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15 mars 2011

Bulletin de la société internationale d’histoire de la psychiatrie et de la psychanalyse(Ed. Henri Roudier)

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Cycle de conférences 2011

Jeudi 17 février à Paris

Conférences d’Introduction à la Psychanalyse

Le 3ème jeudi de chaque mois de 12h à 13h

Centre Hospitalier Sainte-Anne

Grand Amphithéâtre de la CMME

Entrée au 100 rue de la Santé – 75014 Paris
Service du Professeur Rouillon

Marcianne Blévis

Envie et gratitude de Mélanie Klein
Public : Psychiatres, psychologues, internes en psychiatrie,
stagiaires psychologues ayant une expérience
clinique et un engagement psychanalytique personnel le cas échéant
Coordination : Dr Sophie Criquillion-Doublet et Zoé Logak

 


A l’initiative de la Société Normande de Philosophie et à l’invitation
du CERReV (MRSH) et avec le soutien de la Société Internationale
d’Histoire de la Psychiatrie et de la Psychanalyse.

Vendredi 18 février à Caen

De 20 h à 22 h
Amphithéâtre Tocqueville Université de Caen-Basse-Normandie
Esplanade de la Paix.
Entrée libre.

Conférence-Débat

Christian Godin

Refoulement de la psychanalyse ?

Une défense et illustration de la psychanalyse
Autour de son livre Le Pain et les miettes, éd. Klincksieck.

Maitre de conférences en philosophie (Université de Clermont-Ferrand)
Auteur de La Totalité et La philosophie pour les nuls

Avec la participation de :

Nadine Proïa-Lelouey

Professeur de psychologie clinique et pathologique  (Université de
Caen), membre du CERReV

Gilles-Olivier Silvagni

Psychanalyste, membre de la SIHPP

Après une période de domination intellectuelle, jusque dans les années
1970, la psychanalyse a été en France, l’objet d’un véritable
refoulement dont il nous faut comprendre les raisons profondes.

A l’écart de toute école et plus encore de toute chapelle, Christian
Godin, philosophe et maître de conférences à l’université de
Clermont-Ferrand entend montrer comment, en plus de sa dimension
thérapeutique qui résiste encore héroïquement à l’impérialisme de la
pharmacie, la psychanalyse représente un indispensable moyen de
compréhension critique. Faute de quoi, c’est la fiction du sujet
néolibéral responsable de tout et ivre de bonheur qui risque de
s’imposer, contre les évidences mêmes.

A partir de son livre, Le Pain et les miettes, paru l’an passé chez
Klincksieck, Christian Godin analysera quelques symptômes de notre
hypermodernité (consumérisme, vide-grenier, euthanasie…) et de
l’inconscient d’un homme, de plus en plus répandu dans le monde
mondialisé, partagé entre le fantasme de la totalité (le pain) et le
désastre du rien (les miettes).

La conférence sera suivie d’un débat avec la salle et avec les deux discutants.

 


Mercredi 9 Mars de  10h à 13h

APM

SEMINAIRE D’ANTHROPOLOGIE ANALYTIQUE

Evolution, anthropologie et biosémiotique

Sous la direction de Houchang Guilyardi

Prendre connaissance des avancées, de la dimension considérable du
décentrement provoqué par les savoirs spécialisés peut donner le
tournis, le vertige, l’effarement, et plus loin, incompréhension et
déstabilisation angoissante. Il s’agit ici de prendre part au voyage
et d’élargir son champ de vision  avec  astrophysiciens, archéologues,
anthropologues, historiens, linguistes…

Clarisse Herrenschmidt

Chercheuse au  CNRS

Les trois écritures

Ecriture des langues, écriture monétaire, écriture informatique
Signes d’écriture et bouleversements sémiologiques


Parution : Daniel Lemler

Répondre de sa parole

L’engagement du psychanalyste

Préface d’Élisabeth Roudinesco

Editions Eres

Symbole de notre lutte contre la déshumanisation, la question que pose
Daniel Lemler – « Quelle est ta part dans ce qui t’arrive ? » – nous
interpelle au lieu de notre subjectivité et nous invite à être auteur
de notre parole, d’en répondre.

Si toute société est fondée sur la mise en place d’un tiers exclu
(SDF, juif, rom, etc.), l’auteur met en évidence un autre type
d’exclusion, interne celui-là, au fondement des normes sociales. Il
concerne trois personnages emblématiques, représentatifs,
chacun à sa manière, d’une part « maudite » de l’humain :
l’hystérique, le pervers et le fou.

À la singularité humaine, la représentation économique du monde qui
caractérise notre temps, dont le Signifiant Maître est la rentabilité,
oppose le chiffre. Santé et culture n’échappent pas à son emprise
universelle. Se trouve ainsi mise en péril l’une
des voies essentielles pour lutter contre la déshumanisation : la sublimation.

La psychanalyse offre tous les outils nécessaires pour résister à ce
phénomène : retour à la responsabilité individuelle, recentrage sur
notre implication subjective ans notre propre destin…
Donnons-nous les moyens de répondre de notre parole !

Daniel Lemler

Psychanalyste, psychiatre, chargé d’enseignement à l’université de Strasbourg.

Il est aussi président du Groupement des études psychanalytiques de la
F.E.D.E.P.S.Y. (Strasbourg).

Il intervient régulièrement dans le champ médical, entre autres comme
consultant dans un service d’Aide médicale à la procréation et leader d’un groupe « Balint ».


