La quasi totalité des psychopraticiens relationnels(1) en formation actuellement sont des personnes en reconversion. Les politiques favorisant le corporatisme médical et la médicalisation de l’existence refusent de considérer cette réalité autrement que comme transitoire, et prévoient des cadres de formation « logiques », donc à leurs yeux universitaires, même si on leur démontre que l’université française en particulier est parfaitement incapable et indésireuse d’en remplir le cahier des charges pour former les psychopraticiens relationnels d’aujourd’hui(2).
Les mêmes politiques peinent à distinguer psychothérapie relationnelle de psychothérapie, entendue comme terme générique mal défini, ce qui engendre beaucoup de méprises, malentendus, confusion et batailles corporatistes. Des étudiants-apprentis en reconversion, ayant déjà fait leurs études dans leur jeunesse, savent ce qu’ils veulent lorsqu’ils entreprennent des études pour devenir psychopraticiens relationnels (ex psychothérapeutes relationnels, cette expression existe toujours mais a changé de sens). Ils ne sont pas prêts à confondre leur discipline avec celle de psychopathologue.
Par ailleurs le formatage cognitiviste qui semble passionner de nombreux psychologues universitaires les laisse massivement indifférents. Ils sont passionnés par une profession du souci de soi et du soin pris de soi, que nous appelons soin-souci, auprès d’un autre qui a longuement pris soin de lui-même de la même manière et s’est préoccupé d’apprendre ce qui lui est indispensable pour faire face en bon professionnel à cette demande très particulière, qui porte sur le malaise et non sur la maladie, et n’a rien à voir avec la médecine.
Dans toute l’Europe les psychopraticiens relationnels proviennent à 95 % de la reconversion. Cela crée une différence sensible avec des étudiants tout juste sortis d’étude, travaillant dans des collectifs hospitaliers, où ils apprennent sur le tas un tout autre métier au demeurant. Les psychopraticiens relationnels ont vécu, exercé un métier et des responsabilités, ils bénéficient d’une expérience de vie personnelle, ont atteint une maturité (n’oublions pas qu’ils ont parcouru eux-mêmes un itinéraire psychothérapique ou psychanalytique personnel important) qui leur permettent d’écouter la vie des autres à un moment de l’existence où ils ne sont pas eux-mêmes en train de la découvrir.
Il est heureux que ce soient des personnes issues d’une reconversion qui s’occupent de ce type particulier de demande, où il est requis d’avoir déjà vécu soi-même, et pris le temps de réfléchir à l’existence, à commencer par la sienne. Bienvenue à ce nouveau et beau métier et à ceux qui décident de militer pour lui et à travers lui de travailler de façon véritablement professionnelle à l’humanisation de l’humanité.
À vrai dire il faudra bien un jour que l’université, à l’instar de ce qui se fait parfois en Sciences de l’Éducation, en liaison étroite avec nos écoles de qualité car il y en a, accueille les psychologues et psychiatres ayant fini par deviner en quoi consistait notre métier, pratique et discipline, pour un accompagnement maturant, une réflexion à la mi-temps de leur pratique professionnelle, en vue d’une requalification dans le domaine de la psychothérapie relationnelle. Les étudiants de nos écoles agréées pourraient se joindre à une partie de tels cursus, ce qui leur conférerait la certification universitaire qu’on leur refuse actuellement. Cela ne sera pas chose facile vu la mentalité sévèrement corporatiste en psychiatrie et psychologie. En attendant, nous devrons continuer d’assurer seuls la formation de nos psychopraticiens relationnels.
Entrée du 19 oct 2008. Mises à jour le 30 août 2011, le 9 octobre 2011.