– Emmanuel Faye, Heidegger, l’introduction du nazisme dans la philosophie : autour des séminaires inédits de 1933-1935, Paris, Albin Michel, Idées 2005. ISBN 2-226-14252-5 (réédition: Livre de Poche, 2007 ISBN 978-2-253-08382-5 avec une préface inédite et la bibliographie des premières recensions du livre)(7). En la matière rester vigilant de toutes parts. De nombreux auteurs considèrent l’entreprise de Faye comme excessive, et pour finir contre-productive.
– LE MONDE | 02.08.2013, Carl Schmitt, Jünger, Heidegger : le nazisme des intellectuels.
– Heidegger et les cahiers noirs : comme prévu, Emmanuel Faye jubile. Ne pas s’engouffrer.
29 décembre 2013 – 13 mars 2014 – 30 août 2014 –