L’article suivant est paru dans Libération le 1er février

`
Soudain, l’immolation

Par FETHI BENSLAMA

Psychanalyste, professeur de psychopathologie, université Paris-VII,

membre de la SIHPP

La révolution tunisienne a surgi d’un angle mort. Vouloir aujourd’hui
expliquer ses causes à travers les catégories objectives de la
rationalité socio-économique est insuffisant. De telles explications
finissent par nous faire adhérer à cette illusion déterministe qui
fait tant de mal à notre époque où tout semble programmé. Elles
privent l’existence humaine d’avenir en la rendant prévisible, dans le
confort rétrospectif refroidi. Non, la révolution tunisienne est une
surprise y compris pour ceux qui l’ont déclenchée et menée avec
résolution. De plus, elle survient dans une situation où la notion de
révolution s’est retirée de notre espace de pensée, au moins depuis la
chute du mur de Berlin.

La levée du soulèvement des Tunisiens, autant que sa puissance, a
échappé à tout le monde. A commencer par le système de l’ancien
président Ben Ali. Son déclenchement est venu d’une zone inaccessible
au champ de vision contrôlé qu’il a constitué. Comment approcher cet
angle mort ? Il faut accorder à la notion de déclenchement une valeur
propre, qui va au-delà de la conception mécaniste de l’accumulation et
de la rupture. Il nous faut penser ce «soudain», qui désigne dans la
langue «ce qui vient sans être vu» et qui, en un court laps de temps,
renverse massivement la soumission, du moins apparente, en
insoumission flagrante et généralisée.

Ce déclenchement porte un nom désormais, celui de l’auto-immolation de
Bouazizi. Contrairement à ce qui a été dit, Bouazizi n’est pas un
diplômé sans emploi, mais un marchand de fruit à la sauvette, auquel
la police municipale a confisqué son étalage ambulant, et qui a été
giflé lors de l’empoignade, par l’un des agents. Ce n’est pas
seulement parce que son moyen de subsistance lui fut enlevé qu’il
s’est immolé, mais suite à sa plainte qui a trouvé porte close ou qui
fut jugée irrecevable. C’est la coïncidence entre la privation
matérielle et la non-reconnaissance d’un tort qui a conduit à l’acte
désespéré.

Or, lorsqu’on écoute l’homme de la rue en Tunisie et que l’on se rend
attentif aux mots qui servent à expliquer son soulèvement, en
référence à l’acte de Bouazizi, un signifiant revient sans cesse comme
une litanie : celui de qahr. C’est un vocable effrayant qui appartient
au registre le plus élevé de la puissance, celle qui asservit
quelqu’un et le réduit à l’impuissance totale. De sa racine dérive le
mot qui désigne le vainqueur impérieux, celui d’Irrésistible (l’un des
noms divins), celui du Caire (la cité victorieuse) et étrangement,
dans la langue arabe ancienne, celui de l’état de la chair brûlée et
vidée de sa substance. Trop belle coïncidence sémantique dira-t-on,
toujours est-il que les Tunisiens puisent dans le langage de la
détresse afférente à l’homme réduit à l’impuissance absolue, pour
désigner l’acte de Bouazizi comme source d’identification à sa
situation et aussi à sa révolte.

Il n’est pas exagéré de qualifier le régime de Ben Ali comme un
système de pouvoir qui réduit à l’impuissance totale : neutralisation
politique des Tunisiens et transformation des acteurs publics en
marionnettes, organisation policière brutale et techniquement
sophistiquée, pillage des biens communs par son clan vorace au su de
tous, humiliation physique et morale des opposants, arrogance et
menterie quotidiennes, avec les compliments des démocraties
européennes qui prétendent, comme d’habitude, ne pas savoir. L’acte de
Bouazizi a eu pour effet de pourvoir la révolte de la possibilité d’un
renversement, en montrant comment l’homme peut trouver une puissance
dans son impuissance même, peut exister en disparaissant, faire
prévaloir son droit en perdant tout.

C’est l’antinomie même d’un Ben Ali qui n’existe qu’en faisant
disparaître les autres, à l’instar de son image flanquée sur tous les
murs du pays. C’est le renversement du narcissisme du qahr par un
pauvre paysan d’une région laissée pour compte qui a fourni à tous les
Tunisiens le symbole (le langage en acte) qui a déclenché un processus
de subjectivation collective faisant fond, certes, sur des conditions
socio-économiques qui préexistaient ; conditions qui seraient restées
un état et non un procès irrépressible par lequel des femmes et des
hommes retournant subitement leur impuissance en puissance de refus.
Il y a un versant imaginaire à ce scénario du déclenchement, autour de
l’acte inédit de l’auto-immolation dans la culture tunisienne et
musulmane, si ce n’est peut-être l’écho de ce que nous avons appris
par cœur, enfants, du geste de la femme d’Hasdrubal se jetant dans le
brasier en criant : «le feu plutôt que le déshonneur» pour échapper au
qahr de Carthage par les Romains.

Parmi les trésors iconographiques de la révolution sur Facebook, il
existe un collage ou l’on voit la tête coupée de Ben Ali en tenue de
président de la République, remplacée par celle de Bouazizi. La thèse
freudienne de la constitution libidinale d’une foule est d’actualité :
une somme d’individus met le même objet à la place de leur idéal du
moi pour s’identifier les uns aux autres. Sauf qu’ici, Bouazizi
n’était pas un meneur, mais l’homme calciné qui, en disparaissant, a
permis à la multitude de s’enflammer. En quoi l’inconscient ne peut
pas ne pas être politique.